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Les 16-44 ans meilleurs élèves que les 45-65 ans ?

On était habitué à ce que l'OCDE publie des enquêtes désagréables pour notre système éducatif – c'est le cas de Pisa, qui évalue le niveau des élèves de 15 ans. Elle récidive avec Piaac...
Article rédigé par Emmanuel Davidenkoff
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 6min
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Piaac pour Programme pour l'évaluation internationale des
compétences des adultes. 24 pays y ont participé dont la France.

Environ 166 000
adultes âgés de 16 à 65 ans ont été interrogés dans 24 pays – essentiellement
européens + l'Amérique du Nord, l'Australie, la Corée, le Japon, et la
Fédération de Russie. Ces tests portaient sur trois domaines :

• littératie –
la capacité de comprendre et de réagir de façon appropriée aux textes écrits ;

• numératie – la
capacité d'utiliser des concepts numériques et mathématiques ; et

• résolution de
problèmes dans des environnements à forte composante technologique - la
capacité d'accéder à des informations trouvées, transformées et communiquées
dans des environnements numériques, de les interpréter et de les analyser.

Donc une enquête qui porte sur des compétences plus
que sur des connaissances...

L'évaluation met
l'accent sur les capacités à résoudre des problèmes à des fins personnelles,
professionnelles ou civiques.

Résultat, pour la France : zéro pointé.

Les adultes
français, comme les jeunes, ont la tête bien pleine de connaissances mais ne
savent pas les utiliser hors contexte scolaire.

Seuls 7,7 % des adultes français se situent aux deux niveaux les plus
élevés de compétence en littératie**** et 34 % au niveau 3, contre
respectivement 11,8 % et 38,2 %, en moyenne, dans les pays de l'OCDE
participants.

En
numératie : seuls 8,3 % des Français
se situent aux deux niveaux les plus élevés de compétence**** et 29 %
au niveau 3, ce qui place également la France assez loin derrière la moyenne
(de respectivement 12,4 % et 34,4 %).

Il y a plus grave : la proportion d'adultes français obtenant de faibles
scores en littératie est l'une des plus importantes des pays participants :
21,6 %,
contre 15,5 %, en moyenne. Il en va de même pour la numératie, avec 28 % des
adultes français se situant à un niveau inférieur ou égal au niveau 1, contre
19 %, en moyenne, dans les pays de l'OCDE participants.

N'en jetez plus... Il n'y a aucune bonne
nouvelle ?

Si. Elle est
relative, et elle tord le cou aux idées reçues. Les jeunes français font mieux
que leurs aînés. Dit autrement : le niveau monte...

Les différences de compétences entre générations sont assez marquées par
comparaison avec les autres pays. Les mauvaises performances de la
France sont en bonne partie imputables aux résultats des 45-65 ans, tandis que
les 16-44 ans obtiennent des scores plus proches de la moyenne. En gros :
plus l'âge augmente, plus les scores s'éloignent de la moyenne. Seule moins
mauvaise nouvelle,  si les Français âgés
de 16 à 24 ans ont des compétences inférieures à la moyenne de des jeunes du
même groupe d'âge, l'écart est moins important que pour les adultes plus âgés.

Comme dans d'autres enquêtes, la France se distingue
par des écarts importants en fonction du niveau scolaire et du niveau social.

Les différences
de résultats en fonction du niveau de formation sont parmi les plus marquées
des pays participants. Alors que les résultats des individus qui n'ont pas
terminé le deuxième cycle de l'enseignement secondaire se situent 14 points en
dessous de la moyenne OCDE, ceux des diplômés de l'enseignement supérieur sont
très proches de cette moyenne.

Idem des catégories sociales.

Oui. Et des
origines.

Les personnes nées
à l'étranger et résidant en France obtiennent des résultats en littératie
inférieurs de 37 points à ceux qui sont nés sur le territoire français.

Quant à celles
qui sont nées à l'étranger et résident en France depuis au moins 5 ans, elles
obtiennent des résultats en littératie supérieurs de 5,5 points à ceux des
immigrés arrivés récemment, mais c'est une progression trois fois inférieure à
la moyenne.

La faute à l'école ?

Pas seulement.

L'évaluation des
compétences des adultes montre que dans le cadre professionnel, les
travailleurs français lisent, résolvent des problèmes complexes et utilisent
les TIC à une fréquence inférieure à la moyenne des pays participant à
l'évaluation.

Mais ces
résultats interrogent forcément le système éducatif

Ils font
ressortir le caractère encore très ségrégatif de notre école, qui est un
véritable mal français depuis qu'on a commencé à le mesurer et à s'y intéresser,
dans les années 60.

Ces résultats montrent aussi que la nostalgie n'est
pas de mise : l'école des 45 ans et plus n'était pas meilleure...

En tout cas elle
n'a pas laissé de traces visibles dans les domaines étudiés par cette enquête.
L'âge de la bascule est intéressant, les générations des 45 ans et plus font
moins bien. Ce sont les générations d'avant le collège unique, d'avant le
baccalauréat délivré à une majorité de jeunes – je rappelle que le pourcentage
de bachelier était en 1985 d'environ 30% d'une classe d'âge. A la même époque,
le supérieur accueille un million d'étudiants contre deux aujourd'hui. Malgré
tout ce qu'on peut dire et penser, cet effort de scolarisation a porté quelques
fruits. On oublie un peu vite que la belle école qu'on regrette parfois
laissait une majorité de jeunes sur le bord de la route.

Quels sont les pays qui s'en sortent le mieux ?

Japon, Finlande,
Flandres... On ne peut pas tirer de conclusions générales puisque les modèles
éducatifs y sont très différents voire divergents. Idem des pays les moins bien
classés, parmi lesquels on trouve l'Espagne, l'Italie ou les Etats-Unis.

 

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