Libye, entre coûts de la guerre et bénéfices de la reconstruction
C’est une autre facette de cette actualité… vous avez raison… mais attention de ne pas tomber dans l’amalgame. Objectivement, il serait imprécis – pour ne pas dire malhonnête – de comparer les sommes dépensées par les forces armées occidentales (à fortiori les troupes françaises) avec ce que d’aucuns appellent déjà les « bénéfices » de la guerre… je veux évidemment parler des mirifiques contrats que nos entreprises s’apprêtent à signer pour reconstruire le pays. Le raccourci est tentant mais, économiquement, ne tient pas : jusqu’à preuve du contraire, les « marchands d’armes » n’ont pas de filiales destinées à reconstruire les écoles, les routes ou les bâtiments qu’ils ont détruit au préalable. Encore une fois : attention au mélange des genres dont se délectent les meilleurs populistes de tous bords… l’économie leur offre, malheureusement, parfois, un beau terrain de jeu.
Cela n’empêche pas de faire un bilan… d’abord, combien aura coûté notre engagement militaire en Libye ?
Si je vous dis que les chiffres prêtent à polémique, cela ne vous étonnera pas ! 950 bombes, 430 missiles HOT, 240 missiles air-sol… quelque 1500 roquettes et 3000 obus… le tout pour 320 millions d’euros selon le chiffre officiel communiqué par le ministère de la Défense courant septembre. Chiffre revu à la hausse en octobre par le chef d’Etat major des Armées à 430 millions… si la guerre se poursuivait jusqu’en décembre ! Or, elle est censée s’être arrêté hier avec la mort de Kadhafi. 430 millions d’euros officiellement… pour information : le budget français annuel de la défense s’élève à 31 milliards d’euros. Par contre, personne ne le cache : il va falloir regonfler nos stocks d’armes.
Et la reconstruction de la Libye ?... combien peut-on en attendre ?
Encore une fois : comparaison n’est pas raison… mais les ordres de grandeur n’ont rien à voir. On parle d’un marché potentiel de 130 milliards de dollars à se partager… les quelque 80 chefs d’entreprises français qui ont fait le déplacement de Tripoli la semaine dernière avec le secrétaire d’Etat au Commerce extérieur Pierre LELLOUCHE, ont pu mesurer l’ampleur du chantier. Dans le cadre de la reconstruction, le secteur du bâtiment a évidemment sa carte à jouer… l’avenir du tourisme local en dépend beaucoup (les paysages libyens sont très prisés par les amoureux de l'aventure et les tour-opérateurs sont déjà à l'affut)... sinon, il y a bien sûr le pétrole et le gaz qui sont les premiers leviers de croissance du pays. La Libye : eldorado pour investisseurs… selon l'OCDE, l'économie libyenne connaîtra cette année une récession proche de 20% avant de retrouver le chemin de la croissance en 2012... aujourd'hui, le pays n’est endetté qu’à hauteur de 3,3% du PIB.
Mais les investisseurs ne devront pas être dupes des capacités du Conseil National de Transition au pouvoir à surmonter ses divisions et à investir lui-même dans la démocratie… les droits humains valent plus que tous les milliards de dollars dépensés en armements ou en investissements.
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