"De la chicane mais pas de bagarre" : des députés et militants de gauche, déçus par les listes séparées aux européennes, cherchent à préserver l'union

Raphaël Glucksman pour les socialistes, Marie Toussaint pour les écologistes, Manon Aubry pour les insoumis, Léon Deffontaines pour les communistes : quatre listes de gauche se préparent à faire campagne pour les européennes. Sur le terrain, certains députés et militants Nupes, veulent croire à l'union.
Article rédigé par Victoria Koussa
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 5min
A Beauvais, les militants Nupes continuent les tractations avant de faire campagne séparément pour les élections européennes, février 2024. (VICTORIA KOUSSA / FRANCEINFO)

Faire vivre l'union à gauche malgré les divisions. En vue de la présidentielle de 2027, des militants et élus tiennent ce qui reste de la Nupes à bout de bras, pour tenter de la ranimer, de la faire vivre malgré les listes séparées aux européennes.

À Beauvais, dans l'Oise, des militants inséparables vont devoir faire campagne chacun de leur côté jusqu'en juin. Ils se charrient déjà. En plein tractage pour leur combat local contre le doublement du trafic aérien, l'un d'eux, écologiste, nargue les autres en leur mettant sous le nez le portrait de sa candidate aux européennes : "Là, j'ai mon côté Europe Ecologie-Les Verts, c'est le tract de Marie Toussaint que je distribuerai très prochainement."

"Nous, sur le terrain, on est unis"

Les militants rient pour cacher l'amertume de devoir militer chacun de son côté, ces prochains mois, Roxane Lundy est élue Générations : "Je trouve qu'il y a une forme de déconnexion de nos états-majors parisiens qui ont fait le choix de partir chacun de leur côté. Alors que nous, sur le terrain, on est unis, on mène des batailles ensemble." Elle et son camarade insoumis, José Quillet, ont peur que des listes séparées cassent la dynamique créée par la Nupes et démoralisent les électeurs. "C'est troublant, se désole José Quillet. Ils ne comprennent pas pourquoi des gens ont signé un accord Nupes et quelques mois après cet accord-là..."

"C'est comme si on mettait un maillot de football pour jouer un match et qu'à la mi-temps on change de maillot parce qu'on n'est pas content."

José Quillet, militant LFI

à franceinfo

 

C'est aussi avec une métaphore footballistique que l'écologiste Bruno Clinckemaillie relativise : "Il va y avoir une sorte de mi-temps, de temps de repos, où on va se consacrer tous à faire gagner notre candidat pour les européennes. Et puis après, on aura plaisir à se retrouver ensemble pour les municipales. On a parfois, dans les équipes de foot, des joueurs qui jouent pour faire gagner leur club. En l’occurrence, nous, on joue pour faire gagner Beauvais au cœur, au niveau local. Et après, chaque joueur va repartir dans son pays et va aussi tenter de gagner une autre compétition. L'un n'empêche pas l'autre".

Une chose est sûre pour le militant socialiste de la bande, Maxime Loisel : ici, à Beauvais, le pacte de non-agression sera respecté. "Il y aura de la chicane, mais il n'y aura pas de bagarre, ça c'est sûr ! Moi je veux bien aller tracter le matin pour Glucksman, le midi on va bouffer ensemble et puis l'après-midi on va tracter pour les municipales, assure Maxime Loisel. Il n'y a pas de problème".

"On ne serait pas autant si on n'avait pas été Nupes"

Les députés unionistes tentent de faire vivre l'union. Ça passe par des meetings, comme dans ce théâtre parisien, où l'écologiste Julien Bayou invite ses alliés de l'Assemblée pour un débat sur la VIe République : "Pour moi il faut pouvoir dire 'Faites vos listes, allez courir l'aventure', comme disait Blum et nous, 'on garde la vieille maison de l'unité'. Il y a un espoir qui nous porte. On n'a pas le droit de se faire avoir par des stratégies qui nous mènent dans le mur".

Il faut, pour lui, entretenir les liens. Comme avec le socialiste Boris Vallaud, qui vient d'arriver : "Il y en a avec qui c'est plus compliqué. Il y a des cadres qui ne nous conviennent pas, ou plus, ou qu'on veut faire évoluer. Et puis, il y a des gens qui s'entendent bien aussi".

Loin donc des clashs entre chefs de partis, pour l'écologiste Sébastien Peytavie, il ne faut pas oublier ce logo sur les tracts de campagne : "On a été élus comme ça et je crois qu'on en a pris la mesure. On ne serait pas autant si on n'avait pas été Nupes." Ensemble sur scène, pour parler d'un sujet, une façon aussi de montrer ce que donnerait une future alliance, sans Jean-Luc Mélenchon qui fracture l'électorat de gauche, surtout depuis les attaques du Hamas. 

"Commencer par le changement de Constitution, ce n'est pas une petite affaire. Il va falloir que la société toute entière soit mobilisée, qu'on se fédère toujours plus, qu'on élargisse l'espace politique que nous représentons."

Raquel Garrido, députée LFI de Seine-Saint-Denis

à franceinfo

Mais l'unité reste fragile, menacée à l'Assemblée puis maintenant par les européennes. La communiste Elsa Faucillon en a conscience : "Il faut pouvoir montrer, pour toutes celles et tous ceux qui aspirent à cette unité, qu'elle est possible pour les européennes et que si elle ne l'est pas, elle est possible ensuite. Même si elle sera plus difficile. Il faut être lucide, notre score sera forcément plus bas pour chacune des listes". Ces unionistes vont multiplier ces moments en commun le mois prochain, et se préparent à accélérer après les européennes, avec une proposition commune qui reste encore secrète.

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