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Les Pourquoi. Pourquoi, au jeu d’échecs, c’est la reine la plus puissante et non le roi ?

Sur le damier noir et blanc, c'est la Dame qui a le pouvoir.

Article rédigé par franceinfo, Philippe Vandel
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3min
Echiquier. (GETTY IMAGES)
 
Tout d'abord, sachez qu'aux échecs, on ne dit pas la reine mais la dame. Mais la question est la même. Pourquoi a-t-elle davantage de pouvoir que le roi? Elle peut se déplacer où elle veut, dans huit directions, devant derrière à droite à gauche, et sur toutes les diagonales ; le roi aussi, mais lui seulement d’une case ? Pourquoi la dame a-t-elle cet avantage considérable, alors que le but du jeu est justement de mettre en échec le roi ? La question se pose car le jeu d'échecs a été inventé bien longtemps avant les conquêtes féministes pour l'égalité des sexes, donc à une époque où la primauté de l'homme sur la femme ne faisait pas discussion.

Méritocratie républicaine sur le damier

Le jeu est né il y a quelque 1500 ans en Inde. Puis il a transité par la Perse, les pays arabes, avant d’arriver en Europe, via l’Espagne. Le jeu a évolué au fil des siècles, ses changements de règle reflètent la société de l’époque.
C'est à la révolution française que l’on doit la possibilité au pion de "manger" des adversaires. Autrefois, il ne pouvait pas prendre, seulement être pris. Comme de la chair à canon. Mais après 1789, le pion a aussi conquis le droit de "promotion" : en allant sur la 8eme case, il peut se transformer en dame, tour, fou ou cavalier. La méritocratie  républicaine, quoi. 
La dame maintenant. Nous l’appelons la dame, mais autrefois, c'était un homme. En Perse -l’actuel Iran- ou dans les pays arabes, elle s’appelait "firz" ou "wazir", qu’on peut traduite par vizir ou conseiller. On pense à Iznogoud, le grand vizir qui ne quitte pas le calife d'une semelle, et qui le conseille (jusqu'à vouloir prendre sa place). Cette pièce se tient au premier rang, au milieu, à la gauche du roi. Mais elle se déplace alors seulement d’une case, en diagonale. 

Une mauvaise traduction fait la dame 

Quand les arabes introduisent et popularisent le jeu d’échecs en Europe au Xeme  siècle, une mauvaise traduction du mot transforme le vizir en dame. Nous sommes à l’ère arabo-andalouse ; la péninsule ibérique est en grande partie un émirat musulman. Puis vient la reconquista, la reconquête, qui va s’étendre du haut moyen-âge jusqu’à la chute de Grenade en 1492. Les "Rois Catholiques" repoussent les musulmans de l’autre côté de la Méditerranée. 
Isabelle la Catholique règne alors sur l’Espagne. C’est elle qui fera changer les règles du jeu d’échecs. La souveraine demande à ce que la dame ait davantage de pouvoir.  Elle peut  désormais se déplacer dans toutes les directions, et comme bon lui chante. 
Son appellation féminine n’est pas universelle : la dame est toujours le vizir en Iran ou dans les pays arabes. Et on n’ose pas dire la vizirette. 
Jusqu'à preuve du contraire.

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