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Apprendre à lâcher ses enfants

Avant, passer son bac était le prélude au passage à la vie adulte. Les enfants partaient faire leurs études supérieures ou travailler, et le cordon était coupé par la force des choses : pas de contact permanent. On était bien obligé de leur lâcher la bride. Depuis, cela s'est un tout petit peu compliqué. Le point avec Christilla Pellé-Douël, journaliste à Psychologies Magazine.
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Les enfants partent loin plus facilement qu'auparavant, billets bon marché, voyages scolaires, Erasmus... et pourtant, nous les tenons toujours par le bout du câble. Impossible de les lâcher : avec internet, Skype, les SMS, les réseaux sociaux, le téléphone, nous les gardons sous contrôle, qu'ils soient en Finlande ou en Chine. Bien sûr, cela nous rassure : on peut les joindre, on peut leur parler, les voir, comme s'ils étaient dans la pièce à côté. Pour eux, cela semble presque naturel.

C'est bien de rester en contact avec ses enfants, sauf que, sans nous en rendre vraiment compte, nous les maintenons dans une relation infantilisante. Les adolescents sont des êtres ambivalents, qui ont et n'ont pas envie de prendre leur envol. C'est notre rôle à nous, parents de jeunes primates supérieurs, de les pousser à partir lorsqu'ils ont l'âge. Sauf que nous sommes aussi des êtres de complexité et que nous n'avons pas très envie de les lâcher. Alors, les moyens de communication nous permettent de réaliser l'impossible : les lâcher tout en les tenant. Ce qui nous évite, du côté des parents, de nous angoisser trop de les voir partir dans le vaste monde, et du côté des enfants, de jouer à être grands et de s'éviter une éventuelle culpabilité de quitter papa-maman. Etre tout seul, c'est vrai, c'est désagréable mais c'est indispensable.

C'est aux parents d'espacer les appels Skype, le téléphone... On n'est pas obligé de le faire d'un seul coup, bien sûr, mais procéder par étapes et en fonction de l'âge des ados permet d'opérer une séparation en douceur.

Philippe Hoffman, psychologue, souligne que ne pas les aider à distendre un peu le lien familial au bon moment, c'est les mettre face à de réelles difficultés plus tard. "Ce sont de jeunes adultes ", dit-il, "qui ont du mal à s'engager dans la vie, à prendre des décisions. D'éternels bébés ". Bref, il faut savoir couper les "doudous" numériques. Après tout, les enfants ne sont jamais perdus, et s'il arrivait quelque chose de grave, nous serions prévenus, quoiqu'il en soit.

A lire : L'impossible séparation , de Philippe Hofman, Albin Michel

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