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L'élégance discrète de Bertrand Delanoë

Il y a une semaine une page se tournait à Matignon, avec la nomination de Manuel Valls à la place de Jean-Marc Ayrault. Une autre page s'est tournée beaucoup plus discrètement à Paris. Bertrand Delanoë a transmis les clés de son bureau à Anne Hidalgo, dans la plus grande discrétion. 
Article rédigé par Marie-Eve Malouines
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3min
  (©)

Si vous étiez passé devant l'Hôtel de Ville,
samedi, aux alentours de midi, vous auriez pu croiser un promeneur solitaire, quittant
une maison qu'il a dirigé durant 13 années.

Le jour où son ancienne première
adjointe se ceignait de l'écharpe tricolore, Bertrand Delanoë a refusé toutes
les caméras, tous les micros, toutes les interviews.

Pourtant, l'ancien maire de Paris, aurait
pu se rengorger. C'est lui qui a mis le pied à l'étrier à Anne Hidalgo, dès
2001, alors qu'elle était totalement inconnue.

Avec Jean-Marc Ayrault, Bertrand Delanoë
est l'un des rares maires de grandes villes à avoir suffisamment préparé sa
succession pour qu'elle résiste à la vague qui a submergé tant de villes lors
des dernières municipales.

Pourtant, ce maire réputé exigeant,
autoritaire, voire orgueilleux, a quitté l'Hôtel de Ville tout simplement. A pied.
Tout seul.

Et
pourtant, Bertrand Delanoë est très heureux de la victoire d'Anne Hidalgo. Pourquoi
ne pas en prendre sa part ?

C'est une question de tempérament.

Bertrand Delanoë cultive l'élégance, y
compris en politique.

Il a juste signé son départ d'un tweet : " belle
vie à Paris avec Anne Hidalgo et son équipe ".

L'expression " belle vie " est
très typique de l'état d'esprit de Bertrand Delanoë.

Quand il doit prendre l'avion, et qu'il
dit au revoir à ses proches, c'est sa formule favorite : " si l'avion
tombe, dis-toi que j'ai eu une belle vie ".

Les responsables politiques parlent plus
souvent d'une vie bien remplie, mais pour Bertrand Delanoë, une vie réussie, c'est
une belle vie, bien remplie, mais avec la manière.

Il
avait repéré Anne Hidalgo en 2001, mais cela n'a pas été si facile.

Bertrand Delanoë s'était représenté aux
municipales de 2008, en affirmant aussitôt qu'il ne briguera pas un second
mandat.

Il s'est tenu à cet engagement, en se
payant le luxe de refuser d'entrer au gouvernement en 2012. Anne Hidalgo est alors
furieuse. Elle aussi a refusé d'intégrer l'équipe Ayrault, en pensant succéder
à Bertrand Delanoë dans le fauteuil de maire.

Il lui explique alors qu'il est de
meilleure stratégie de conduire sa  bataille
elle-même, en 2014. Et c'est ce qui se passe. Anne Hidalgo signe sa campagne,
et Bertrand Delanoë se tient dans l'ombre, ne sortant que très rarement sous le
sprojecteurs.

Samedi matin, pendant qu'Anne Hidalgo était
élue maire dans la salle du conseil municipal, Bertrand Delanoë suit la cérémonie
depuis son bureau, puis il y a accueilli Anne Hidalgo.

Ensuite, il est parti, tranquillement, à
pied. Sans rien dire du petit pincement au cœur qu'il a du ressentir.

Fidèle à cette formule d'un esthète
anglais du XVIIIè siècle, Georges Brummel : "  la véritable élégance
est celle qui ne se remarque pas ".

 

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