De l'ordinateur personnel aux centres de données, comment réduire notre empreinte carbone numérique ?
La consommation énergétique des centres de données et des réseaux devrait augmenter de 75% d'ici 2040. Une prévision alarmante sur laquelle s'appuie une proposition de loi visant à réduire l'empreinte environnementale du numérique en France, dont l'examen en première lecture débute devant le Sénat.
Le Sénat se penche à partir de mardi 12 janvier sur une proposition de loi visant à réduire l'empreinte carbone du numérique en France. Il y a urgence. D'autant que l'arrivée de la 5G et ses promesses de débit dix fois plus rapide inquiètent le Haut Conseil pour le Climat pour qui "la 5G est susceptible d'augmenter significativement" l'impact carbone du secteur numérique, alors qu'il pèse déjà lourd, rappelle Patrick Chaize, sénateur LR de l'Ain et auteur de cette proposition de loi.
"Aujourd'hui, le numérique pèse pour 2% de notre empreinte environnementale globale. Si on ne fait rien, à échéance 2040, on passera de 2 à 7%."
Patrick Chaize, sénateur LR de l'Ainà franceinfo
"Quand on sait qu'à l'heure actuelle le trafic aérien est de 4,7% (avant le Covid), vous imaginez qu'en 2040 le numérique pèse sur notre empreinte environnementale 7% ?! Ce serait énorme et inacceptable", lance-t-il.
L'un des points importants du texte défendu par Patrick Chaize, c'est la lutte contre l'obsolence programmée des terminaux numériques, afin de prolonger la vie de votre téléphone portable par exemple. Une mesure parmi d'autres consiste ainsi à faire passer de 2 à 5 ans la durée minimale pendant laquelle le consommateur peut recevoir les mises à jour nécessaires au bon fonctionnement de l'appareil.
Limiter son équipement numérique à ses besoins
Mais consommateurs et utilisateurs peuvent aussi limiter leur empreinte carbone quand ils utilisent leurs appareils numériques. C'est ce qu'explique Lise Breteau, avocate spécialisée dans les nouvelles technologie et membre du collectif Green It, qui milite pour réduire la pollution numérique. Elle nous accueille chez elle, devant son ordinateur portable, le seul de la maison. "J'ai un ordinateur et un smartphone, précise-t-elle. Je pourrais avoir un ordinateur fixe, je pourrais avoir une montre connectée, peut-être même un sèche-cheveux ou une bouilloire connectée, mais j'ai fait le choix de rester sobre et de coller mon équipement à mes vrais besoins."
"80% des impacts environnementaux du numérique proviennent de la fabrication des équipements."
Lise Breteau, membre du collectif Green Ità franceinfo
Et de lister quelques bonnes pratiques pour réduire cet impact, en commençant par le bon usage du courrier électronique : "Évitez d'envoyer quatre mails à la suite à la même personne, essayez de les concentrer en un seul, essayez de mettre des liens hypertextes plutôt que des pièces jointes et de ne pas mettre toute la Terre en copie quand on envoie un mail, ce qu'on a tous un peu tendance à faire, notamment au bureau", conseille Lise Breteau, qui rappelle que "l'impact principal du mail, bien souvent ça va être son transport, beaucoup plus que son stockage."
Un autre geste pour réduire son empreinte numérique à la maison consiste à ne pas laisser ses appareils en veille. "Ma box est reliée à une multiprise avec un interrupteur, ce qui permet de l'éteindre le soir quand je vais me coucher, explique Lise Breteau. L'idée c'est de ne pas la laisser en veille toute la nuit. On peut faire une analogie avec un robinet qu'on laisserait couler toute la nuit."
De l'eau pour le refroidissement des serveurs
Autre cible de cette proposition de loi : les "data-centers", en français, les centres de données. Le texte fixe des objectifs sur plusieurs années pour limiter l'empreinte environnementale de ces centres, gourmands en énergie et qui émettent de la chaleur. Si les objectifs ne sont pas atteints, pas d'avantage fiscal.
L'entreprise française OVHcloud, avec 31 centres de données dans le monde, est l'un des leaders européens du secteur. François Stérin, directeur industriel, affirme avoir pris les devants. "Depuis 2003, on utilise le refroidissement à l'eau de nos serveurs, ça nous permet vraiment de réduire notre facture et aussi notre consommation d'électricité. On utilise l'eau en circuit fermé, c'est-à-dire qu'on peut l'utiliser plusieurs fois et on en consomme assez peu en fait. Pour vous donner un ordre de grandeur, pour refroidir un serveur pendant dix heures, on utilise l'équivalent d'un verre d'eau, explique-t-il. Les enjeux sont là. Si on veut vraiment atteindre les objectifs de l'accord de Paris, il ne faut pas attendre 5 ou 10 ans, il faut y aller maintenant."
La proposition de loi présentée mardi au Sénat s'appuie entre autres sur un chiffre : si rien n'est fait, la consommation énergétique des centres de données et des réseaux devrait augmenter de 75% d'ici 2040.
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