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Grandes oreilles américaines, postures françaises

Trois présidents français espionnés par la NSA.. l'indignation est générale dans le monde politique français.. mais au-delà des déclarations tonitruantes, l'affaire tourne au concours de postures..
Article rédigé par Louise Bodet
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3min
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Au sommet de l'Etat, on fait certes les gros yeux. Un conseil de défense bien solennel dès potron-minet, une ambassadrice américaine convoquée au Quai d'Orsay en fin de journée.. et entretemps tout ce que le répertoire politique permet dans le registre : "On n'est pas contents" du communiqué lapidaire dénonçant des faits "inacceptables" à la déclaration d'un Premier ministre martial depuis l'hémicycle de l'assemblée Nationale, en passant par un coup de fil du président français à Barack Obama. La France est en colère, donc.. mais a-t-elle vraiment les moyens et l'envie de se fâcher avec son ami américain ? 

 

L'Hermione plutôt que le Charles de Gaulle 

 

Pas sûr à un journaliste facétieux qui lui demandait si on allait envoyer le Charles de Gaulle à l’assaut des côtes américaines, le porte-parole du gouvernement Stéphane Le Foll a répondu à la mi-journée que la France préférait y envoyer l'Hermione. L'Hermione, réplique du bateau de Lafayette en 1780, et symbole de l'amitié franco-américaine. Stéphane le Foll qui appelle à "garder la mesure" et à "ne pas s'emballer ni dans un sens ni dans l'autre" On se fâche, donc mais pas trop. En d’autres termes, le message de fermeté de l'Elysée est plus politique que diplomatique.  Le sommet de l'Etat ne pouvait pas ne pas réagir, vu les cris d'indignation montant de toute part... majorité, opposition, tout le monde se scandalise des écoutes américaines, sans toutefois être vraiment surpris. Il est assez curieux d'observer un personnel politique qui réclame justice ou au minimum des excuses, mais qui reconnaît que ces pratiques étaient connues. "Il n'y a des révélations que pour les naïfs", car comme disait De Gaulle "les Etats n'ont pas d'amis" , a déclaré ce mercredi  un député souverainiste.. "Ni cynisme, ni naïveté " résume un conseiller élyséen. Bref, personne n'est dupe. 

 

Une affaire de politique intérieure 

 

Le jeu de rôles concerne l'ensemble du personnel politique, car cette affaire d'écoute apporte de l'eau à plusieurs moulins. Premier d’entre eux, la loi sur le renseignement, qui doit être votée ce mercredi soir par les députés. Ses détracteurs voient dans les écoutes américaines la confirmation de leurs craintes vis à vis d'une législation jugée liberticide. D'ailleurs les révélations de Wikileaks ne doivent rien au hasard. Elles sont intervenues très opportunément à quelques heures du vote de la fameuse loi dont les défenseurs affirment au contraire qu'il faut s'armer contre les grandes oreilles américaines, pendant que le gouvernement tente de convaincre que ces deux affaires n'ont "rien à voir".  Et comme si la loi renseignement ne suffisait pas, un autre sujet s'invite dans la polémique, les négociations sur le traité de libre-échange transatlantique. Le Front de gauche et le Front national appellent à la rupture de ces négociations. Une preuve que, décidément, les écoutes de la NSA sont aussi affaire de politique intérieure. 

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