80 ans du Débarquement : pas invité, Vladimir Poutine fixe ses propres règles

Le chef du Kremlin n'a pas été invité aux commémorations et endosse le rôle de victime. Il justifie ainsi sa volonté de contourner les sanctions économiques. Il assume désormais sa volonté d’armer tous les États susceptibles de menacer les intérêts occidentaux.
Article rédigé par Olivier Poujade
Radio France
Publié
Temps de lecture : 4min
Le président russe Vladimir Poutine lors d'une conférence de presse à Novo-Ogaryovo, en Russie, le 18 décembre 2022. (MIKHAIL METZEL / POOL / AFP)

Vladimir Poutine observe de loin les commémorations des 80 ans du Débarquement, c'est le grand absent du jour. Il y a dix ans, le chef d’État russe avait été convié pour l’inciter à négocier avec l’Ukraine quelques semaines après l’annexion de la Crimée. Aujourd’hui, c’est impossible. Vladimir Poutine est infréquentable aux yeux des dirigeants occidentaux. Comme d’habitude, le chef du Kremlin en tire ses propres conclusions, celles qui lui permettent d’endosser le rôle de la victime. Il a menacé mercredi 5 juin 2024 de livrer des armes à des pays tiers susceptibles de frapper les intérêts occidentaux.

Vladimir Poutine serait traité comme un paria par des leaders occidentaux qui cherchent à réécrire l’Histoire, à gommer le sacrifice des soldats soviétiques. L’URSS, dont Vladimir Poutine revendique l’héritage, comptabilise le plus grand nombre de morts dans cette campagne de libération de l’Europe. Aujourd’hui, les alliés occidentaux veulent isoler la Russie. Vladimir Poutine prend acte de cette décision : "Tant pis qu’ils célèbrent sans nous, ça ne nous fera pas de mal". Le chef du Kremlin assumait mercredi devant la presse le fait de vouloir désormais suivre son propre chemin.

Contourner les sanctions économiques

Vladimir Poutine a les moyens de garantir la survie d’un pays placé sous sanctions économiques et c’est précisément ce qu’il est en train de faire. Quand il insiste sur cette injuste mise à l’écart par les Occidentaux, il justifie aussi sa volonté de s’affranchir des règles qu’ils ont fixées. L’erreur des Américains et des Européens est de penser que Moscou est isolée dans ce projet dissident. Même si on explique aujourd’hui que l’économie russe est en surchauffe, à court terme, Vladimir Poutine est arrivé à trouver suffisamment d’alliés pour mettre en place un système de contournement des sanctions.

Un système qu’ont intégré un certain nombre d’États. Par exemple, des dizaines de navires fantômes sillonnent les océans pour écouler la production de gaz et de pétrole russe. La Russie continue de commercer avec l’Iran, la Corée du Nord et l’Inde. Des accords ont été trouvés avec la Chine, un peu trop d’ailleurs, ce qui pourrait poser à terme des problèmes de dépendance de Moscou vis-à-vis de Pékin. Le Kremlin a aussi récupéré les activités de Wagner dans plusieurs pays africains, des compétences militaires en échange d’autorisations pour extraire de l’or, des diamants, des métaux rares. La Russie explore des voies alternatives, illégales même. Pour Vladimir Poutine, c’est la faute des Occidentaux, la conséquence des mesures prises pour isoler son pays.

30% du budget consacré à la défense

La Russie mise aussi beaucoup désormais sur son économie de guerre. C’est probablement ce qu’il y a de plus inquiétant dans la trajectoire déviante de Vladimir Poutine. L’État russe consacre désormais 30% de son budget au secteur de la défense, tous les autres domaines ont été délaissés au profit de l’armement. La diplomatie russe enchaîne les tournées en Afrique, en Amérique latine, et elle se rapproche des régimes anti ou faussement démocratiques. Vladimir Poutine considère que les Occidentaux l’ont mis sur la touche, il fixe donc ses propres règles. Il assume sa volonté d’armer tous les États susceptibles de menacer les intérêts occidentaux. Tout indique aujourd’hui que ce projet est à prendre au sérieux.

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