Pourquoi la question de l’héritage et des droits de succession divise-t-elle tant la Macronie ?
La présidente du groupe Renaissance, Aurore Bergé, a déposé un amendement au projet de budget en discussion à l’Assemblée qui divise les rangs de la majorité. L'édito politique de Renaud Dély.
Il y a un sujet tabou du débat politique en France : l'héritage et les droits de succession. La députée des Yvelines, Aurore Bergé, veut les alléger. Son initiative a suscité d’autant plus le trouble dans la majorité que, dans un premier temps, elle avait déposé l’amendement au nom de l’ensemble du groupe Renaissance. Or, de nombreux députés macronistes s’en sont désolidarisés.
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Aurore Bergé l’a donc repris à son compte avec l’un de ses collègues du Val-de-Marne, Mathieu Lefèvre. Mais le ministre des Comptes publics, Gabriel Attal, lui a fait savoir qu’il y était hostile. Pour justifier sa démarche, Aurore Bergé rappelle qu’il s’agit pourtant d’un engagement du candidat Macron pendant la campagne présidentielle…
Le flou
Si toute une frange de la majorité y est opposée, c'est d’abord, parce qu’au fil du temps, Emmanuel Macron a dit à peu près tout et son contraire sur ce sujet. Il fut hostile à tout allègement des droits de successions. Puis, en 2018, il s’opposa aux velléités des marcheurs d’alourdir cette fiscalité. Enfin, pendant la campagne présidentielle, il a donc promis de relever le plafond d’exonération des droits de succession pour "prendre en compte l’évolution des prix de l’immobilier". Une prise de position qui avait aussi un but électoraliste : siphonner les voix de la droite. Mais sur l’ampleur et surtout le rythme de la réforme, Emmanuel Macron est resté assez flou.
Et quand c’est flou, c'est qu’il y a un loup ! Et même au moins deux. Peut-être une meute. D’abord, une question de priorités : avec la crise énergétique, l’envol de l’inflation, le ralentissement de la croissance, pas question d’alléger les droits de succession dès le budget 2023. Ensuite, un vrai loup idéologique. Baisser les droits de succession c’est assez populaire dans l’opinion, mais d’abord à droite, la gauche y est plutôt hostile. D’où les divisions internes au groupe Renaissance où il y a encore des députés issus de la gauche. Sans oublier qu’à l’origine, le macronisme se faisait fort de lutter contre les inégalités de naissance et de récompenser le travail, la prise de risque, mais pas la rente et l’héritage.
Bref, au vu de ces dissensions, on comprend pourquoi cet amendement ne vise, officiellement, qu’à poser le débat. Et pourquoi il ne sera sans doute pas voté car il y a surtout urgence, à ne rien décider…
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