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Glyphosate : Comment est-il utilisé hors de l'UE ?

Alors que la Commission européenne a annoncé, jeudi 16 novembre, le renouvellement de l'autorisation du glyphosate jusqu'en 2033, aux États-Unis, Monsanto et Bayer enchaînent les procès. Le Vietnam a quant à lui totalement interdit l'herbicide depuis 2019.
Article rédigé par franceinfo - Carol Isoux, Loïg Loury
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 5min
Le Roundup, le désherbant phare de Monsanto et Bayer. (MOURAD ALLILI / MAXPPP)

Le Vietnam a totalement interdit en 2019 toute importation d’herbicide à base de glyphosate. La décision avait alors été fortement critiquée par les États-Unis et leur secrétaire d'État à l'agriculture de l'époque Sonny Perdue. Il prédisait un impact dévastateur sur l’agriculture mondiale et sur la capacité des agriculteurs à nourrir la planète. Derrière ces déclarations, il y avait la crainte que d’autres pays de la zone emboîtent le pas au Vietnam et interdisent la substance. Le marché asiatique du glyphosate est, en effet, estimé à quatre milliards de dollars par an.

La décision du Vietnam d'interdire le glyphosate a été fortement influencée par l'usage de l'agent Orange, un herbicide commercialisé par la firme Monsanto, la même qui a produit le principal désherbant à base de glyphosate sur le marché mondial, le Roundup. L’agent orange était utilisé pendant la guerre du Vietnam pour détruire les zones de forêts où se cachaient les combattants communistes et le produit a été jugé responsable d’avoir causé des cancers, des maladies graves et des malformations pour près de trois millions de Vietnamiens. Le pays n'est pas pour autant devenu un chantre de l'agriculture biologique puisque d'autres pesticides chimiques y sont toujours autorisés.

La même année, la Thaïlande a elle aussi failli interdire le glyphosate, mais également l’import de produits agricoles cultivés avec du glyphosate, ce qui aurait considérablement réduit les exports agricoles des Etats-Unis vers la Thaïlande. Le gouvernement s'est finalement ravisé à quelques jours de l'entrée en vigueur de l'interdiction. Une enquête a mis en évidence des efforts concertés de lobbying entre la firme allemande Bayer, qui a racheté Monsanto en 2018, et les autorités américaines du Département du commerce pour influencer les autorités thaïlandaises sur la question. Le Sri Lanka a lui aussi changé d'avis alors qu'il avait interdit le produit dès 2015, avant de l’autoriser de nouveau en 2022, officiellement pour améliorer les rendements de la culture du thé dans le pays.

Aux États-Unis, Bayer croule sous les procès

Le groupe allemand a été confronté, ces dernières années, à une avalanche de procès, liés au glyphosate. La faute à son produit phare, le Roundup, accusé de provoquer des cancers. Cet herbicide à base de glyphosate est au centre des 160 000 procès intentés jusqu'à présent contre Bayer depuis 2018. L’entreprise allemande a été forcée de mettre 16 milliards de dollars de côté pour faire face à ce risque judiciaire et les deux tiers de cette somme ont déjà été dépensés pour solder les comptes de 115 000 de ces procédures.

La dernière affaire date de fin octobre, où en Californie, un jury de San Diego a accordé plus de 330 millions de dollars à un géomètre de 57 ans diagnostiqué d’un lymphome après avoir utilisé pendant des décennies, l’herbicide controversé à base de glyphosate. Ce verdict est le troisième revers de suite en un mois pour l'entreprise allemande devant les tribunaux américains, après une série consécutive de neuf succès face à la justice.

Mais Bayer ne compte pas pour autant baisser les bras puisque le groupe a fait appel au 1er novembre dernier, comme dans chacune de ces affaires longues et coûteuses pour tout le monde. Il reste environ 40 000 procédures ouvertes, outre-Atlantique, contre le Roundup et le géant allemand.

Malgré les procès, Bayer ne prévoit pas d'arrêter de vendre ses bidons de Roundup aux États-Unis. Il a tout de même fait une concession en 2021, en affirmant qu’il ne vendrait bientôt plus ses désherbants à base de glyphosate aux jardiniers non professionnels, que l’entreprise accuse, par ailleurs, d’être à l’origine de la plupart de ses ennuis judiciaires.

Le groupe allemand assure régulièrement que ses produits ne sont pas cancérigènes et compte donc bien continuer à les écouler auprès des fermiers américains. Il existe toutefois une résistance locale, de la part de nombreuses collectivités, aux États-Unis. Dans le Connecticut, par exemple, il est interdit d’utiliser des pesticides près des écoles primaires. Les produits à base de glyphosate restent de très loin les plus utilisés outre-Atlantique, avec près de 140 000 tonnes pulvérisées chaque année sur les cultures de maïs, de coton ou de soja.

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