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Hollande : la gauche à reculons

C'était couru d'avance : le programme très social-démocrate de François Hollande donne des sueurs froides à gauche.
Article rédigé par Jean-François Achilli
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3min
  (©)

"Son
vote, il l'aura quand Ayrault engagera la responsabilité du gouvernement. Ce
qui n'empêchera pas les uns et les autres de s'exprimer librement
". Voilà
en une formule comment un élu socialiste résume la situation : une partie
du PS a déjà la gueule de bois depuis la conférence de presse présidentielle.

La cacophonie dans les rangs de la gauche qui pollue l'action gouvernementale
depuis le début du quinquennat n'est pas près de s'arrêter en 2014. Trois
chapelles se sont dessinées au bureau national du Parti socialiste mercredi soir, rue de Solferino, selon un témoin avisé : tout d'abord ceux qui sont dans la ligne du
parti, ils soutiennent le président qui désormais barre au centre. François
Hollande peut compter sur cette majorité qui tient toujours, mais pour combien
de temps. Une deuxième chapelle, celle des aubrystes, circonspecte, est d'accord
avec les orientations du chef de l'Etat, mais exige de réelles contreparties
pour les 30 milliards concédés aux patrons.

Le troisième groupe, l'aile gauche
du parti, associée aux amis de Benoit Hamon, montre les dents : "Le
président a été précis sur les cadeaux aux entreprises, mais il est resté flou
sur ce qui reviendra aux salariés
", se plaint Emmanuel Maurel. Le chef de
file du courant socialiste Maintenant la
gauche
ne comprend pas les chiffres alignés par François Hollande, et s'interroge : "
trouve-t-on tout cet argent, il ne le sait pas lui-même
". La gauche du PS
annonce déjà un soutien à reculons.

Et puis il y a hors de la majorité, le Front de
gauche, avec Mélenchon premier opposant.

A l'Est, rien de nouveau. Jean-Luc
Mélenchon décroche la palme de la critique qui flingue, en balançant qu'"on
n'a jamais vu ça depuis Guy Mollet"
. Le leader du Front de Gauche fait
référence à l'ancien président du Conseil, sous la IVème République, dont la
particularité était de tenir des discours super musclés à gauche, et une fois
au pouvoir, de gouverner de manière très modérée, en passant des compromis avec
la droite. Vous transposez le mollétisme aujourd'hui : cela donne le
Bourget, quand le candidat Hollande désigne son adversaire, la finance. Et une
fois élu, le président Hollande se fait le chantre de l'entreprise, qu'il veut
soulager de ses charges, en dialoguant directement avec Pierre Gattaz, le
patron du Medef, le chantre également de la politique de l'offre, de la baisse des dépenses publiques, ou comment trouver 53 milliards
alors que nous sommes déjà à l'os. La gauche de la gauche s'étrangle. Pierre
Laurent, le leader du PCF, dénonce "un pacte d'irresponsabilité
sociale".

Elle va se mobiliser ?

Ce sera à la marge, pour
faire du bruit. Que peuvent donc faire les élus communistes, mis à part ruer
dans les brancards, alors qu'ils ont besoin des nombreux accords passés avec le
PS pour sauver leurs têtes aux municipales ? Les prochaines élections vont
sans doute atténuer le grand débat à gauche, estime un responsable socialiste, mais
il pourrait reprendre de plus belle au printemps. Le chef de l'Etat a certes
semé le trouble à droite avec des propositions que saluent des personnalités
telles que François Fillon, Jean-Pierre Raffarin ou Bruno le Maire. Mais François
Hollande, soupçonné dans son camp de faire les yeux doux aux centristes, n'aura
le soutien inconditionnel de sa majorité que si les premiers résultats de sa
politique se font rapidement sentir. C'est vrai que le quinquennat plus que
jamais va se jouer en 2014...

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