Question de société. Vacances d'été : "Si on veut se libérer la tête, se faire vacciner, c'est la meilleure solution, pour soi et pour les autres", Jean Viard
"Question de société", un dernier rendez-vous avant l'été pour éclairer nos chemins communs, avec le sociologue Jean Viard. Et aujourd'hui, on se demande bien sûr comment on va pouvoir profiter des vacances, alors que le variant Delta suscite, dans l'esprit de tous, inquiétude et menace.
C'est un curieux été qui commence. Nous avons tous bien besoin de souffler après une année éprouvante et pour autant, nous entendons bien les recommandations des autorités sanitaires qui nous incitent encore à la prudence avec la menace du variant Delta. Le sociologue Jean Viard nous apporte son éclairage.
franceinfo : Alors, Jean Viard, comment on fait pour se détendre ? Comment profiter de cette pause estivale sans prendre de risque ?
Moi, si j'ai un conseil à donner, c'est de se faire vacciner. Si on veut se libérer la tête, c'est la meilleure solution pour soi et pour les autres. Mais après, ce qui est vrai, c'est qu'il y a un tel désir de fête, de joie. Vous allez partout, il y a du monde. Je crois que on a tous envie de sortir. On recherche des équilibres. On a été malade individuellement, d'une certaine façon, même si on n'était pas tous malades, mais on était confinés chez nous, etc. Normalement, il n'y a que quand on est malade qu'il nous arrive des choses pareilles.
Et puis, évidemment, c'est une aventure mondiale et nationale. Au fond, on a envie de vivre, mais on ne sait pas très bien comment. Donc, je pense qu'il va y avoir une poussée, une vague de sorties. Mais il ne faut pas oublier que la moitié des Français ne partent pas en vacances d'été. Donc, ça ne va pas s'arranger parce que la partie la plus fragile qui ne partait pas, c'est celle aussi qui s'est plutôt appauvrie.
Et 85% des gens disent qu'ils vont partir en France. Il y a la moitié des gens en France qui ont des pratiques de vacances à la mer, à la campagne, qui vont aller visiter les festivals, mais en fait qui ne découchent pas, parce que c'est ce qu'il y a de plus cher. Et puis, l'autre moitié de la société part généralement en famille, très souvent dans des résidences secondaires. Il y a deux mouvements. Et là, cette année, je pense qu'on va continuer à aller près de chez soi. On va bien sûr aller plus en France qu'avant. Il y a moins d'étrangers, donc il y a aussi plus de place. Moi j'ai un conseil à vous donner, c'est l'année où il faut aller au Louvre si vous ne voulez pas faire la queue. En province, c'est pareil.
Donc, c'est une année exceptionnelle. On va aller plus proche de chez soi. Si vous avez un peu de sous, c'est l'année pour aller à Venise, parce qu'il y aura peu de monde. C'est une année très, très différente des autres. Moi, je crois que c'est ça qu'il faut se raconter, mais il faut être prudent parce que la vague va monter. On va avoir peur. Et puis, il faut se rappeler une chose. C'est quoi les vacances d'été ? Les vacances d'été, c'est l'eau, le soleil, l'amour, l'amitié, la famille. Et puis les festivals. Et la nature qui est importante. C'est tous ces éléments-là.
Mais il faut penser à ceux qui ne partent pas. Il faut penser à ceux qui n'ont vraiment pas de sous après la crise, tous ceux qui vivaient un peu du black, du noir. Les étudiants qui n'ont pas pu faire les petits boulots qui les nourrissent. Là, il y a des groupes qui sont un peu en difficulté. Il faut aussi leur donner la possibilité de partir.
Et puis nous avons l'expérience de l'été dernier, nous savons que ce n'est pas parce qu'il y a moins de contaminations en ce moment qu'il n'y aura pas de regain de l'épidémie à la rentrée. Est-ce qu'on peut être certain pour autant qu'on ne refera pas les mêmes erreurs ?
Non, parce qu'il y a d'abord des anti-vaccins chroniques, y compris un peu complotistes. Il y a des gens qui ont d'abord envie de partir avant d'être complètement rationnels, etc. Il y a des tas de raisons. Il y a une partie de la jeunesse qui dit : c'est pas pour moi, mes parents et mes grands parents sont vaccinés, je ne risque rien. Il y a aussi ce discours. Non, il risque d'y avoir une quatrième vague. Elle sera pas comme les précédentes. Chaque vague est différente puisque là, en gros, il y a à peu près presque la moitié des gens qui ont déjà un vaccin, etc.
Donc ça ne sera pas la même type de vague. Mais il faut répéter tout le temps je ne suis pas médecin, mais que si les gens ne sont pas vaccinés, le virus mute. Si on est citoyen, je dirais qu'il faut se faire vacciner. Mais comment se faire vacciner et garder la joie et la légèreté de l'été ? Il faut tout essayer parce que si on ne retrouve pas de la légèreté, du plaisir, l'année prochaine risque d'être difficile. Je dirais qu'il faut être prêt à un nouveau combat qui peut être économique pour certains, qui peut être évidemment vaccinal. N'oublions pas les attentats qui, malheureusement, rodent dans nos sociétés en permanence. Essayons de prendre l'air, de s'aimer, mais sans oublier effectivement que le monde reste extrêmement dangereux.
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