Vrai ou faux
Joe Biden a-t-il pris la décision de poursuivre le mur à la frontière entre les États-Unis et le Mexique, comme l'assure Bruno Retailleau ?

Le chef de file des sénateurs Les Républicains Bruno Retailleau demande plus de fermeté, alors que l'examen du projet de loi asile et immigration a commencé lundi 6 novembre au Sénat. Il prend l'exemple des États-Unis.
Article rédigé par Armêl Balogog
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 101 min
Le président du groupe des Républicains au Sénat, Bruno Retailleau, arrive pour une rencontre avec le Premier ministre français à l'hôtel Matignon à Paris le 3 juillet 2023. (GEOFFROY VAN DER HASSELT / AFP)

C'est l'un des textes phares du gouvernement. Le projet de loi asile et immigration est arrivé devant le Sénat lundi 6 novembre. Les débats s'annoncent inflammables tant le texte, visant à "contrôler l'immigration, améliorer l'intégration", est contesté de part et d'autre. Bruno Retailleau, le président du groupe Les Républicains au Sénat, ne veut pas entendre parler de l'article 3 qui veut donner des titres de séjour aux étrangers qui travaillent dans les métiers en tension.

>> Lire aussi : "Projet de loi immigration : les clés pour comprendre les débats qui s'ouvrent au Sénat"

Le matin-même sur RTL, le sénateur de la Vendée demandait plus de fermeté pour limiter les entrées sur le territoire français, à l'image des autres démocraties occidentales selon lui. Bruno Retailleau prenait notamment l'exemple des États-Unis. "Regardez Monsieur Joe Biden. Joe Biden n'est pas conservateur, il est démocrate. Il a pris la décision de poursuivre le mur à la frontière mexicaine qu'avait commencé son prédécesseur Monsieur Trump." Vraiment ?

Légalement "contraint" à poursuivre le mur

La formulation du sénateur LR est trompeuse. Certes, la construction du mur se poursuit à la frontière américano-mexicaine, mais ce n'est pas vraiment une décision de Joe Biden et surtout ce n'est pas parce qu'il serait finalement d'accord avec son prédécesseur Donald Trump sur l'utilité de cet édifice, contrairement à ce que laisse entendre Bruno Retailleau.

Au contraire, le président américain se dit légalement "contraint" de continuer le mur. Le Congrès américain avait alloué des fonds à cette construction en 2019, quand Donald Trump était encore au pouvoir. "J'ai essayé de convaincre le Congrès [à majorité républicaine] d'allouer les fonds à autre chose, de les rediriger. Ils n'ont pas voulu", a expliqué Joe Biden lors d'une conférence de presse à Washington jeudi 5 octobre. "Je ne pouvais pas l'arrêter", a-t-il encore déclaré, car il était impossible "légalement d'utiliser cet argent pour autre chose que ce pour quoi il a été prévu". L'administration Biden a dû poursuivre le mur avant la fin de l'année fiscale qui était fixée au 30 septembre dernier.

Pas une réponse efficace à l'immigration, selon Joe Biden

Néanmoins, Joe Biden n'adhère pas davantage à ce mur aujourd'hui que lors de son entrée en fonction début 2021, quand il avait déclaré que ce n'était pas "une solution politique sérieuse". Lorsque les journalistes lui ont demandé s'il pensait que ce mur était efficace, lors de cette même conférence de presse d'octobre 2023, il a répondu un simple "non".

Cela n'a pas empêché le président américain d'être critiqué sur sa gauche, par des démocrates comme par des associations de défense de migrants ou de l'environnement qui l'ont accusé de faire volte-face dans un contexte de forte pression migratoire et politique, comme le rapporte le New York Times (en anglais).

En cause également, la position de son secrétaire de la Sécurité intérieure qui semble moins claire que la sienne. Dans un document officiel publié au Registre Fédéral (en anglais) – l'équivalent du Journal officiel américain – qui donne le tracé des futures portions de mur, Alejandro Mayorkas a écrit qu'il y avait un "besoin aigu et immédiat de construire des barrières physiques et des routes à la frontière pour empêcher les entrées illégales sur le sol américain". Mais auprès des journalistes, il martèle que "depuis le premier jour, cette administration a dit clairement que ce mur de frontière n'était pas la solution" et a répété qu'ils avaient les mains liées.

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