Henri Guaino et "l'inhumanité" du Front national
Ce
texte va sans doute faire date et sans doute exposer son auteur à la critique. "De
quoi le Front national est-il le nom ", s'interroge Henri Guaino, en guise
de préambule. Pour le député UMP des Yvelines, le FN est trop populiste et trop
poujadiste pour être le nouveau nom de l'extrême-droite et se confondre avec
des mouvements nationalistes, antisémites et antirépublicains tels que l'Action
Française ou la Cagoule. Le Front national ne serait pas plus un fascisme, sous
prétexte qu'il pratique le culte du chef et veut dépasser le clivage
gauche-droite en posant la question nationale. "Sinon le gaullisme en
serait une variante" , poursuit l'ancien conseiller de Nicolas Sarkozy, qui
prend le contrepied des habituelles critiques formulées à l'encontre du parti
de Marine le Pen, traité à gauche comme à droite de raciste et xénophobe, et
donc d'extrême-droite, appellation que récuse d'ailleurs la présidente du FN.
Henri Guaino fait remarquer qu'à ce jour personne n'en a demandé l'interdiction
et enfonce le clou en assénant sans détour : "Madame Le Pen n'est
pas le général de Gaulle, même si elle pousse parfois le ridicule jusqu'à le
faire parler. Mais ce n'est pas non plus Mussolini, encore moins Hitler" .
C'est une tentative de
rapprochement avec le FN, une sorte de main tendue ?
Cela
y ressemblerait à première vue, mais en réalité, pas le moins du monde. Parce
que l'auteur de ce texte détonnant nous fait part dans un même temps de cet
"indicible malaise" qu'il dit éprouver, comme tant d'autres,
vis-à-vis du FN, un sentiment qui l'empêchera toujours de pactiser avec lui.
Et d'où viendrait ce
malaise ?
De
l'ADN de ce parti avec lequel il n'y a pas de débat possible, seulement des affrontements, analyse
Guaino. Le FN, qui a toujours besoin d'ennemis, serait incapable de prendre en
compte ce qui est profondément humain, dans la vie comme dans la politique. L'idéal
gaulliste était le rassemblement, le ressort du Front National est toujours la
division, Or, on ne discute pas et on ne gouverne pas avec la colère, constate le
député des Yvelines, qui reconnaît dans un même temps que l'on peut être en
désaccord avec le FN et les solutions populistes et déraisonnables qu'il prône,
mais qu'on ne peut pas lui contester le droit de tenter de récupérer ce que la
gauche et la droite ont laissé à l'abandon depuis trop longtemps. "Une chose est sûre:
Front National n'est pas le nom de la fraternité" , conclut
Henri Guaino, qui ne veut plus rejeter Marine le Pen hors du champ de la
démocratie, mais ferme définitivement la porte à toute alliance.
Ce n'est pas la position
officielle de l'UMP ?
Non.
Mais ce texte prend toute sa dimension dans la foulée de la polémique autour du
rapport sur l'intégration, qui constitue un formidable cadeau de Noël, un de
plus, pour Marine le Pen. Majorité et opposition se trompent quand elles affrontent encore et
toujours le FN sur le terrain du racisme et du fascisme, alors que la
sociologie de cette formation politique a évolué. Ces mots sont devenus
inopérants et vains, et ne font que renforcer un parti vers lequel se tournent
toutes celles et tous ceux qui s'estiment laissés au bord du chemin par trente
années d'échec des politiques publiques. Henri Guaino a décidé d'attaquer le
Front National sur son inhumanité: l'argument, que certains vont sans doute juger
irresponsable, a le mérite de susciter le débat et donner un coup de projecteur
sur un parti dont la poussée semble irrésistible, parce qu'il devrait
massivement bénéficier d'un vote contestataire trop longtemps mésestimé et
méprisé.
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