Le mariage Areva et EDF est-il viable ?
La question est assez grave tout simplement parce qu’aujourd’hui l’ancien fleuron français du nucléaire est en danger de mort. Areva avait été créé il y a près de 15 ans, en fusionnant la Cogema et Framatome, pour créer un géant français dans tous les métiers du nucléaire : de l’extraction de l'uranium à l’exploitation de complexes nucléaires, en passant par la construction de réacteurs et le traitement des combustibles usés. On le sait maintenant, un retournement du cycle après le drame de Fukushima et une interminable dispute avec EDF, sans que l’Etat ne joue vraiment son rôle d’actionnaire, a mis l’entreprise dans le fossé. L’Etat tape enfin du poing sur la table, bien tard il est vrai : les patrons d’EDF et d’Areva ont été changés et sommés de s’entendre, mieux de proposer un projet commun.
Alors quels contours pourraient avoir ce rapprochement, Vincent, une fusion d’entreprise ?
Une fusion est peu probable en l’état, tant les deux cultures sont différentes et tant les résistances du management et du personnel seraient fortes. Une fusion, c’est toujours un risque aussi de contaminer l’entreprise qui va bien en la sommant de se marier avec celle qui va mal. Mais il n’y a plus aujourd’hui aucun tabou. Un rapprochement, y compris au plan capitalistique, avec une prise de participation d’EDF dans le capital d’Areva, ou de certaines activités d’Areva, c’est désormais possible. En mêlant enfin leur destin, en rapprochant leur management et leur conseil d’administration, ces deux entreprises n’auraient plus le loisir de se disputer, de se concurrencer, ou de perdre des compétitions sur d’énormes marchés en se présentant en ordre dispersé, comme c’est scandaleusement arrivé dans le passé.
Ça veut dire aussi des équipes communes, Vincent, dans des domaines particuliers ?
Oui, là aussi, c’est possible et probable. Le ministre Emmanuel Macron indiquait la voie hier, en affirmant que dans les domaines des réacteurs, de l’ingénierie et de la maintenance nucléaires, Areva et EDF devraient travailler main dans la main dans un esprit de convergence, c’est le mot du ministre. En clair, des équipes communes travailleront sur la compétitivité du réacteur EPR de 3ème génération et développer ensemble de nouveaux réacteurs. L’Etat a un redoutable moyen de pression : pas question de recapitaliser Areva sans convergence stratégique des deux entreprises. Il faut donc inventer une reconfiguration totale d’Areva et un nouveau mécano pertinent avec son principal client qu’est EDF. L’intégration a surtout de sens pour gagner des marchés à l’étranger, et notamment ceux très prometteurs de la Chine et de l’Inde, face à la concurrence américaine, japonaise, coréenne ou même russe. Il faut enfin une équipe de France du nucléaire, un slogan souvent brandi, jamais concrétisé. Mais dont l’actualité est aujourd’hui brûlante.
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