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Comment les indiennes, ces tissus imprimés venus d'Inde, ruinèrent l'industrie française

Tous les week-ends de cet été, franceinfo vous entraîne à la découverte de "La France secrète". Des anecdotes, des histoires cachées ou mystérieuses, des personnalités étonnantes qui ont marqué ou transformé un lieu. Par Philippe Gloaguen, directeur du Guide du Routard.
Article rédigé par franceinfo - Philippe Gloaguen
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Les tissus colorés imprimés en Inde ont apporté en France la terrible peste de 1720. (JOHN DOWLAND / MAXPPP)

Savez-vous pourquoi les indiennes provoquèrent une grande catastrophe dans l'histoire industrielle française ? Attention, on ne parle pas de la femme de l'Indien, mais d'un tissu imprimé en Inde et importé en Europe dès le 16° siècle depuis les comptoirs des Indes. Car l'histoire de l'impression textile commence en Inde. Depuis 2 000 ans avant notre ère, les artisans indiens avaient compris le secret de l'impression sur tissu. Ils avaient découvert les mordants, ces sels spécifiques qui avaient la propriété de fixer les couleurs sur les teintures.

La peste et la faillite

Le support utilisé était le coton, bien moins cher que la soie portée surtout par l'aristocratie, et qui démangeait moins que le lin breton (n'oublions pas qu'au Moyen Âge, les étoffes étaient tellement chères que les gens modestes rachetaient les vêtements des morts). Les indiennes aux couleurs vives, où dominent le rouge de la garance et le bleu de l'indigo, furent d'abord importées par les Portugais, puis par les Compagnies des Indes.

En 1869, Colbert promulgua un édit qui érigea Marseille en port franc, lui offrant ainsi le monopole du commerce maritime vers et depuis le Levant et les Indes. Très vite, la ville connut une incroyable prospérité mais aussi un terrible sort puisque les cargaisons d'indiennes introduisirent en France, par le port de Marseille, la terrible peste de 1720. Un malheur n'arrivant jamais seul, le succès des indiennes affaiblit aussi les manufactures royales, les soieries de Lyon, et les fabricants de lin breton dont beaucoup firent faillite. L'interdiction des indiennes fut décrétée par Louvois en 1686 mais le mal était fait.

Renouveau à Saint-Tropez

Dès 1746, des fabricants d'indiennes s'étaient installés à Mulhouse avec succès. Cette ville indépendante n'appartenait pas au royaume de France et était sous protection suisse. Là, la fabrication des indiennes pouvait fonctionner à plein régime et sans contrainte. En plus, Mulhouse étant une ville protestante, fabriquer des indiennes marquait une forme d'opposition au pouvoir royal.

Aujourd'hui, les indiennes existent toujours. Les tissus provençaux en sont les dignes héritiers. Une fabrique célèbre s'installa à Tarascon. Un nouveau succès survient en 1947 pour ces imprimés, avec l'engouement de Saint-Tropez, où les indiennes furent à la mode.

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