Le décryptage éco. De 30 ou 32 heures aux 35 heures : Edouard Philippe vise le temps travail des fonctionnaires des collectivités territoriales
Le Premier ministre l'a dit jeudi lors de l'émission politique sur France 2 : il veut mettre fin à la dérogation sur la durée légale du travail accordée aux collectivités locales. Le décryptage de Fanny Guinochet ("L'Opinion").
Le gouvernement veut que les fonctionnaires des collectivités locales travaillent plus. Edouard Philippe souhaite que les agents travaillent 35 heures et non plus 30 ou 32 heures. Aujourd’hui, les collectivités territoriales, c’est à dire les régions, les mairies, les métropoles, bénéficient d’une dérogation pour ne pas être aux 35 heures, soit une durée légale de travail de 1 607 heures par an. C’est ce régime auquel veut s’attaquer le gouvernement. La fin de cette dérogation pourrait figurer dans le projet de loi de réforme de la fonction publique prévu au premier semestre 2019.
Temps de travail contre rémunération
L’idée n’est pas nouvelle. En 2016, le maire de Sceaux Philippe Laurent (UDI) avait rendu un rapport sur le temps de travail dans la fonction publique dans lequel il préconisait de "mettre fin à ces régimes dérogatoires à la base légale de 1 607 heures." Toujours en 2016, la Cour des comptes avait calculé un temps de travail théorique moyen de 1 562 heures par an dans les collectivités.
Selon la Cour des comptes, seulement 20% des collectivités sont vraiment aux 35 heures. L’étude date de 2016 et depuis, c’est certainement un peu plus, car ces dernières années, plusieurs villes et régions ont engagé des réformes en la matière, en négociant des accords sociaux avec les agents. C’est le cas de villes comme Suresnes, de la métropole de Lyon, à Nancy, ou à Paris.
Ça ne s’est pas fait sans mal ici et là, il y a eu des grèves, mais le gouvernement pourra rétorquer que les salaires ont augmenté. Jeudi 28 septembre, l’Insee a publié une étude : en 2016, un salarié de la fonction publique territoriale perçoit en moyenne 1 902 euros nets par mois. Et puis, l’heure est aux économies.
L'équivalent de 32 000 postes
Quel serait l'impact d’un passage effectif aux 35 heures dans les collectivités ? L'alignement à la hausse du temps de travail des fonctionnaires territoriaux doit permettre de dégager l'équivalent de 32 000 emplois, explique le gouvernement. On voit bien l’enjeu, alors qu’Emmanuel Macron a promis de supprimer, d’ici la fin de son quinquennat, en 2022. 120 000 postes de fonctionnaires, dont 70 000 dans la fonction publique territoriale. S’il met en place cette disposition, il pourrait atteindre plus facilement son objectif.
Forcément, les élus locaux devront se conformer à la loi. Ils ne râleront pas forcément. Souvent, ces élus expriment des difficultés à baisser leurs dépenses de fonctionnement. Par exemple, ils se plaignent – souvent en coulisse – de l’augmentation du point d’indice des fonctionnaires, décidée par François Hollande, qui signifie une augmentation de salaire. Cela a alourdi leurs comptes. Là, ils pourront se référer à la loi nationale pour demander à leurs agents des efforts. La plupart des communes qui sont passées aux 35 heures ont supprimé des RTT.
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