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Taxes américaines : "Nous sommes en train de danser au bord du gouffre" estime Jean-Baptiste Lemoyne

Le secrétaire d'Etat auprès du ministre de l'Europe et des Affaires étrangères était l'invité du "19h20 politique" vendredi sur franceinfo. Il est revenu sur la décision des États-Unis de taxer l'aluminium et l'acier importés de l'Union européenne, du Canada et du Mexique.

Article rédigé par franceinfo
Radio France
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Jean-Baptiste Lemoyne, secrétaire d'État auprès du ministre de l'Europe et des Affaires étrangères, vendredi 1er juin 2018 sur franceinfo. (FRANCEINFO / RADIOFRANCE)

Invité de franceinfo vendredi 1er juin, Jean-Baptiste Lemoyne, secrétaire d’État auprès du ministre de l’Europe et des Affaires étrangères a estimé que "nous sommes en train de danser au bord du gouffre" et que "le nationalisme économique peut conduire à la guerre commerciale."

franceinfo : "Chaque fois que je pense à Donald Trump, je suis perdu", a déclaré le président de la Commission européenne, Jean-Claude Junker. Vous aussi ?

Jean-Baptiste Lemoyne : Donald Trump fait ce qu’il a dit qu’il ferait. Il a fait une campagne électorale, sur un thème très protectionniste. Aujourd’hui, il a sa rationalité propre. Mais cela ne nous empêche pas de penser que les réponses qu’il apporte ne sont pas les bonnes réponses. Le nationalisme économique peut conduire à la guerre commerciale. Potentiellement, cela menace aussi le pouvoir d’achat et des emplois américains. Il y a beaucoup d’entreprises européennes aux États-Unis. Mettre de la tension sur la ligne, ce n’est pas la bonne solution. Il faut s’adresser aux vraies causes du problème et les vraies causes sont du côté de l’Asie, et de la Chine en particulier.

Se dirige-t-on vers une guerre commerciale ?

Je crois que nous sommes en train de danser au bord du gouffre. Le commerce mondial est dans un état de tension qu’on n'a jamais connu depuis plusieurs années, c’est pourquoi il est important de remettre de l'ordre dans ce système. Il faut rendre plus efficiente cette organisation mondiale du commerce. On est incapable de se mettre d’accord par exemple, sur la pêche illégale. Cette organisation ne fonctionne pas comme elle devrait. C’est le chantier qu’Emmanuel Macron a lancé. Nous nous y attelons avec les Japonais, les Canadiens, le directeur de l’OMC. Il faut rendre de l’efficacité à cette organisation.

Faut-il changer de partenaire ?

Les États-Unis restent un partenaire. Regardez, il y a quelques semaines pour frapper les armes chimiques de Bachar Al Assad, c’était des soldats britanniques, français, américains. Il faut toujours chercher à convaincre.

L’Europe joue-t-elle sa crédibilité ?

Il y a très clairement un test pour l’Union européenne. D’ailleurs les choses sont plutôt encourageantes car l’Europe a montré son unité et sa fermeté, alors que son économie est très différente. Mais nous sommes prêts à prendre des mesures de rééquilibrage, de sauvegarde pour protéger notre industrie européenne, et donc nous allons prendre des mesures contre cela. Nous allons prendre les montants d’acier, les tonnages expédiés par les pays, nous allons en faire des moyennes et voir ce qui peut rentrer sur le marché européen pour éviter que notre industrie soit frappée. Il y a une enquête qui va prendre 9 mois, mais on peut prendre des mesures provisoires pendant 6 mois. Nous sommes prêts à répondre.

Ce climat peut-il avoir un impact sur la croissance économique en Europe alors qu’elle montre déjà des signes d’essoufflement ?

L’OCDE a produit une étude économique très intéressante et montre qu’il y a des fondamentaux plutôt solides. La croissance mondiale est là, les investissements sont là, mais il y a cette incertitude qui plane et ce n’est pas bon parce qu’il y a de l’imprévisibilité, et les chefs d’entreprises ont horreur de cela. Et donc, nous sommes à un moment historique et l’Europe doit montrer qu’elle est forte, qu’elle est la première puissance commerciale et qu’elle ne se laisse pas faire.

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