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Présidentielle 2022 : comment est perçue l’élection en Italie, en Allemagne et en Russie ?

Dans le club des correspondants, franceinfo passe les frontières pour voir ce qui se passe ailleurs dans le monde. Aujourd'hui, direction l'Italie, l'Allemagne et la Russie pour voir comment ces pays scrutent le résultat de l'élection présidentielle.

Article rédigé par franceinfo - Bruce de Galzain, Ludovic Piedtenu, Paul Gogo
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 6min
Illustration second tour de la présidentielle 2022. (LUDOVIC MARIN / AFP)

Dans une tribune publiée jeudi 21 avril dans le journal Le Monde (article réservé aux abonnés), les chefs de gouvernement Allemand, Espagnol et Portugais ont appellé à choisir le "candidat démocrate" contre les attaques faites à la liberté et à la démocratie. Un appel implicite à voter Emmanuel Macron et une preuve que l'élection présidentielle est scrutée de près par les autres pays européens. Direction l'Italie, l'Allemagne et la Russie pour voir comment est perçue l'élection présidentielle.

En Italie, des positions divergentes dans le gouvernement

Ces derniers temps, l'Italie et la France se sont beaucoup rapprochées mais, sur l'échiquier politique, les positions sont divergentes. En Italie le gouvernement est formé de pratiquement tous les partis de l'extrême-droite aux antisystème en passant par le Parti démocrate. Le chef de ce dernier Enrico Letta met en garde car il estime que "si Le Pen gagne, ce sera une victoire bien plus importante pour Poutine que la conquête de l'Ukraine et un tremblement de terre politique en Europe". Parmi les soutiens du président Macron, l'ancien-chef du gouvernement Matteo Renzi mais également Silvio Berlusconi. En revanche, Giuseppe Conte à la tête des antisystème du mouvement 5 Etoiles, dont une frange a soutenu les gilets jaunes, ne prend pas parti. Contrairement à Matteo Salvini qui soutient son amie Marine Le Pen, leurs partis siègent ensemble à Bruxelles.

De son côté, Mario Draghi n'a pas participé à la tribune publiée dans Le Monde. Mais elle est signée par des dirigeants tous affiliés au même Parti socialiste européen (PSE). Il s’agit d’une initiative de partis politiques nous dit-on en Italie. Pour le coup, Mario Draghi n'a pas de parti et on l'a bien compris, il dirige en plus un gouvernement hétéroclite. Mais pour autant, certains commentateurs relèvent que Mario Draghi cherche à davantage faire entendre l'Italie sur la scène européenne et mondiale. Si Mario Draghi salue l'activisme européen d’Emmanuel Macron, qu’il apprécie vraiment, il veut lui aussi jouer cette carte. Une éventuelle victoire serrée d'Emmanuel Macron pourrait donner un espace politique plus grand à l'Italie de Draghi.

En Allemagne, la crainte de l'extrême droite

Comme il y a cinq ans, la présence de Marine Le Pen au second tour engendre outre-Rhin une extrême inquiétude. Elle est renforcée d'autant plus que dans les derniers jours de cette campagne la candidate du Rassemblement national a beaucoup attaqué l'Allemagne. “Si elle gagne, la France deviendrait un autre pays. Et l’Europe un autre continent”, peut-on lire dans Der Spiegel. L’hebdomadaire détaille son programme qu’il résume ainsi : "C'est un retour volontaire vers un passé que beaucoup pensaient révolu." Elle veut, comme elle le dit, "briser la domination supposée de l'Allemagne. Faire prévaloir le droit national sur le droit européen. Renégocier l'espace Schengen". C’est "le cancer du nationalisme" dont Marine Le Pen est la figure de proue, juge le quotidien économique Handelsblatt. "La France sera-t-elle bientôt sans drapeau européen ?", interroge le Frankfurter Allgemeine Zeitung (FAZ). Le quotidien de Francfort qui parle du “cauchemar Le Pen” dont Berlin serait bien inspiré de prendre l’avertissement au sérieux et de se préparer car ses plans sont connus. Ils sont les mêmes que ceux de Vladimir Poutine, affirme le journal, et viseraient à détruire l’Union européenne de l’intérieur.

L'Allemagne a diffusé sur une chaîne publique mercredi soir en direct et en traduction simultanée le débat de l'entre-deux-tours entre les deux candidats. Ce duel n’a pas rassuré les commentateurs. "Il n’y a pas eu de vainqueur clair", selon le Handelsblatt. Le quotidien économique se demande si "le favori Emmanuel Macron a réussi à convaincre suffisamment de jeunes et d’électeurs de Jean-Luc Mélenchon". Le journal explique leur "tentation de voter Marine Le Pen par frustration”. L’hebdomadaire Der Spiegel a vu "une candidate sereine face à un président offensif". Et lui donne le point. On peut le lire en titre : "Avantage Macron".

En Russie, Marine Le Pen vue comme une candidate en or

Les médias russes sont concentrés sur la guerre en Ukraine et ses conséquences mais les élections françaises ont encore une place dans les bulletins d'information des chaînes fédérales russes. D'autant plus que les deux candidats se sont régulièrement exprimés sur leurs positions envers la Russie. À regarder les journaux russes, il ne fait aucun doute qu'on préfère Marine Le Pen à Emmanuel Macron à Moscou. Le candidat Macron est décrit comme un président impopulaire, agressif et incapable de respecter les règles du débat de mercredi soir. Quant à la candidate du Rassemblement national, elle est décrite, au contraire, comme populaire et surtout, comme la plus proche des positions du Kremlin. Sa reconnaissance de l'annexion de la Crimée, son opposition à des sanctions contre le gaz et le pétrole russe en font une candidate en or pour Moscou. Même si ses derniers propos, critiquant la guerre en Ukraine et se disant favorable à des sanctions contre la Russie, n'ont pas manqué d'être relevés par les journalistes.

L’élection présidentielle française est importante pour les Russes parce que le président russe semble encore loin d'avoir fini son opération militaire en Ukraine. Isolé par les européens, Vladimir Poutine saurait, sans aucun doute, utiliser à son avantage l'apparition d'un leader européen prêt à partager sa vision du monde. Ou du moins, prêt à relativiser ses actions. L'enjeu est d'autant plus important depuis que le Kremlin a été privé de ses médias d'influence dans notre pays.

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