"Ce qu'on propose, c'est de remettre l'artisanat dans notre quotidien au travers d'ateliers", explique un des fondateurs de Wecandoo

Édouard Eyglunent, cofondateur de la start-up Wecandoo, qui propose des ateliers d'artisanats au grand public, était l'invité éco de franceinfo, lundi.
Article rédigé par Isabelle Raymond
Radio France
Publié
Temps de lecture : 6 min
Édouard Eyglunent, cofondateur de Wecandoo, le 13 novembre 2023. (RADIOFRANCE / FRANCEINFO)

La start-up Wecandoo offre la possibilité au grand public de s’essayer à une pratique artisanale avec des ateliers. Créée en 2016, l'entreprise fédère désormais 2 500 artisans dans toute la France. Édouard Eyglunent, cofondateur de Wecandoo, était l'invité éco de franceinfo, le lundi 13 novembre.

franceinfo : Wecandoo, expliquez-nous de quoi il s'agit en quelques mots.

Édouard Eyglunent : C'est un site internet qui permet à des particuliers ou des entreprises d'aller chez un artisan, de mettre la main à la pâte avec lui pour découvrir son savoir-faire, réaliser une création à ses côtés.

Ce sont uniquement des artisans qui proposent leurs services sur cette plateforme ?

Exactement. On sélectionne vraiment les artisans avec qui on travaille. Ce sont des professionnels qui ont au moins deux ans d'expérience, qui ont une vraie expertise et qui ouvrent leurs portes pendant quelques heures. On a une charte de sélection d'une dizaine de critères. Il faut que l'artisan soit un professionnel, donc enregistré à la chambre des métiers, que pendant l'atelier il transforme la matière, qu'il ait au moins deux ans d'expérience… Et comme ça, on a toute une liste de critères qui nous permettent de valider la qualité de son savoir-faire, mais aussi de l'expérience qui va être proposée dans un lieu qui est bien équipé, par exemple.

L'entreprise a sept ans maintenant, est-ce qu'il y a un avant et un après Covid ?

Complètement. C'est même assez fou l'effet du Covid. On aurait pu penser qu'il y aurait un impact très négatif. Evidemment pendant les confinements, on a eu des grosses baisses de réservations. Mais en fait, les mentalités ont énormément évolué pendant le Covid et avec ce côté "j'ai envie de savoir d'où viennent les produits que j'achète". Beaucoup de gens essaient aussi de faire leur pain, ont fabriqué leur savon, etc. Ça a également déclenché des comportements nouveaux, l'envie de se reconnecter au "faire".

Les gens se sont mis à des activités manuelles, à la cuisine, au bricolage et c'est resté ?

Exactement. On l'a vu dans les phases de déconfinement, avec d'énormes pics de réservations. Et à la fin du Covid, tout simplement, on remarquait que de plus en plus de gens étaient sensibles au "faire". La tendance se confirme, mais ce sont des choses qui, historiquement, étaient omniprésentes dans nos vies. Lorsqu'on allait à l'école, avant, on faisait des métiers manuels, ces choses qui ont un peu disparu de notre quotidien parce que les services ont pris le pas, tout simplement. Et nous, ce qu'on propose, c'est de remettre l'artisanat dans notre quotidien au travers des ateliers.

Est-ce que c'est un truc de bobos parisiens ou est-ce que ça marche ailleurs en France ?

Ça marche partout en France. On crée des formats avec les ateliers, donc notre métier, c'est d'aller rencontrer les artisans, d'imaginer avec eux le meilleur format qu'on puisse faire. Et on crée des formats pour les plus jeunes. Donc ça commence à partir de six ans, mais c'est aussi bien pour des personnes qui ont plus de temps, par exemple à la retraite. Il y a également des bobos parisiens, évidemment, mais vraiment, on touche tous les publics et toutes les géographies. On a beaucoup d'ateliers, évidemment dans les grandes, dans les grandes agglomérations. Mais on a aussi des ateliers complètement hors des villes.

Avez-vous un client type ?

Il est plutôt féminin. Je dirais qu'il y a 60-70% de femmes, c'est une grosse partie. Et ce sont, aussi, des clients très sensibles au mieux consommer.

Quel est le podium des ateliers les plus prisés des Français ?

La poterie plaît énormément. C'est marrant le rapport à la poterie a un peu évolué. Il y a toujours eu ce côté 'cours de poterie qu'on faisait toutes les semaines', etc. Et maintenant, ça se généralise beaucoup plus. Ensuite, il y a la cosmétique qui plaît énormément et ensuite les métiers de bouche, au sens large, donc aussi bien des choses à boire que des choses à manger.

Comment est-ce que vous vous rémunérez chez Wecandoo ?

On fonctionne un peu comme une plateforme, donc c'est un modèle assez classique. On reverse 80% aux artisans et 20% que l'on garde pour nous, pour faire la mise en relation, pour faire tout ce qu'on fait au final : la communication, le fait de trouver les artisans etc.

Est-ce que le modèle économique est viable ou est-ce qu'aujourd'hui vous êtes dans une phase de développement ?

On est dans une phase de développement et toutes nos géographies, que l'on appelle "matures", des géographies qui ont plus de deux ans, sont rentables. Mais par contre, lorsqu'on ouvre une nouvelle ville, évidemment, il y a une phase d'investissement pour conquérir le marché, se faire connaître aussi bien auprès des artisans que des clients.

Est-ce que vous avez l'impression que les gens voient différemment les artisans aujourd'hui, notamment grâce à votre plateforme ?

Je pense qu'on participe à un mouvement d'ensemble, que les gens souhaitent se rapprocher du "mieux fait" et du "fait plus proche", plus proche de chez soi. Et oui, les artisans, on leur permet de développer une nouvelle offre. En fait, historiquement, les artisans font plutôt de la production, que ce soit en série ou alors sur mesure. Et on leur permet d'ouvrir une gamme de services qui leur permet de toucher des clients différemment. Parce que là, ils vont passer deux ou trois heures avec un client. Il y a une relation de proximité qui va être faite et on fait un rapprochement avec sa clientèle.

Les artisans qui viennent vers vous, ou que vous allez chercher, sont plutôt jeunes et plutôt connectés ?

Mais ce n'est pas non plus la majorité absolue. On a aussi des vieux de la vieille qui sont là depuis très longtemps. La transmission, c'est vraiment dans l'ADN de l'artisanat. C'est quelque chose qui a toujours été le cas de l'apprentissage. C'est omniprésent dans l'artisanat et ce qu'on propose ce sont des "nano-apprentissages", des tout petits apprentissages.

Vous êtes en train de vous développer à l'international ?

Oui, exactement. On a ouvert cette année dans trois nouveaux pays : en Belgique, aux Pays-Bas et en Angleterre. Ce qui nous permet d'aller toucher des nouveaux publics, avec tous les challenges qui vont avec. On commence à adopter une nouvelle géographie, une nouvelle langue. Quelles sont les problématiques des artisans dans ces pays-là ? Quelles sont les attentes des clients aussi ? La maturité des marchés est très différente à chaque fois et ça, c'est un sacré challenge.

Ce sont les mêmes ateliers qui sont proposés ?

On essaie de s'adapter à chaque fois. Évidemment, on connaît les ateliers qui vont fonctionner. Donc on teste, on lance des premiers ateliers, on voit un petit peu comment ça mord. Et en fonction de ça, on s'adapte à chaque fois. Aujourd'hui, Je dirais qu'en Angleterre, ils sont un peu plus farfelus, on a des harnais en cuir, on a plein de choses comme ça. Le brassage fonctionne très bien aussi.

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