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Zep présente le nouvel album des aventures de "Titeuf" : "Je sais que j'ai des rendez-vous avec ce personnage"

Tous les jours, une personnalité s'invite dans le monde d'Élodie Suigo. Aujourd’hui, le musicien et auteur de bandes dessinées, Zep. Il publie "Suivez la mèche" aux Editions Glénat, le 18e tome des aventures de "Titeuf".
Article rédigé par franceinfo, Elodie Suigo
Radio France
Publié
Temps de lecture : 6min
L'auteur de bande dessinée Philippe Chappuis, plus connu sous le nom de Zep, au festival d'Angoulême le 27 janvier 2018. Photo d'illustration. (JOEL SAGET / AFP)

Zep est musicien et auteur de bandes dessinées. En 2004, il a reçu le Grand Prix de la ville d'Angoulême pour l'ensemble de sa carrière, avec ses personnages et ses histoires comme le Captain Biceps ou encore Chronokids. Depuis 30 ans, il est également célèbre pour avoir créé Titeuf, ce préado qui n'a jamais cessé de conserver son âme d'enfant. Nous grandissons quotidiennement avec ce personnage "attachiant" à la mèche blonde, immédiatement reconnaissable et à ses expressions bien à lui comme : "tchô!" et "C'est pô juste". Il est petit, mais il aime aborder les discussions qui le perturbent, comme le mystère des filles, le sexe, la séduction, le tout aux côtés de ses potes avec qui il a fait les 400 coups. Il nous revient donc avec le 18e tome de cette série qui s'intitule : Suivez la mèche aux éditions Glénat.

franceinfo : Titeuf a 30 ans. Il n'a pas pris une ride, comme son père, qui n'est autre finalement que son double !

Zep : Plus son double que son père. On me présente souvent comme le papa de Titeuf, ce qui n'est pas vrai en fait, je n'ai pas du tout ce rapport avec lui. Mais enfin, je commence à avoir bientôt l'âge d'être son grand-père donc j'accepte qu'on m'appelle comme ça. Ça me rajeunit un peu.

Vous étiez où il y a 30 ans? Titeuf ? ZEP ? Lapsus révélateur !

On me le fait souvent. Il y a 30 ans, j'étais dans mon atelier à Carouge et mon atelier donnait dans une cour d'école. J'avais un poste d'observation sur l'enfance assez privilégié. Moi-même, j'étais un vieil enfant, j'avais 24 ans, j'avais oublié mon enfance. Je l'avais sous mes fenêtres et c'est en l'observant, souvent à l'heure de la récré, les enfants faisaient tellement de bruit que j'arrêtais de travailler. J'ouvrais les fenêtres et je regardais. J'étais un peu spectateur du ballet des enfants sous mes fenêtres. Et là, mon enfance m'est revenue. Je suis là et paf ! Je me souviens de tout et je suis là : ouais, c'est génial ! J'ai pris un carnet et j'ai commencé à noter tout ça. Et ça a fait Titeuf.

Titeuf n'aime pas l'école. Par contre, il est délégué de classe !

Cette année, il est vraiment monté en grade. Il côtoie les puissants !

Vous avez commencé à écrire, à créer et ensuite à dessiner par envie ou par besoin ?

Toujours par envie. J'ai toujours dessiné. Depuis que je suis enfant. Moi, j'aime raconter des histoires et dessiner. Ce métier, la bande dessinée, est fait pour moi.

Cela prouve que vous avez toujours gardé vos yeux d'enfant. Qu'est-ce qui a le plus changé entre 1992 et aujourd'hui ?

Physiquement, je ne suis plus la même personne. Mais sinon, j'ai l'impression que "Titeuf" m'aide à retrouver ça. Quand j'avais 25 ans, je crois que j'étais beaucoup plus sérieux que ça et j'avais beaucoup de certitudes. J'étais devenu un adulte. En fait, petit à petit, Titeuf m'a fait déconstruire tout ça. Je me suis rendu compte que les questions que je pouvais poser, il faut quand même que j'assume ça, à travers "Titeuf", c'étaient des questions que je me posais et auxquelles je n'avais pas de réponse en tant qu'adulte. Donc ça me fait du bien aussi de les poser avec "Titeuf". Parfois, j'ai un semblant de réponse, parfois non.

"J'ai été élevé dans une idée que les adultes savaient tout."

Zep

à franceinfo

Pourtant, les parents de Titeuf sont super cool et on sait que vous rendez hommage à vos parents.

Oui. Mais quand même, on n'avait pas beaucoup le droit de poser des questions un peu difficiles à table, donc on devait les poser plutôt à l'école ou à mes grands-parents. Ils sont toujours beaucoup plus, plus cool. Mais je n'ai jamais entendu mes parents me dire :Je ne sais pas! Je trouve que c'est assez bien de dire parfois à ses enfants qu'on ne sait pas, qu'on n'a pas réponse à tout, qu'on cherche aussi. Cette idée que quand on sera adulte, on aura tout compris n'est pas vraie, en fait. Elle n'est pas très rassurante en tant qu'enfant. Elle peut être rassurante à un moment, mais après, quand on s'aperçoit qu'il n'y a pas une vérité, mais qu'il y en a autant que de gens sur terre, ça peut être assez flippant, alors que si on a été élevé dans l'idée qu'au fond, il n'y a pas une vérité et puis qu'il n'y a pas quelqu'un qui sait tout. Et ce n'est pas parce que tout à coup, on va avoir 18 ans qu'on va recevoir d'un coup une espèce de savoir universel qu'on va continuer toute sa vie à apprendre, à être curieux, à poser des questions. Ça donne une autre mise en perspective de la vie qui, je trouve, est assez rassurant.

On constate avec "Titeuf", parce que c'est un personnage qui appartient maintenant à beaucoup de familles, c'est à quel point vous êtes à la fois libre et à la fois prisonnier. C'est un vrai questionnement que vous avez régulièrement : est-ce que je continue ou pas ?

Déjà, les premières années, j'avais l'impression qu'une espèce de porte s'était ouverte sur l'enfance et que les histoires arrivaient toutes seules et qu'il fallait tout de suite les consigner et tout de suite les publier. "Titeuf" n'a pas été tout de suite un succès, donc il fallait aussi attendre. Au début, c'était un succès de bouche à oreille, donc ça reste assez modeste. J'ai l'impression que ça, ça s'est apaisé. Je ne suis plus inquiet. Je ne me dis pas : il faut vite que je consigne les choses. Je sais que j'ai des rendez-vous avec ce personnage et quand le rendez-vous arrive, ça va être chouette. Il va se passer des choses.

"Avec l'âge, j'ai l'impression que Titeuf est un personnage qui va m'accompagner toute ma vie. Et j'aime bien cette idée d'avoir jusqu'à la fin de ma vie des rendez-vous avec l'enfance."

Zep

à franceinfo

Je trouve ça assez chouette de me dire qu'à 80 ans je pourrai encore aller me promener dans le monde de 2053 qui sera devenu peut-être complexe, très dur à comprendre pour le vieil homme que je serai, mais je pourrai mettre mon costume d'enfant et aller le questionner encore. Si c'est possible, j'aimerais vraiment pouvoir le faire.

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