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Qui est Aisha Yesufu, la manifestante devenue le visage des mobilisations contre les brutalités policières au Nigéria ?

Pour illustrer les manifestations du mouvement #EndSARS contre les brutalités policières au Nigéria, une photo est devenue virale : celle de Aisha Yesufu, 45 ans, poing levé face aux policiers. Une femme engagée qui était déjà à l’origine il y a six ans du mouvement "Bring back our girls" contre le groupe terroriste Boko Haram.

Article rédigé par franceinfo, Marion Lagardère
Radio France
Publié
Temps de lecture : 2min
Aisha Yesufu, 45 ans, manifeste contre les violences policières. (CAPTURE D'ÉCRAN YOUTUBE)

Depuis des semaines, le Nigeria est en plein bouillonnement, avec des manifestations quotidiennes contre les brutalités policières. Des marches en tête desquelles on trouve beaucoup de jeunes et de femmes, dont Aisha Yesufu, 45 ans, devenue malgré elle le visage de ces mobilisations. Sa photo fait les unes de la presse, au Nigéria et au-delà : on la voit droite, face aux policiers, recouverte d’un hijab bleu, masque chirurgical sur la bouche, sourcils froncés et poing levé vers le ciel, avec derrière elle des rangées de jeunes brandissant des pancartes  "Don’t kill our future" ("Ne tuez pas notre futur").

Une femme qui n’est pas inconnue au Nigéria : depuis années, elle manifeste contre la corruption, pour plus de justice, pour défendre les droits des jeunes filles. C’est elle, par exemple, qui était à l’origine du mouvement Bring Back Our Girls, ("ramenez nos filles"), lorsque plus de 200 adolescentes avaient été enlevées par le groupe terroriste Boko Haram en 2014.

Sur ses comptes Twitter et Instagram, elle se présente comme une "activiste n’aimant pas les étiquettes". Et il y a beaucoup à faire : Aisha Yesufu est souvent vilipendée au Nigeria, par des hommes principalement, comme ce dessinateur de presse qui lui reproche de combattre les traditions alors qu’elle est voilée. Ou d’autres qui affirment sur les réseaux sociaux que le Coran interdit aux femmes de manifester, mais autant dire qu’elle se rit des commentaires.

Je suis prête à sacrifier ma vie pour mes enfants, je les ai mis au monde, il faut bien que je me batte pour qu'il y vivent bien

Aisha Yesufu

Twitter

Aisha Yesufu n’est pas née à Lagos, la mégapole du sud, mais a grandi dans une famille pauvre du ghetto de Kano, aux portes du Sahara. "Quand j’avais onze ans, raconte-t-elle au Guardian Nigeria, j’ai perdu toutes mes amies, elles ont toutes été mariées, alors que moi j’étais mal vue mais j’ai pu étudier, être diplômée et me marier quand je l’ai voulu, à 24 ans."

Elle dit que c’est adolescente qu’elle a pris conscience de l’importance de manifester. Alors régulièrement elle descend dans la rue, défend le droit des femmes à être propriétaire, à pouvoir hériter, dénonce viols et mariage forcés. Pourquoi ? "Parce que j’ai une grande bouche, répond-elle en souriant, et puis pour mes enfants." En l’occurrence, une fille et un garçon, de 15 et 18 ans, qui l’accompagnent désormais derrière les banderoles. "Je les ai mis au monde, écrit-elle sur Twitter, il faut bien que je me batte pour qu’il y vivent bien." 

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