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Covid-19 : les ratés du programme Covax vus depuis la Suisse, l'Afrique du Sud et l'Inde

Dans le club des correspondants, franceinfo passe les frontières pour voir ce qui se passe ailleurs dans le monde. Aujourd'hui direction, la Suisse, l'Afrique du Sud et l'Inde pour évoquer le système Covax, visant à fournir des vaccins contre le Covid-19 à tous les pays, quel que soit leur niveau de revenu.

Article rédigé par franceinfo - Jérémie Lanche; Romain Chanson; Sébastien Farcis
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 6min
Une livraison de doses de vaccins Janssen données par le mécanisme Covax à, El Alto, en Bolivie, le 11 juillet 2021. (AIZAR RALDES / AFP)

En france la barre des 50 millions de primo-vaccinés contre le Covid-19 a été franchie vendredi 17 septembre. Tous les pays ne sont pas égaux face aux vaccins. Si les pays riches multiplient les commandes, d'autres doivent compter sur la solidarité et le programme Covax, une collaboration pour un accès mondial et équitable aux vaccins contre le Covid-19. Des déclarations d'intention qui ne sont malheureusement pas toujours suivies dans les faits. Tour d'horizon. 

En suisse, l'OMS prêche dans le vide

Le système Covax est piloté assez logiquement depuis Genève, puisque c'est là que se trouve le siège de l'Alliance du vaccin – GAVI – et de l'Organisation mondaile de la santé. L'OMS met en garde, presque chaque jour depuis le début de la vaccination, contre les dangers du nationalisme vaccinal. L'OMS prêche dans le vide la plupart du temps. Son patron, le Dr Tedros Ghebreyesus, est désormais l'une des figures les plus entendues dans la pandémie. Mais entendu ne veut pas dire écouté. La preuve. C'est qu'aucune de ses recommandations n'est suivie dans les faits. Quand le Dr Tedros demande aux pays riches de ne pas passer de commandes directement auprès des fabricants mais de passer par Covax, ces États multiplient les achats en bilatéral. Encore aujourd'hui. Quand il demande à ces mêmes pays de lever les restrictions à l'exportation des matières premières ou de mettre fin aux brevets sur les vaccins, là aussi, ça ne marche pas. Le sujet est bloqué à l'Organisation mondiale du commerce depuis des mois. Et puis tout récemment, quand le Dr Tedros demande l'instauration d'un moratoire sur les 3e doses, tant que le reste du monde n'est pas vacciné, là encore, c'est tout l'inverse qui se produit. Avec des campagnes de rappel qui se lancent un peu partout en ce moment.

Les pays riches rivalisent d'annonces sur les dons massifs qu'ils ont fait à Covax et aux États à faibles revenus. Le G7 a par exemple promis 1 milliard de doses, en juin dernier. Mais ce serait oublier qu'il y a toujours une différence entre des promesses et des livraisons. Prenez les États-Unis par exemple. De loin le pays le plus généreux en la matière. Et bien sur les quelques 600 millions de doses promises par Washington, seules 140 millions ont été livrées. C'est encore plus gênant pour l'Union européenne qui n'a expédié que 8% des vaccins qu'elle a promis. Le Canada, qui a de quoi vacciner près de 4 fois sa population n'a lui encore rien envoyé. Conséquence : Covax a revu ses ambitions à la baisse. Et espère livrer au maximum 1 milliard 400 millions de doses d'ici à décembre. Loin des 2 milliards espérées.

En Afrique du Sud, désormais suffisament de doses pour vacciner la population 

Le président sud-africain Cyril Ramaphosa est invité à prendre la parole lors du sommet mondial sur le Covid-19 mercredi 22 septembre. Après avoir souffert des lacunes du système Covax, l'Afrique du Sud sort enfin la tête de l'eau. Le pays a suffisamment de doses pour vacciner sa population. 8 millions d'adultes sont complètement vaccinés. Mieux encore, l'Afrique du Sud produit les précieux vaccins. L'Afrique du Sud a ouvert la voie à l'indépendance vaccinale sur le continent africain. Après avoir délaissé son industrie pharmaceutique dans les années 2000, l'Afrique du Sud relance sa production vaccinale. On y assemble et met en flacons, les vaccins Janssen à destination exclusive du continent africain. Idem pour Pfizer qui s'est associé avec un autre laboratoire Sud-africain et envisage de lancer la production l'année prochaine. En attendant d'autres producteurs et surtout un vaccin 100% africain puisqu'aujourd'hui la technologie - on pourrait dire la recette des vaccins - n'est pas partagée par les fabricants. Les sous-traitants sud-africains se contentent d'assembler et de conditionner ces vaccins.

 L'Afrique du Sud et l'Inde se battent depuis bientôt un an pour d'obtenir le partage de la recette des vaccins, pour pouvoir les produire n'importe où. Sans succès pour le moment, mais une alternative a été trouvée. Sans attendre les résultats de ce bras de fer, l'Organisation mondiale de la santé a proposé un début de solution. L'OMS s'est associée avec une start-up sud-africaine pour l'aider à élaborer son propre vaccin à ARN messager. Une fois la technologie mise au point, elle pourra être partagée avec les laboratoires du monde entier. Une manière de contourner la logique des brevets qui verrouille l'accès à la recette des vaccins. Les premières doses 100% sud-africaines pourraient être disponibles en 2023.

En Inde, reprise des exportations de vaccins contre le Covid-19 avant la fin de l'année 

Cette annonce de reprise des exportations de vaccins contre le Covid-19 dans les 3 mois qui viennent a été accueillie comme un soulagement. Le pays est l’un des plus grands producteurs de ces vaccins au monde, et devait être l’un des plus importants contributeurs au programme Covax. Le ministère de la Santé avance une date et parle du dernier trimestre 2021, soit entre octobre et décembre. L’annonce est faite cette semaine, pour permettre à l’Inde de sauver la face pendant l’assemblée générale de l’ONU. Il y a un an, New Delhi s’était en effet targuée à cette même tribune de pouvoir sauver le monde grâce à son énorme usine de production de vaccins, mais cette diplomatie du vaccin a partiellement échoué. Fin avril dernier, l’inde a soudainement arrêté l’exportation de doses afin de les administrer à sa propre population, frappée de plein fouet par le variant Delta. Jusqu’à présent, l’Inde n’a envoyé que 66 millions de doses à l’étranger, dont un tiers en faveur du programme Covax. 

L’Inde n’a pas encore avancé de chiffres sur les doses qu’elle fournira au programme. Les autorités assurent qu’elles assumeront leurs responsabilités envers le systèmeCovax, mais maintiennent aussi que leur priorité reste de vacciner leur propre population. L’Inde a beau avoir administré 800 millions de doses, seulement 1/4 de la population est complètement vaccinée et il faudra encore deux mois avant que tous les adultes reçoivent au moins une dose.

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