Jean Reno publie un premier roman "Emma" : "J'espère que les lecteurs, les lectrices vont me permettre de continuer"
En 1988, lorsque Luc Besson lui confia le rôle d'Enzo Molinari, l'autre plongeur du Grand Bleu, le nom de Jean Reno commençait à résonner grâce notamment à sa participation très remarquée dans le film Subway aux côtés d'Isabelle Adjani, Michel Galabru ou encore Richard Bohringer. Depuis Nikita, avec son rôle devenu culte et emblématique de Victor le "nettoyeur", celui de Desroches dans Da Five Bloods : Frères de sang de Spike Lee en passant par Godefroy de Montmirail dans Les Visiteurs, il est devenu l'un des piliers du cinéma français et un acteur reconnu et plébiscité au niveau international.
Jeudi 16 mai, il publie un premier roman, Emma aux éditions XO, l'histoire d'une jeune femme, masseuse dans un centre de thalassothérapie, dont le passé reste sombre. Le jour où elle quitte sa Bretagne pour se rendre à Oman former des équipes d'un centre de bien-être, sa vie bascule dans un cauchemar éveillé.
franceinfo : Au menu d'Emma, il y a des angoisses, de l'adrénaline, des frissons et la naissance d'une héroïne, malgré elle. Qu'est-ce qu'Emma est venue faire dans votre vie ? À quel moment cette envie d'écrire un roman est née ?
Jean Reno : J'ai été en thalassothérapie et ma femme a eu un massage par quelqu'un de formidable. Elle m'a dit : "Vois cette jeune fille !". Je lui ai répondu de me laisser tranquille. "Vois-la !", a-t-elle insisté et a commencé tout un travail de bouillonnement, de gestation qui a duré des années parce que je ne suis pas écrivain et que je travaillais beaucoup. À partir du Covid, ça s'est ralenti et j'ai eu envie. Il y a cette phrase imbécile qui dit : "Il faut planter un arbre, avoir un enfant et écrire un bouquin". Je me suis dit : "Jette-toi à l'eau !"
Quand on lit ce roman, on se rend compte qu'il y a une énorme partie de vous à l'intérieur. Cela parle beaucoup de ce qui vous touche dans la condition des femmes, comment on traite les femmes. Ce n'est pas un hasard si ça se passe à Oman. On sent qu'il y a une énorme implication.
J'aime ce qui est romanesque. Le romanesque, pour moi, est lié à la femme et je suis attentif à l'itinéraire, au voyage de la femme, puisque des femmes m'ont permis de vivre. Quand je suis arrivé à Paris en 1970, je crevais de faim. Je suis arrivé avec 100 francs en poche. J'arrivais de Mâcon où je travaillais à la Caisse d'épargne et je voulais prendre des cours de théâtre. Les femmes m'ont sorti la tête de l'eau, m'ont montré, m'ont éduqué. J'ai eu des amours dans des classes sociales qui n'étaient pas la mienne et qui m'ont permis d'observer et de regarder la femme.
"Je voulais un bouquin romanesque. Je voulais une histoire romanesque, une histoire d'amour, mais avec du danger et avec une mutation."
Jean Renoà franceinfo
Vous écrivez dès les premières pages : "Notre plus grande aventure est bien celle de notre vie". Qu'est-ce que cela signifie ?
Ça signifie que beaucoup de gens autour de moi pensent que l'aventure va arriver avec quelqu'un, avec une rencontre. Ou l'aventure va arriver par hasard si je rate un train. Ce n'est pas vrai. La plus grande aventure, c'est celle de notre vie. Même si elle se passe dans une rue. Ayez confiance, votre vie va être votre aventure et vous allez être très heureux.
Vous offrez aussi une possibilité d'affronter la vie quand elle nous a laissé des blessures assassines. Emma oscille entre la vie et la mort en permanence. Pour elle, il n'y a pas de deuil, pas de véritable absence. Et pour vous?
Longtemps, j'ai senti la présence de ma mère. Mais est-ce que c'était elle ou est-ce que c'était moi ? Je ne sais pas. Après, elle s'est éloignée. En même temps, il faut laisser les esprits aller où ils doivent aller. Mais bien sûr que tout ce qui vous a touché, reste.
Cet ouvrage, c'est l'héritage de nos ancêtres qu'on garde en nous, de ce qu'on nous a transmis, des erreurs qu'on peut commettre, de ce que l'on en fait ?
J'ai une conversation avec moi-même là-dessus et avec ma femme. J'ai cette chance, au bout d'un troisième mariage, de trouver quelqu'un avec qui on peut parler justement des erreurs. Elle me dit : "Mais tu es têtu !" ou "Tu es con ! Est-ce que tu comprends que tu es con ?" "Arrête ! Tu m'énerves !", ça, c'est ma phrase. Mais elle a raison.
Ce que ça signifie tout ça, c'est que vous êtes un Amoureux avec un grand "A" ?
Oui, j'aime aimer sinon on est cuit. Si on n'est que la nuit, ce n'est pas possible.
Je vous sens très ému en évoquant ce premier roman ? Déjà traduit en 13 langues, est-il prévu d'en faire une adaptation ?
Non. Il vit sa vie qui est une aventure extraordinaire. J'espère que les lecteurs, les lectrices vont me permettre de continuer. Si vous avez aimé mon livre, ça me suffit, ça me touche énormément.
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