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Enquête
Covid-19 : comment Santé publique France a progressé dans la surveillance des épidémies depuis deux ans

Deux ans après l’annonce du premier confinement, franceinfo a pu assister aux travaux de Santé publique France. L’agence sanitaire a dû se réinventer pour suivre au jour le jour l’évolution du Covid-19.

Article rédigé par franceinfo, Solenne Le Hen
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 4min
Le siège de Santé publique France est installé aux portes de Paris, à Saint-Maurice, dans le Val-de-Marne. (ARTHUR NICHOLAS ORCHARD / HANS LUCAS)

Il y a deux ans jour pour jour, le 16 mars 2020Emmanuel Macron annonçait aux Français le premier confinement tandis que le coronavirus émergeait à peine. Sous la tutelle du ministère de la Santé, l’agence Santé publique France a surveillé de près l'épidémie de Covid-19 et en a publié les chiffres tous les soirs. Deux ans après, les leçons sont nombreuses. Parmi elles, l’agence en a profité pour moderniser la surveillance des maladies.

>> INFOGRAPHIE. Chiffres du Covid-19 : morts, hospitalisations, vaccins... Suivez l’évolution de l'épidémie en France et dans le monde

Quand le Covid a déferlé sur la France, le gouvernement, les journalistes, mais aussi les citoyens, ont été rapidement demandeurs de chiffres. Nombre de cas, d'hospitalisations, de décès... Santé publique France s’est chargée de faire remonter les données de tous les hôpitaux, des laboratoires de biologie du territoire en les publiant sur son site internet. Des données qui ont été ouvertes à tous, "en open data", sur la plateforme Géodes.   

On avait construit le site pour qu’il tienne à peu près 500 connexions par jour, on est monté jusqu’à 700 000. Avec le Covid, il a fallu adapter les machines pour qu’il tienne.

Yann Le Strat, responsable du site Géodes

à franceinfo

Auparavant, le site était utilisé pour recenser des maladies hivernales telles que la grippe, la bronchiolite ou la gastro-entérique. Mais "pour les pathologies hivernales, les mises à jour se faisaient toutes les semaines. Pour le Covid, il a fallu mettre à jour tous les jours. Il fallait montrer que tout ce qu’on produisait était correct, qu’on n’avait rien à cacher et qu’on était là pour aider le citoyen à être informé sur l’évolution de l’épidémie", précise Yann Le Strat.   

La façade du batiment de Santé publique France, en mars 2022. (SOLENNE LE HEN / RADIO FRANCE)

Aujourd'hui, Santé publique France publie chaque jour près de 150 indicateurs. Des indicateurs parfois très précis, comme le nombre de quadragénaires positifs la semaine dernière dans le Tarn-et-Garonne. Pour mettre à disposition ces millions de données, l'agence a dû créer des programmes informatiques, bâtir des systèmes robustes, explique Laetitia Huiart, directrice scientifique. "On est sur du quotidien 7 jours sur 7, 365 jours par an. Il y a trois ans ou quatre ans, est-ce qu’on pensait pouvoir traiter une telle volumétrie de données tous les jours ? Je n’en suis pas convaincue."

"C’est la première fois qu’on suit une épidémie en temps réel. On la suit à toutes les échelles, à l’échelle mondiale et à l’échelle ultra fine du quartier. C’est quelque chose d’absolument inédit."

Laetitia Huiart, directrice scientifique

à franceinfo

Santé publique France installé dans un grand bâtiment en bois, collé au bois de Vincennes, aux portes de Paris, fourmille de centaines d'épidémiologistes qui analysent les chiffres et les tendances de l'épidémie. Objectif : donner notamment des indications au gouvernement sur la politique sanitaire à mener. Afin de produire ces chiffres, de les faire remonter du terrain, de les consolider, il a fallu embaucher de nouveaux profils, glisse Pr Geneviève Chêne, directrice générale de Santé publique France : "Ça nécessite progressivement d’avoir un certain nombre de renforts, de compétences nouvelles, comme les data scientist qu’on a pu recruter et mobiliser pendant la crise."   

"Un rêve pour nos épidémiologistes"

Outre cette révolution de l'open data, Santé publique France a dû aussi s'améliorer dans d'autres domaines, comme la surveillance des variants par exemple. Un secteur dans lequel la France était à la traîne. Le génome des virus n’était pratiquement pas séquencé, un élément pourtant crucial pour appréhender l’apparition d’un nouveau variant capable de changer le déroulement d'une épidémie, comme a pu le faire le variant Omicron.

"Avant, on avait des systèmes mais ils n’étaient pas aussi exhaustif et en temps réel. D’ailleurs, on travaille actuellement pour essayer de pérenniser SIDEP et de l’étendre à d’autres maladies. Il pourrait être très utile pour surveiller la grippe, les hépatites, l’infection à VIH. Il y a de vrais progrès à attendre des outils qu’on a développés pendant la crise Covid."

Bruno Coignard, membre de la direction des maladies infectieuses

à franceinfo

"Aujourd'hui, 54 laboratoires font du séquençage", explique Bruno Coignard, membre de la direction des maladies infectieuses. "Ça a été compliqué au début, mais aujourd’hui la France est le troisième pays en Europe qui séquence le plus. On est mieux préparé notamment grâce à SIDEP. C’est un outil qui permet de centraliser tous les résultats des tests covid fait dans n’importe quel laboratoire sur le territoire français. C’est un rêve pour nos épidémiologistes.", sourit-il.  

A Santé publique France, on envisage à l'avenir de recenser, par exemple, les cas de cancers par commune, quartier par quartier : une initiative qui permettrait aux autorités de santé d'agir rapidement en cas d'alerte.

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