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Marseille, Brignoles, l'affrontement des deux France

A Marseille comme à Brignoles, ce sont deux France qui se font face. 
Article rédigé par Jean-François Achilli
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3min
  (©)

Nous sommes
tout d'abord restés rivés devant le spectacle offert hier soir par les chaînes télé d'information
continue, en éditions spéciales, un peu comme si nous étions au soir de
l'élection présidentielle. Il faut rappeler qu'à Marseille, il ne s'agissait que
du premier tour de la primaire socialiste, et à Brignoles, d'une élection cantonale
partielle. Tout ça pour dire qu'il
y avait derrière ce double événement plus que relatif, une symbolique très
forte : l'affrontement, à 70 km de distance, si vous passez par Aubagne,
de deux France.

La première est celle qui
veut se protéger, qui clame " on est chez nous ", et qui a fait élire
à Brignoles, avec une confortable majorité, un candidat Front national Laurent
Lopez, face à sa rivale UMP. C'est la France qui a la hantise de l'immigration,
qui se méfie du métissage, et qui cherche le salut dans ses racines chrétiennes
et ses traditions. La deuxième France, plus urbaine, plurielle et
multiculturelle, est celle qui a porté la sénatrice Samia Ghali en tête de la
primaire socialiste marseillaise.

Un résultat controversé à Marseille.

Il a été reproché à la gagnante
de ce premier tour d'avoir organisé du co-voiturage, une pratique en réalité très
courante dans n'importe quelle élection. Un responsable socialiste national
souligne que Samia Ghali n'a pas seulement réalisé des scores dans les
quartiers nord où elle est bien implantée, mais également dans le centre ville
plus bourgeois. Elle veut incarner une France issue de l'immigration, ouverte
sur la mondialisation, qui regarde sa diversité en face, et la vit comme un
atout, et non plus comme une menace intérieure. Cette candidate est en phase
avec la sociologie de la grande capitale méditerranéenne qu'est Marseille.

En quoi ces deux France que vous décrivez
s'opposent ?

Jean-Christophe Cambadélis,
député de Paris et responsable des relations internationales au PS, souligne
deux faits marquants qui illustrent, selon lui, 
cette ligne de fracture nationale : vous avez une France qui d'un
côté refuse l'afflux massif de roms, et qui plébiscite le réalisme et la
fermeté de rigueur d'un Manuel Valls, décrié par une partie de la gauche, mais
soucieux de préserver l'ordre public. Et puis une autre France qui fait du
drame de Lampedusa, et de sa réplique maltaise, un devoir d'humanité. Les deux
ne sont d'ailleurs pas forcement en contradiction. Ni même irréconciliables. Elles
peuvent se rejoindre, si elles se parlent.

Sur un plan électoral, que nous disent ces deux
scrutins ?

Tout d'abord, le Front national peut désormais s'imposer dans une élection de manière classique, sans
commettre de hold-up. Le PS et l'UMP doivent réviser leurs logiciels. Ensuite,
la signature gouvernementale devient un handicap. En témoigne l'échec de la
ministre Marie-Arlette Carlotti, arrivée troisième, disqualifiée. Reste une
affiche à Marseille, qui aurait de la gueule, et qui concurrencerait les
municipales parisiennes en mars prochain: Samia Ghali face à Jean-Claude Gaudin.
Mais la sénatrice doit l'emporter dimanche prochain, et c'est n'est pas gagné,
sur Patrick Mennucci. Le député élu du centre ville, est lui aussi un enfant
des quartiers nord. Ce sera dans la cité phocéenne un match entre ces deux France
qui devront bien se réconcilier un jour.

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