Le décryptage éco. Quelles solutions pour sortir de la crise en Guyane ?
Après la grève générale lundi 27 mars, les syndicats ont lancé un appel à une journée morte ce mardi en Guyane malgré les annonces de Bernard Cazeneuve. Quelles solutions peuvent-être apportées à la grave crise ?
Pour trouver des éléments de réponse à la crise que traverse la Guyane, il faut d'abord regarder la géographie. Le département français partage 700 km de frontière avec le Brésil. Une réalité géographique que peu de Français connaissent et qui illustre notre ignorance de la géographie mais aussi, souvent, de l’histoire et des réalités que vivent les Français de l’outre-mer. Or, pour comprendre la puissance de ce qui commence à ressembler à un soulèvement général, il faut s’intéresser d’abord à la géographie.
La population a doublé en 20 ans
La Guyane, cette Amazonie française, partage deux immenses frontières. Le Brésil d’abord, et surtout avec l’Amapa, l’un des Etats brésiliens les plus pauvres. Avec le Surinam ensuite, l’ex-Guyane Hollandaise, un Etat lui aussi fragilisé et en grande pauvreté. Il règne de l’autre côté de ces deux frontières un climat de grande violence et un dénuement qui poussent des hommes, des femmes, souvent des familles entières à partir et chercher un asile moins hostile en Guyane. Gérer et tenter d’intégrer cette immigration clandestine est l’un des défis auxquels est confronté cette région d’outre-Mer.
Autre problématique, la démographie. La population guyanaise a doublé en vingt ans. Difficile de trouver un autre endroit au monde qui ait connue pareille situation, c’est-à-dire le doublement de sa population. C’est un défi considérable à relever, notamment sur le plan des infrastructures, qui n’ont absolument pas été conçues pour le grand nombre : 250 000 personnes aujourd’hui, plus quelques milliers de clandestins.
Comment y remédier ?
La géographie nous met sur la voie. Il y a d’abord une dimension régionale qu’il faut traiter, avec les voisins, tant pour des raisons de sécurité que d’économie et de développement. Ensuite, il y a une quantité de problèmes à traiter. C’est une économie de rattrapage qu’il faut créer. L’Etat y a sa part bien sûr, d’autant que la Guyane a souvent été délaissée par rapport à d’autres territoires d’outre-mer. La construction d’écoles, hôpitaux et d’infrastructures de base figurent d’ailleurs en bonne place dans les revendications hétéroclites d’un mouvement de colère qui couvait depuis longtemps déjà et qui a débordé le pouvoir politique local. Un mouvement social qui jouit d’un très large soutien populaire.
A Kourou, sur le rond point du Centre Spatial, on chante Edith Piaf et on mange des beignets à la banane #Guyane pic.twitter.com/Fyyj9RMFwk
— Gaële Joly (@joelgaly) 27 mars 2017
Il n’y aura donc pas de sortie de crise sans que l’Etat y mette les moyens pour espérer qu’un jour cette économie de rattrapage entre dans un cycle plus vertueux et crée sa propre prospérité. Profitons-en pour démentir une image tenace : non les Français de l’outre-mer ne sont pas des assistés et ne coûtent pas si cher à la métropole. L’effort total net de la Nation pour les outre-mer se monte à un peu plus de 2% des dépenses de l’Etat et de la Sécurité sociale, pour 4% de la population, voyez qu’on est loin de l’assistanat.
Un gouvernement en fin de course est-il en situation de répondre à de telles demandes ?
C’est tout le défi. Mais il va bien falloir qu’il discute à chaud et prennent de premiers engagements s’il veut ramener un semblant de calme. Le ras-le-bol est très profond. Certains réclament une loi cadre qui fixerait à l’Etat et à la Guyane des obligations de résultat sur des objectifs d’amélioration de la convergence avec les standards de l’hexagone, notamment en terme de revenus par habitant. Cela prendra au moins une génération.
Il y a une exigence d’égalité qui monte, et pas seulement d’ailleurs de la Guyane, mais de tous les territoires d’outre-mer. Le PIB par habitant dans les Dom représente un peu plus de 60% seulement du niveau de l’Hexagone. Il reste un sacré chemin à parcourir. L'Etat n'est pas responsable de toute l'économie et c'est mieux comme ça, mais il est responsable des conditions dans lesquelles on peut développer une économie.
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