Enseignement de l'informatique : le retard français
Une association baptisée
Pagestec. Elle vient de réaliser une vaste enquête auprès des professeurs de
technologie à propos de l'enseignement de l'informatique.
Et
le résultat, c'est un zéro pointé.
Oui, sur à peu près tous les
sujets. En fin de troisième, les élèves ne sont qu'une minorité à savoir
se servir d'un clavier, à comprendre comment fonctionne un ordinateur, à
savoir se servir des outils bureautiques de base pour mettre en forme un
document... Même l'usage d'internet, qui est pourtant quotidien, demeure
extrêmement superficiel : les élèves s'en servent " souvent de façon peu réfléchie et peu
éducative : leur consultation se résume souvent à des interfaces de réseaux
sociaux, des sites de streaming vidéo ou audio, des recherches d'images, etc.
Ils ne sont que consommateurs, non utilisateurs critiques et avertis de cet
outil. Les fonctions avancées des navigateurs ne sont que trop peu connues,
utilisées et/ou maîtrisées. Idem pour le codage, que l'académie des sciences
voudrait voir enseigné en tant que tel.
Les
élèves sont pourtant censés maîtriser toutes ces compétences...
Oui. Elles sont sanctionnées par
l'obtention à la fin du collège du B2I, c'est la loi qui le dit, mais en
matière d'éducation les lois sont rarement appliquées.
Comment
s'organise l'enseignement de l'informatique ?
Il ne s'organise pas.
" Alors que les TIC constituaient une partie bien définie dans les anciens
programmes de Technologie de 1996 à 20086, elles ne se résument plus qu'à des
compétences à faire acquérir de par le biais d'autres activités "
expliquent les enseignants. Sur le papier ça se défend : il s'agissait de
placer les usages au cœur des apprentissages, d'affirmer qu'une simple
connaissance technique du numérique ne suffit pas ; Mais le résultat,
comme souvent à l'Education nationale quand tout le monde est censé s'occuper
de quelque chose, eh bien personne ne se sent suffisamment responsable et
investi pour prendre la main, et rien ne se passe.
Raison pour laquelle, selon
l'association pagestec, les enseignants de technologie réclament de récupérer
le bébé et de se voir de nouveau confier l'enseignement de l'informatique.
" Le succès d'un enseignement étant principalement lié à l'adhésion des
enseignants aux contenus et finalités de son programme, écrit l'association,
nul doute donc que les collègues s'investiront et participeront à la réussite
de cet enseignement d'informatique au collège.
Les
programmes sont seuls responsable ?
Non. Il ya beaucoup d'autres
facteurs, à commencer par la question de l'équipement. Au collège, le taux
d'équipement en ordinateurs est de un poste pour 5 élèves, 1 pour 8 pour des
ordinateurs de moins de 5 ans. A la limite cela pourrait suffire, mais il
existe de fortes disparitéés entre départements – je rappelle que ces
investissements sont à la charge des conseils généraux. Et ils viennent
s'ajouter aux disparités qui existent en primaire. Résultat, nombre d'élèves
arrivent au collège sans maîtriser les compétences qu'ils étaient censés
acquérir en école élémentaire notamment l'utilisation du clavier. Or cette
question des équipempents est fondamentale : Pagestec rappelle qu' "un
élève apprend mieux à utiliser un
ordinateur, à appréhender cet outil et sa logique, quand c'est lui seul qui
utilise le clavier, la souris et réalise un travail numérique par ses seuls
réflexions et agissements ".
Dans
certains pays, les élèves sont invités à apporter leur propre matériel.
Oui. Ce qu'on appelle le BYOD. Il
pose aussi des questions d'égalité. Il y aurait bien une solution, simple et
probablement pas plus coûteuse voire plus économiques : basculer les
budgets dédiés aux manuels scolaires en papier, qui en plus épuisent le dos des
élèves, pour l'achat de tablettes numériques
dans lesquelles ont trouverait tous les documents pédagogiques
nécessaires.
On
imagine aisément que cela ne plaît guère aux éditeurs...
C'est peu de le dire. Ils
bénéficient d'une véritable rente de situation. En outre cela inquiète tout le
secteur de l'édition : dans les grands groupes, vous avez souvent des
éditeurs scolaires, et ils contribuent largement à l'équilibre économique voire
au profits de ces groupes. Personne n'a intérêt à tuer la poule aux œufs d'or
Que
proposent les enseignants interrogés par Pagestec ?
Toute une série d'actions. On
retiendra sans surprise la réintroduction dans les cours de technologie de
collège d' " un réel enseignement de l'utilisation des outils informatiques "
et d'une initiation à la
programmation ; ils plaident évidemment pour un vaste plan d'équipement,
notamment pour permettre la " réintroduction d'un apprentissage en
groupes à effectifs réduits " ; et puis un plan de formation, d'autant
plus indispensable dans ce domaine que les technologies progressent à toute
vitesse. Leurs arguments sont pédagogiques mais aussi économiques ; ils
rappellent que le secteur informatique est au cœur du développement économique
et industriel.
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