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Le marché de l’art entre épidémie, guerre et crise énergétique : quel équilibre ?

Le monde de l'art vit les soubresauts planétaires, conflits, guerre, crise énergétique, et pandémie de Covid. José-Manuel Lamarque s'entretient avec l'historien de l'art, Christophe de Quenetain, à quelques jours de l'ouverture de la foire internationale de l'art, la Tefaf, du 11 au 19 mars prochain, à Maastricht, aux Pays-Bas.
Article rédigé par franceinfo - José-Manuel Lamarque
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La TEFAF en juin 2022, rouvrait ses portes aux professionnels et au public, après deux années de  pandémie. Elle avait rassemblé 242 galeries venues de 20 pays. La prochaine TEFAF va se dérouler du 11 au 19 mars à Maastricht aux Pays-Bas. (IMANE RACHIDI / EFE / MAXPPP)

Quelles perspectives pour le marché de l'art en 2023, dans un monde qui bouge, un monde marqué par la guerre et qui sort d'une épidémie ? Décryptage avec Christophe de Quenetain, historien de l'art. 

franceinfo : Est-ce que ce monde de l'art s'adapte ou pas à cette époque troublée depuis plusieurs années ?

Christophe de Quenetain : C'est un monde qui s'adapte puisque c'est un milieu très pragmatique, fait d'individualités, donc de gens qui sont souples. Un milieu qui s'adapte peut-être un peu moins de nos jours, à cause de la crise énergétique, de la spirale inflationniste qui renchérit considérablement les coûts des transports, les coûts des foires. Donc c'est un milieu qui va continuer à s’adapter, mais peut-être avec moins d'événements, mais de meilleurs événements dans le futur.

Ces soubresauts planétaires ne concernent pas seulement les acheteurs privés, les collectionneurs, les exposants, mais surtout les acheteurs institutionnels, les musées par exemple ?

Les institutionnels souffrent énormément actuellement. Malheureusement, ce sont des institutions que nous ne verrons pas puisqu'elles ont d'autres chats à fouetter que de se lancer dans de grandes politiques d'acquisitions. Elles sont plutôt dans des politiques de reconstruction de leurs institutions.

La semaine prochaine, c'est la Foire internationale de l'art, la Tefaf, du 11 au 19 mars prochain, à Maastricht, aux Pays-Bas. Est-ce que la Tefaf subit cette bascule de l'actualité ?

Elle la subit notamment au sein des institutions que l'on pouvait accueillir lors des expositions annuelles que l'on faisait au sein de la foire. De nos jours, par exemple, un musée comme l'Ermitage ne pourrait pas exposer au sein de la foire.

Et pour l'instant, c'est un marché purement occidental ou ce marché va-t-il se scinder, parce qu'on parle beaucoup des BRICS (Brésil, Russie, Inde, Chine et Afrique du Sud) ?

Pour le moment, toutes les tentatives de développement dans les BRICS n'ont pas été de francs succès. Mais peut-être que dans l'avenir, effectivement, si on se retrouve dans un système économique commun au sein des BRICS, peut-être qu'il y aura deux grandes foires dans le monde. Une grande foire que l'on qualifiera de foire en dollar et en euro, et une autre dans cette nouvelle monnaie.

Le grand avantage de cette foire, du 11 au 19 mars prochain, c'est que c'est ouvert au grand public, aux Pays-Bas, à Maastricht. Mais l'ouverture au grand public dans ce bassin rhénan, ce n'est pas seulement des adultes, ce sont aussi des jeunes, des  enfants des écoles, le troisième âge ?

Effectivement, c'est une foire qui accueille plus ou moins 80 000 visiteurs, ce qui est énorme. Et il est vrai qu'en tant qu’exposants, il est très satisfaisant d'avoir en face de soi un public qui est peut-être moins argenté, mais qui est sensible aux efforts de sélection d'objets présentés. Donc, après ce qu'on pourrait qualifier de grand rush des premiers jours avec toutes les grandes institutions et autres collectionneurs privés, il est très agréable de pouvoir discuter avec un public plus large et curieux.

La Tefaf, c'est plus de 260 exposants. Vous aidez de petites institutions, par exemple, à la restauration, et cela tous les ans ?

On aide à la restauration, et c'est très important dans ces périodes troublées. Mais le fait que certaines institutions ne puissent pas venir cette année nous permet aussi d'aider d'autres institutions, notamment françaises, comme le Mobilier National, qui exposeront pour la première fois cette année au sein de la foire.

Vous êtes membre du comité exécutif, vous êtes aussi la police quelque part de cette foire, parce qu'on n'expose pas n'importe quoi ?  

C’est vrai que le comité exécutif met en œuvre et donne les grandes lignes pour les commissions d'expertise, puisque c'est une foire qui, avant son ouverture, est fermée aux exposants. Et pendant deux jours, vous avez entre 200 et 300 conservateurs, historiens de l'art du monde entier, qui vérifient la qualité des œuvres présentées par les marchands. Ce qui permet aux visiteurs d’avoir sous les yeux un véritable musée.

Il y a un hommage à rendre aujourd'hui au néerlandais Ger Luijten qui a été un très grand spécialiste de l'art mondial et qui a ouvert l'art au grand public, entre autres, avec la Fondation Custodia à Paris. Il était membre de ce comité exécutif, Ger était grand homme du Rijksmuseum.

Alors il faisait partie des comités de sélection pour les œuvres sur papier, et il a naturellement beaucoup fait pour la Fondation Historia, notamment en permettant des expositions d'institutions peu ou mal connues des Français à Paris.

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