Cet article date de plus de deux ans.

Au Portugal, le socialiste Antonio Costa déjoue les pronostics et remporte les législatives

Un socialiste qui gagne des élections haut la main, c'est possible : au Portugal, le Premier ministre Antonio Costa reste aux commandes à l'issue des législatives anticipées de ce dimanche 30 janvier. Il obtient même la majorité absolue.

Article rédigé par Isabelle Labeyrie
Radio France
Publié
Temps de lecture : 92 min
Le socialiste Antonio Costa obtient la majorité absolue aux législatives, à Lisbonne (Portugal), le 30 janvier 2022. (ADRI SALIDO / ANADOLU AGENCY)

Adieu la "geringonça" ("le bidule"), cette improbable union des gauches qui avait porté Antonio Costa au pouvoir en 2015 et qui faisait la particularité du Portugal : avec 117 sièges sur 230 (les résultats sont encore partiels), Antonio Costa remporte les élections législatives, dimanche 30 janvier au Portugal. Il se débarrasse de la gauche radicale et des communistes, alliés nécessaires mais turbulents, et il a désormais les coudées franches pour diriger le pays. Seul. Exactement comme il le souhaitait.

Mais "une majorité absolue, dit-il, ce n’est pas le pouvoir absolu... C’est surtout une responsabilité supplémentaire". L'ancien maire de Lisbonne, cheveux blancs soignés et visage tout en rondeur, pourra mettre en œuvre comme il le souhaite le plan d’investissements de 16,6 milliards d’euros de l’Union européenne destiné à relancer le pays. Lors de son premier mandat, Antonio Costa avait bénéficié d’une conjoncture économique favorable, ce qui lui avait permis de mettre fin aux mesures d'austérité mises en place après la crise de la dette en 2011 et d'assainir les finances publiques. Persévérant, ce supporter du club de football du Benfica a bâti sa carrière avec la même patience dont il fait preuve face aux puzzles, son passe-temps. Après ces deux dernières années, très marquées par la crise sanitaire et dont le Portugal espère sortir au plus vite, Antonio Costa a promis de revaloriser le salaire minimum, qui plafonne aujourd'hui à 822 euros sur douze mois. L'un des plus bas de toute l'union européenne.

C'est la troisième fois que les Portugais étaient appelés aux urnes depuis le début de la pandémie de Covid-19, après l'élection présidentielle il y a un an et les municipales de septembre dernier. En tout, il y a eu 10,8 millions de votants dont 9,3 millions vivant sur le sol portugais.

L'extrême-droite, troisième force politique

L'autre leçon de ce scrutin, dont la campagne s’est essentiellement déroulée à la télévision et sur les réseaux sociaux (les autorités avaient organisé dimanche 23 janvier un premier vote par anticipation), c'est la montée de l'extrême droite, qui devient la troisième force politique du pays. Un véritable séisme dans un pays qui sur ce plan faisait figure d'exception en Europe. Car depuis 1974 et la fin de la dictature de Salazar, le Portugal a toujours fait barrage à l’extrême-droite.

Le parti Chega (en portugais "assez", "ça suffit ") obtient plus de 7% des voix soit 12 députés sur les sièges de l'assemblée contre un seul lors des dernières élections, en 2019 (1,3% des voix), l'année de sa création. 

Le président de Chega, le très populiste et très catholique Andre Ventura, ancien commentateur de foot qui a milité un temps au centre droit, défend la prison à perpétuité et la castration chimique des délinquants sexuels. Ses cibles privilégiées : les Gitans et les Noirs. Il prétend faire le "ménage" tous azimuts avec un discours anti-élite et anti-corruption, autour d'un slogan qui reprend celui de Salazar : "Dieu, patrie, famille", auquel il a simplement ajouté le mot "travail".
Son parti entretient des liens avec Marine Le Pen en France, Matteo Salvini en Italie et Vox en Espagne. 

À la présidentielle de janvier 2021, Ventura était arrivé troisième, devant les candidats des communistes et du Bloc de gauche. Les législatives confortent sa percée. Lui qui avait pour mission de briser le tabou de l’extrême-droite au Portugal a réussi. Et entend désormais peser sur le débat politique.

Commentaires

Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.