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Covid-19 : ces retraités qui enfreignent les règles pour pouvoir profiter de la vie

Ils ont 65 ans et plus et en ces temps de pandémie, ils en ont assez d'être considérés seulement comme des victimes potentielles du virus. franceinfo a rencontré des séniors qui ne veulent plus être infantilisés et mis à l'écart de la société.

Article rédigé par franceinfo - Boris Loumagne
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 4 min
Rosalie, 68 ans, participe à la marche des libertés, à Paris samedi 28 novembre 2020. (BORIS LOUMAGNE / RADIO FRANCE)

François, Rosalie, Alain, André et Martine ne sont pas des têtes brûlées. Ils ont conscience de la dangerosité de l'épidémie de Covid-19, ils savent que plus de 80% des personnes décédées sont des séniors. Mais ils refusent de mettre leur vie entre parenthèse, quitte à prendre des risques.

"Ce n'est pas parce que je suis retraitée que je vais me taire"

"Il est là, le petit bout de chou !" À près de 70 ans, François est presque aussi énergique que les enfants qui lui courent dans les pattes dans ce parc parisien. Il tient par la main Valentin, un an et demi, son petit-fils. François habite à 500 km de la capitale mais pour voir son Valentin, il n'a pas hésité à enfreindre les règles sanitaires : "J'ai trouvé une astuce. En fait, j'ai créé une micro entreprise ce qui me permet de me déplacer dans toute la France... Mais honnêtement, je ne l'ai créée que pour ça." Le septuagénaire ne supportait plus la distance entre lui et le petit de 18 mois. "Honnêtement, ce n'est pas facile, surtout à cet âge là. L'évolution est tellement rapide pour eux... De mois en mois, ils changent. J'étais un peu frustré."

François et son petit-fils Valentin dans un parc, à Paris, en novembre 2020. (BORIS LOUMAGNE / RADIO FRANCE)

C'est peut-être un discours difficile à entendre pour des professionnels de santé mais beaucoup de séniors sont prêts à prendre des risques par amour, par passion ou même par militantisme. Rosalie, 68 ans, ancienne du Mouvement de libération des femmes, participait à la marche des libertés samedi 28 novembre à Paris.Elle est également bénévole dans une association d'aide aux mineurs isolés. Son engagement, c'est son carburant : "Je respecte tout : le masque, les gestes barrières, ceux que je fréquente le font également. Donc, nous n'avons aucune raison de ne pas nous voir et encore moins de ne pas penser. Ce n'est pas parce que je suis retraitée que je vais me taire. Ce n'est pas parce qu'il y a une épidémie qu'on va devenir des moutons de Panurge. C'est une belle manif. Oui, très belle."

"On n'est pas là à étaler nos misères"

Alain et André, 74 et 77 ans, n'ont pas non plus envie d'obéir à l'injonction à s'isoler qu'implique le confinement et l'épidémie de Covid-19. Par un petit matin brumeux dans la forêt de Fontainebleau, on aperçoit leurs deux silhouettes à vélo. Ils rejoignent quelques amis vététistes pour une balade. "On se retrouve avec des gens de différentes générations, explique Alain. Il n'y a pas que des retraités et donc on n'est pas là, dans le cours de nos sorties, à étaler nos misères les uns les autres et au contraire, c'est très bon pour le moral." "J'ai une bonne condition physique, donc je vais continuer à vivre normalement, ajoute André. Bon, après à chacun de se connaître et d'appréhender le mieux pour eux".

Alain et André, 74 et 77 ans, participent à une balade à vélo en forêt de Fontainebleau (Seine-et-Marne). (BORIS LOUMAGNE / RADIOFRANCE)

En somme, ce que demandent ces retraités, c'est de ne pas mettre tous les plus de 65 ans dans le même panier. D'ailleurs, seulement 15% des séniors sont dépendants. C'est ce qu'aime rappeler Martine Gruère, 75 ans, vice-présidente de l'association Old'Up qui signifie "les vieux debout". "Il y a une image très faussée : le vieux c'est quelqu'un qui est dépendant et qui coûte de l'argent", déplore l'ancienne psychologue.

Le vieux c'est quelqu'un qui est encore capable d'engagement citoyen, de rencontres, de plaisir partagé. C'est ce que l'on promeut.

Martine Gruère, vice-présidente d'Old'Up

à franceinfo

Nous avons fait écouter à Martine Gruère un extrait de l'interview du Professeur Rémi Salomon, il y a une semaine sur franceinfo : "On coupe la bûche en deux. Papi et Mami restent dans la cuisine et nous on reste dans la salle à manger", conceillait le président de la commission médicale d'établissement de l'AP-HP. "Quelle horreur ! Les grands parents à la cuisine et les enfants à la salle à manger, mais c'est une horreur, s'insurge Martine Gruère. Ce qu'ils ne comprennent pas - et là, il y a problème avec le pouvoir médical - c'est que les relations sont au moins aussi importantes, sinon plus."

On n'est pas juste des êtres avec un corps qui risque d'être malade. Il y a un vrai scandale de ce pouvoir médical qui est excessif et qui nous ampute de notre être.

Martine Gruère, vice-présidente de l'association Old'Up

à franceinfo

"On est traités comme des objets à soigner et non comme des sujets entiers avec ce besoin d'être en relation avec tous et de partager tous les événements, et en particulier Noël, avec plaisir. C'est scandaleux", insiste Martine Gruère.

Martine Gruère, 75 ans, vice-présidente de l'association Old'Up, en novembre 2020. (BORIS LOUMAGNE / RADIO FRANCE)

Et si l'on comprend bien la vice-présidente de l'association Old'Up, vous savez ce qu'il vous reste à offrir aux séniors pour Noël : moins de commisération et plus de considération.

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