Tout est politique. "Définir précisément ce qu'est un migrant aujourd'hui sur le sol français" est impossible, selon l'historien Pascal Blanchard
Les invités de "Tout est politique" sont revenus, mercredi 21 février, sur la loi asile et immigration, présentée quelques heures plus tôt en conseil des ministres.
Le ministre de l'Intérieur a défendu son projet de loi sur l'asile et l'immigration, présenté mercredi 21 février en conseil des ministres. Il s'agit d'un texte "totalement équilibré" qui "s'aligne sur le droit européen", a fait valoir Gérard Collomb. Ce projet de loi, très critiqué par les associations et fracture la majorité, vise à réduire à six mois les délais d'instruction de la demande d'asile et à faciliter la reconduite à la frontière pour les déboutés, tout en lançant quelques pistes pour améliorer le séjour des personnes vulnérables.
L'extrait
A-t-on une idée aujourd'hui du nombre de migrants sur le sol français ? La réponse de Pascal Blanchard, historien, documentaliste et spécialiste de l’immigration.
Pascal Blanchard : Si on avait une réponse, on pourrait définir ce qu'est un migrant sur le sol français. Par définition, ça n'existe pas, puisque c'est plusieurs statuts potentiels sur le sol français qui ne sont, ni des étrangers en tant que tel, ni des immigrés en tant que tel, ni des Français encore, ils pourraient être potentiellement bientôt des Français ou pas encore.
Pour définir précisément ce que serait un migrant aujourd'hui en France en termes de chiffres, il faudrait que vous me disiez de quels migrants vous voulez parler. Si vous me demandez combien de gens ont déposé un dossier pour avoir un statut de réfugié en France, ça on sait vous répondre : 115 000 dossiers ont été traités l'année dernière par l'Ofpra [l'Office français de protection des réfugiés et apatrides]. Et on peut même vous dire exactement combien ont été acceptés et combien, refusés parce que, là, on entre dans les statistiques très précises. Ils ont pu aller jusqu'à déposer un dossier, donc ils ont entrés dans un monde statistique (...)
L'immigration, c'est comme tout sujet : on ne sait jamais de quoi on parle quand on en parle. Il y a des statuts totalement différents. Justement, c'est ce qui fait une politique publique, c'est que chaque statut ou non statut, correspond, soit à des manquements dans la loi, soit à des complexités entre l'Europe et la France... Quand on nous parle des "dublinés", je peux vous dire qu'avant que quelqu'un comprenne ce qu'est un "dubliné"... C'est quelqu'un qui a laissé une empreinte digitale dans le pays où il est rentré. Ce qui fait que, dans le pays où il demande un statut, par définition, il risque un jour de se retrouver à la "case départ" qui ne sera pas en vérité une "case départ", mais une "case retour" pour repartir quelque part. En gros, autant vous dire que ça fait des petits "Calais" pour les prochaines années.
Les invités
Thierry Kuhn, président d'Emmaüs France
Pascal Blanchard, historien, documentaliste et spécialiste de l’immigration
David Assouline, sénateur socialiste de Paris, historien, spécialiste de l’histoire de l’immigration
Constance Le Grip, députée Les Républicains des Hauts-de-Seine
François-Michel Lambert, député La République en marche des Bouches-du-Rhône
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