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Réparties de campagne. Présidentielle de 2002 : Lionel Jospin refuse d'aller s'asseoir sur les fauteuils rouges de "Vivement dimanche"

Une campagne présidentielle peut-elle basculer sur un non-événement grâce à une émission qui n’a jamais eu lieu et qui n’aura donc jamais marqué les esprits ? C’est la question que se pose aujourd’hui Cyril Lacarrière pour "Réparties de campagne" qui retrace les moments marquants des campagnes présidentielles dans les médias. 

Article rédigé par franceinfo - Cyril Lacarrière
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 2min
20 février 2002. Le Premier ministre Lionel Jospin à la seconde conférence "Villes, territoires et citoyens solidaires" à Paris. Deux mois plus tard, le 21 avril 2002, ce sera la fin de sa carrière politique.  (CHIP HIRES / GAMMA-RAPHO VIA GETTY IMAGES)

Nous sommes en décembre 2001, Lionel Jospin, Premier ministre, cohabite avec Jacques Chirac, président de la République et s’il n’est pas encore officiellement en campagne, il fait figure de favori dans les sondages.

Lionel Jospin ira-t-il sur le divan de Vivement dimanche ? 

Lionel Jospin doit maintenant gagner le cœur des Français, et pour y parvenir, le célèbre publicitaire, Jacques Séguéla, qui travaille à ses côtés, lui souffle une idée : Lionel Jospin avec son épouse sur le divan rouge de Michel Drucker pour une spéciale de Vivement dimanche juste avant Noël... Un programme "passage obligé" pour qui veut ouvrir la porte de son intimité, sauf que Lionel Jospin n’en a pas franchement envie, notre témoin du jour, Jacques Séguéla nous raconte son dilemme. 

"Je vois qu'il tique un peu. Je lui dis mais pourquoi ? Mais parce que je veux être élu pour moi, pour ce que je suis et  pas parce que je suis un couple. Je dis : mais tu dois bien comprendre qu'on ne te demande pas de renier tes convictions, tu répondras ce que tu veux aux questions qu'on va te poser. Il dit écoute : d'accord, il faut que j'en parle à ma femme. Une semaine après, il me dit :

J'en ai parlé à ma femme. Elle n'est pas très partante pour ça. On se donne en spectacle. Je sais bien que tout le monde le fait. Mais justement, je veux être celui qui ne le fait pas.

Le candidat à la présidentielle de 2002, Lionel Jospin à Jacques Séguéla, en décembre 2001

Le communicant ne s’avoue pas vaincu : il rencontre lui-même Sylviane Agacinski, la femme de Lionel Jospin. il parvient à la convaincre. Mais le couple change finalement d’avis : il n’y aura pas de spéciale Vivement dimanche.

Il n'y va pas pour la plus belle chose du monde : par honnêteté, l'honnêteté de ne pas utiliser les travestis de la communication. Il a fait ça pour ses valeurs, pour ses convictions.

Jacques Séguéla, publicitaire

Le coup de tonnerre du 21 avril 2002

"Je crois qu'il a fait ça aussi, ajoute Jacques Séguéla, parce que dans son intransigeance, dans sa vision de la France et du rôle d'un homme politique, dans sa nécessitée de morale, d'éthique, ça le froissait profondément."

On connaît la suite : le coup de tonnerre du 21 avril 2002, et la fin de la carrière politique de Lionel Jospin.

Alors, est-ce que cette élection aurait été différente si le couple Jospin était allé se confier à Michel Drucker ? On ne refera pas l’Histoire. Une chose est certaine, presque 20 ans plus tard, le divan de Michel Drucker demeure, lui, un incontournable des campagnes présidentielles.

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