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Le sens des mots. "Racisme", une classification discriminatoire des êtres humains

Tout l'été sur franceinfo, Marina Cabiten et la sémiologue Mariette Darrigrand s’arrêtent sur les termes qui ont marqué l’actualité de l’année écoulée. Aujourd'hui, le racisme.

Article rédigé par franceinfo, Marina Cabiten
Radio France
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Temps de lecture : 2 min
Des manifestants brandissent des pancartes "Black Lives Matter" lors d'une marche contre le racisme et les violences policières organisées à Londres, le 5 juillet 2020. (JUSTIN TALLIS / AFP)

La mort de George Floyd, homme noir tué par un policier blanc aux États-Unis, a ravivé l'élan populaire contre le racisme dans le monde entier, notamment avec le slogan "Black lives matter".

franceinfo : Mariette Darrigrand, vous êtes sémiologue spécialisée dans l'analyse du discours médiatique et dirigeante du cabinet Des faits et des signes. Le concept de race a été retiré de la loi française en 2013 mais il n'a pas disparu de notre société. Le mot racisme est là pour en témoigner.

Mariette Darrigrand : Oui, et ce sont au final des mots récents en français. Ils datent de la fin du XIXe siècle, du début du XXe siècle. Pour comprendre ces notions, il faut revenir à la science de l'époque, qui adore les classifications. Elle met le vivant dans des cases, avec des espèces et des sous-espèces.

Comme le tableau des éléments chimiques de Mendeleïev en 1869. Évidemment, cette classification devient discriminatoire quand elle porte sur les êtres humains. C'est ce qu'on appelle la théorie des races.

Cela a été développé en particulier par Arthur de Gobineau dans son Essai sur l'inégalité des races humaines de 1853. Il y défendait au départ la nature suposée supérieure de la noblesse. Ensuite, dans les années 1930, des idéologues nationalistes comme Charles Drumont ont fait de cette pensée une idéologie à part entière.

C'est de cette idéologie que découle le mot racisme, qui entre dans le dictionnaire français en 1902. Quant au mot race, son étymologie reste obscure : il n'a aucun antécédent latin. Les lexicologues en sont aux hypothèses.

Est-ce qu'il s'agit d'une déformation du latin generatio, ratio se rapportant à la race ? Dans ce cas, il désignerait les membres d'une même famille génétique, ce qui scientifiquement n'existe pas car le génome est commun aux humains. S'agit-il d'un prolongement de racix qui donnera le mot racine ? Ou alors, est-ce un emprunt à l'italien, avec le mot raza d'Italie du Nord qui désigne une sorte de convention entre les membres d'une même famille ou les artisans d'un même métier ? Le mot venu de l'italien serait passé tel quel en anglais, où il a beaucoup prospéré.

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