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Regard sur l'info. La marque Macron

"La marque Macron, Désillusions du Neutre", un livre de Raphaël Llorca paru au printemps aux éditions de L'Aube. Thomas Snégaroff reçoit son auteur. 

Article rédigé par franceinfo, Thomas Snégaroff
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3min
Les gestes du président Macron lors de son discours à Kigali, pour l'inauguration du centre culturel francophone du Rwanda, le 27 mai 2021. (LUDOVIC MARIN / AFP)

Raphaël Llorca est spécialiste du langage, communicant, expert associé à la Fondation Jean-Jaurès. Il vient de publier aux Éditions de L'Aube La marque Macron, Désillusions du Neutre. Décryptage avec Thomas Snégaroff.

franceinfo : Première question toute simple. Ça veut dire quoi, La marque Macron ? 

Raphaël Llorca : J’ai voulu aborder une nouvelle grille de lecture, symbolique. Je ne suis pas en train de dire que Macron c’est du marketing, en concurrence avec d’autres produits. J’ai essayé de mobiliser une école française de la marque, qui consiste à dire qu’une marque associe trois niveaux de sens, des valeurs, des récits et une symbolique. C’est ce modèle que j’ai voulu appliquer pour comprendre sa conquête du pouvoir en 2017, et puis aussi son exercice. 

On peut confronter cet appareillage conceptuel à l’actualité chargée du président Macron. Dimanche dernier, c’était la vidéo avec les youtubers McFly et Carlito, il y a eu ensuie le grand entretien avec le magazine Zadig sur le regard d’Emmanuel Macron sur la France, et son enracinement, et enfin le discours de Kigali reconnaissant la responsabilité française dans le génocide des Tutsis au Rwanda…Qu’est-ce que ça nous dit de la "marque Macron" ?

D’abord, qu’il a une fascination pour le signe et le symbole. En jouant à la fois le président cool, puis en ayant des accents à la Michelet, puis très solennel au Rwanda. Ce qui me frappe c’est qu’il y a une forme d’habilité. Il le fait très bien. Il y a une performation. Quelle trace laissée dans l’opinion. Le risque est de brouiller avec tous ces symboles. 

Il faut rappeler que toute image est la somme des images précédentes, donc en tirant dans tous les sens, le risque est d’avoir une marque Macron qui se brouille et qui perd son efficacité sur le long terme.  

Ce que vous appelez le "neutre", est-ce que ce n’est pas ça ? Une chose et son contraire ? 

La force du "neutre", c’est d’articuler des contraires sans paraître contradictoire. C’est ni l’un, ni l’autre. Et ce que nous dit Roland Barthes, c’est que ce neutre-là, il a une fonction très particulière, c’est qu’elle esquive le conflit. Dans le cas de la commémoration de Napoléon, et à Kigali, on retrouve la même formule : "Ni déni, ni repentance". 

Ce neutre peut nuire aujourd’hui pour Emmanuel Macron ? 

Le neutre a créé un espoir formidable. Celui de transformer la France en dépassant les conflits ancestraux de la vie politique française. Mais ce neutre s’est, selon moi, muté dans une forme plus sombre, plus fermée, plus verrouillée. Une neutralisation.  

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