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Sucre : les betteraviers broient du noir

Après la crise du porc, celle du lait, et si dans 18 mois on avait une crise du sucre ? C’est ce que semblent craindre les betteraviers européens, qui tirent la sonnette d’alarme car eux aussi, comme les producteurs laitiers, vont devoir faire face à la fin des quotas.
Article rédigé par Lise Jolly
Radio France
Publié Mis à jour
  (Champ de betterave sucrière © Kingan / Fotolia)

On se rappelle ce qui s’est passé dans le secteur laitier : les quotas prévus par la politique agricole commune limitaient la production et permettaient aux prix de ne pas s’effondrer, surtout dans un secteur de concurrence internationale. Leur fin a déclenché la crise du lait que l’on connaît encore. Dans le domaine du sucre, c’est à dire de la production de betteraves essentiellement, il y a aussi des quotas. Et comme pour le lait, la nouvelle politique agricole commune libéralise le secteur et  prévoit qu’ils prennent fin dans 18 mois, c’est-à-dire en octobre 2017. Avec une conséquence, les sucriers européens vont vouloir produire davantage pour exporter, ce qui leur a été longtemps interdit. Les betteraviers qui les fournissent vont devoir planter plus mais n’auront plus de prix garantis pour la betterave. En Europe, entre betteraviers et industriels, on est donc en pleines tractations.

Trop de sucre sur les marchés 

Après un déficit il y a quelques années, il y a maintenant  trop de sucre sur le marché, des stocks importants qui ont fait chuter les prix au niveau mondial. L’Europe, troisième pays producteur derrière le Brésil et l’Inde, avait le filet de la PAC pour garantir ses prix. L’an prochain, c’est donc fini. Mais le marché s’est apuré depuis peu et le sucre produit ne suffit pas à faire face à la demande car la canne à sucre brésilienne sert de plus en plus à fabriquer de l’éthanol, la Chine stocke et a de plus en plus de besoins à combler et l’Europe a assaini son marché. Tout ça pourrait contribuer à faire remonter pour un temps un cours du sucre qui a chuté de moitié en trois ans.

Ça commence tout doucement, mais au Brésil, l’effondrement du real stimule les exportations et peut encore ré-inverser cette courbe. En résumé, le marché inquiète les planteurs de betteraves et la betterave, qui vient surtout d’Europe, c’est 20 % de la production de sucre mondiale. La France en est le premier producteur devant l’Allemagne et la Pologne.

Crise ou pas crise ?

On espère que non, puisque les discussions entre industriels et planteurs ont déjà commencé 18 mois avant la fin des quotas, que la filière s’est réorganisée, qu’elle a allongé les campagnes betteravières, que les exportations hors UE devraient croître.

Cinq des 30 sucreries françaises ont été par exemple fermées. Mais la concurrence est rude. Ce qui sauve c’est la demande, en éthanol mais pas seulement, la consommation des ménages augmente aussi.

Quelques chiffres pour vous donner une idée

On a consommé en 2010 dans le monde, 166 millions de tonnes de sucre, soit 20 kg par personne et par an, ou encore 5 260 kg et 70 kg chaque seconde rien que pour la France. Cette demande diminue dans les pays industrialisés mais elle est en augmentation dans les pays en développement. Donc, les betteraviers ont encore de beaux jours devant eux, ils peuvent aussi plus facilement se reconvertir que les éleveurs en plantant autre chose que des betteraves. En ce moment, ils essaient d’obtenir que les sucreries continuent de leur verser 44 % du prix du sucre, car "un tiens vaut mieux que deux tu l’auras ". Surtout dans un marché fluctuant.

 

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