Cet article date de plus de neuf ans.

Jeudi noir en Suisse : la bourse s'effondre

La Suisse a vécu un jeudi noir, hier : la bourse s’est effondrée et le franc suisse s’est apprécié de 30% en quelques heures.
Article rédigé par Vincent Giret
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3min
Franceinfo (Franceinfo)

Cette histoire là, personne ne l’avait vue venir : ce fut une surprise totale. Alors je vais essayer de vous expliquer simplement. Tout a commencé il y a trois ans : la banque centrale suisse fait le diagnostic, pour le coup très juste, que la crise va durer en Europe. Et la Suisse a une crainte : comme elle est entourée de pays qui ne vont pas très bien, tous membres de l’euro, elle redoute que sa monnaie soit considérée comme une valeur refuge : si les investisseurs se mettent à acheter des francs suisses et bien le cours de cette monnaie va monter et pénaliser l’économie, qui est très dépendante des exportations : les produits suisses, par exemples les fameuses montres, risquent d’être plus chers et donc de moins se vendre. Et du coup, la banque centrale suisse cherche une parade et elle décide de bloquer la fluctuation de sa monnaie : au delà d’un certain cours vis à vis de l’euro et du dollar, le franc suisse ne peut plus s’apprécier, et donc ne peut plus s’échanger. La banque intervient et bloque ainsi le mécanisme du marché. Le cours du franc suisse peut varier dans une certaine mesure, mais pas au delà d’un certain plafond. C’était il y a trois ans et ça a plutôt bien marché.

La banque centrale suisse change d’avis durant la journée d'hier

Sans prévenir, sans signes annonciateurs dont les banques centrales sont d’ordinaires si coutumières. La banque centrale suisse annonce au petit matin qu’elle laisse jouer les règles du marché et qu’elle supprime donc toute limite à la fluctuation du franc suisse. Et là, patatra, pour reprendre les mots du patron du célèbre groupe de montres Swatch, c’est « un tsunami » qui se déclenche : le franc suisse, libre de tout mouvement, s’envole face à l’euro et au dollar : résultats immédiat les produits « made in Suisse » bondissent de 30% en quelques heures, et du coup, la bourse s’effondre, elle perd jusqu’à 12%, avant de se reprendre un peu en fin de journée, et certaines valeurs du luxe dévissent plus encore, car le marché sait très bien que ces entreprises exportatrices vont souffrir.  

Une baisse pas du tout prévue

Je crois pouvoir dire, pas du tout. C’est une histoire délirante, un raté colossal, disent les économistes… La banque centrale suisse a du vendre en catastrophe un bon paquet de francs suisses pour limiter la casse. Quelques un se frottent les mains : Les frontaliers, par exemple, des Français qui travaillent en Suisse, et surtout payés donc en franc suisse : en quelques heures, leur pouvoir d’achat a augmenté fortement. Mais globalement pour les entreprises suisses, c’est une catastrophe. Voilà une opération qui va rester dans les annales des grands ratages des banques centrales. Tout s’est passé en fait comme si les banquiers suisses avaient joué aux apprentis sorciers et avaient fait exploser la banque.

Il y a une morale à cette histoire incroyable

S’il y a une morale, c’est que la souveraineté monétaire d’un pays est très relative, qu’une banque centrale ne peut faire un usage immodéré de sa liberté, surtout quand il s’agit d’un petit pays. C’est une leçon aussi que devrait méditer tout ceux qui prônent le cavalier seul monétaire et la sortie de l’euro : un pays seul, inséré dans l’économie européenne, ne peut pas jouer impunément avec sa monnaie.

Commentaires

Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.