Cet article date de plus de douze ans.

En Egypte, la relation entre un copte et une musulmane vire à l'affaire d'Etat

Ils sont jeunes et ils s'aiment. Ils habitent le village d'Al-Amiriya, près d'Alexandrie, dans le nord de l'Égypte. Le fiancé s'appelle Mourad Guirguis. Il est commerçant, il est tailleur. Et il est copte. Il appartient à cette minorité chrétienne qui représente 5 à 10% de la population égyptienne. Elle, on ne connaît pas son nom, mais on sait qu'elle est musulmane. Les deux jeunes gens sont discrets, si discrets que personne n'a la preuve de leur relation.
Article rédigé par Jean Leymarie
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 1min
Franceinfo (Franceinfo)

Pourtant, un jour, à la fin du mois de janvier, le barbier du village affirme que Mourad Guirguis possède, dans son téléphone portable, des photos indécentes de la jeune fille. Aucun habitant n'a vu ces images mais l'accusation se propage à toute vitesse, et elle est grave : un copte avec une musulmane, dans le village, c'est inadmissible.

Des centaines d'habitants menacent le commerçant chrétien. Le tailleur est obligé de se réfugier au commissariat de police. Sa maison est incendiée. Sur le site internet du Point, Denise Ammoun, la correspondante du journal en Egypte, raconte que des anciens du village décident alors d'intervenir. Ils se rassemblent pour trouver une solution. Un salafiste préside la réunion. Il a une idée, très simple : "pour calmer les esprits, dit-il, huit familles coptes devront quitter le village. Leurs biens seront vendus". C'est un bannissement, une expulsion, totalement injustifiés.

Des associations entendent parler de cette condamnation et s'insurgent. Plusieurs partis politiques demandent à l'Etat d'intervenir et de soutenir les familles chrétiennes. A l'Assemblée, des députés coptes et des parlementaires salafistes s'affrontent publiquement. Les premiers menacent de démissionner, les seconds approuvent la sentence.

Dimanche dernier, au Caire, une manifestation est organisée. Selon le Point, elle réunit des centaines de personnes. La marche commence dans un quartier copte ; elle se dirige vers l'Assemblée. La police n'intervient pas. Et le parlement finit par réagir. Une commission va se rendre dans le village. Les huit familles coptes pourraient bientôt rentrer chez elles. Quant au tailleur et à sa fiancée, on ne sait pas ce qu'ils sont devenus.

Commentaires

Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.