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Fraudes alimentaires : la génétique à la rescousse pour renforcer les contrôles

L'ONG Foodwatch révèle dans une enquête l'ampleur des fraudes alimentaires : des huiles d'olive sans olives, du porc à la place de crevettes, des produits bio aux pesticides interdits... Pourtant, des techniques d'analyse permettent de mieux lutter contre ces fraudes.

Article rédigé par Anne-Laure Barral
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3min
Des barquettes de poissons dans un supermarché. Photo d'illustration. (CORTIER DANN / MAXPPP)

Les fraudes alimentaires se multiplient en Europe et en France, assure une enquête de l'ONG Foodwatch, qui insiste sur l'insuffisance des contrôles. Pour y répondre, l'analyse ADN est une arme anti-fraude de plus en plus performante. Une technique de code barre génétique mise au point pour les origines des produits halieutiques par un chercheur canadien, Paul Hebert de l’université de Guelph en Ontario, au début des années 2000. Un peu à la façon de l’application Yuka qui en scannant votre produit, vous décrypte l’étiquette et vous dit ce qu’il y a dedans. Cette fois il s'agit de passer un petit échantillon de produit dans une machine de séquençage ADN et l’analyse vous dit ce qu’il contient.    

Si l'analyse ADN existe depuis longtemps, ce qui a progressé c’est l’immense bibliothèque de code ADN que l’on a aujourd’hui. Avant, pour savoir si le poisson dans votre assiette était bien de la morue par exemple, vous deviez chercher le code génétique de la morue dans votre morceau. Là, il suffit de prendre l'échantillon et la machine va chercher dans sa bibliothèque les indices génétiques de tout ce qu'il contient. Elle sort ensuite une liste de molécules parfois surprenantes, elle peut même préciser la zone géographique de provenance du produit. C’est comme ça que l’on a découvert qu'une tranche de jambon pouvait être faite à partir de trois cochons différents, ou encore la présence d'un pesticide interdit dans un produit étiqueté bio.

Aujourd’hui, les producteurs vertueux demandent à ce que cette technique soit plus utilisée par les services de répression des fraudes de leurs pays pour avoir une meilleure traçabilité et éviter les contrefaçons. Les associations de consommateurs sont également en faveur de ces techniques, également pour des questions de santé publique.   

40% de poissons mal étiquetés, selon une enquête du Guardian

Dans le secteur de la pêche, des professionnels sont particulièrement intéressés. Ils demandent une traçabilité du bateau à l’assiette. Il faut dire qu'avec les bateaux-usines qui transforment et congèlent directement les poissons en pleine mer, les erreurs sur la marchandise sont légion. Ce mois-ci, The Guardian a révélé dans une enquête faite sur 9 000 échantillons de produits de la mer, pris dans des restaurants, chez des grossistes et des supermarchés d’une trentaine de pays, que 40% d'entre eux étaient mal étiquetés. Plus surprenant encore, les analyses ont montré la présence de viande de porc dans des beignets de crevettes à Singapour, par exemple.

Pour les chercheurs qui ont participé à cette vaste étude, ce sont rarement des poissons nobles qui sont vendus au prix de produits bons marchés. C'est plutôt du cabillaud au prix du bar. Même s'ils veut bien admettre qu'il y ait des erreurs non intentionnelles, ce côté systématique tend à montrer une fraude financière. Rashid Sumaila, économiste à l’université de Colombie britannique, au Canada, estime même que cette fraude aux poissons représente entre 20 et 40 milliards d’euros par an.

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