Le président américain Joe Biden touche du doigt la vie à Kiev
Joe Biden et Volodymyr Zelensky, bras dessus bras dessous, marchant quelques minutes, en plein cœur de Kiev, devant le mémorial des martyrs de la guerre. C’est une image emblématique, dont rêvait sans doute la présidence ukrainienne depuis un moment. Sa portée frappe d’autant plus les esprits que cette visite est donc intervenue par surprise, sous un beau soleil en fin de matinée lundi 20 février au matin.
Les deux présidents sont passés ensemble devant le célèbre monastère Saint-Michel-du-Dôme-d’Or, l’un des plus célèbres et somptueux de la capitale. Joe Biden avait d’ailleurs chaussé ses lunettes d’aviateur fétiches, pour l’occasion et une cravate jaune et bleu aux couleurs de l’Ukraine.
Une visite avec plusieurs messages envoyés
La visite du président américain a duré moins de trois heures, mais elle envoie de multiples messages, un an tout juste après le début de la guerre. Un message d’abord évidemment aux Ukrainiens : les États-Unis se tiennent à vos côtés, et s’y tiendront, "as long as it takes", aussi longtemps que nécessaire. Le président américain l’a réaffirmé lors d’une brève allocution au palais présidentiel Mariyinsky, tout en rendant hommage "à l’héroïsme des Ukrainiens".
C’est un message ensuite, et peut-être surtout, à Vladimir Poutine. Une façon de lui couper l’herbe sous le pied, puisque le président russe doit prononcer un discours mardi en fin de matinée. C'est une manière de signifier au maître du Kremlin que Washington est résolu à obtenir la victoire de l’Ukraine.
Cette visite est aussi un message envoyé aux démocraties occidentales, une façon pour Joe Biden de réaffirmer son intention de se poser en "leader du monde libre". La date d’aujourd’hui, le 20 février, ne doit rien au hasard : c’est aussi le jour où les Ukrainiens commémorent la répression de la place Maïdan en 2014, l’esprit de liberté et le renversement du président pro-russe Viktor Ianoukovitch.
Enfin, c’est un message aux électeurs américains : une façon de leur dire "Regardez, je suis en pleine forme, et je n’hésite pas à courir le risque de me rendre dans la capitale d’un pays en guerre". Le président Joe Biden, à qui l’on prête l’intention de briguer un second mandat malgré son âge, veut donc montrer qu’il n’a pas l’âge de ses artères !
Lors de cette visite, le président américain a pu toucher du doigt ce qu’est le quotidien des habitants de Kiev, entre menace militaire russe et volonté de mener une vie normale. À l’instant même où Joe Biden faisait sa première apparition publique dans le centre de Kiev, à côté du monastère, les sirènes d’alerte anti-aérienne retentissaient dans la capitale, comme pour faire comprendre au président américain la réalité du quotidien à Kiev et l’alerte n’a été formellement levée qu’une heure plus tard.
Un nouveau contrat pour des livraisons d'armes
Cette alerte n'a pas empêché Joe Biden, en pleine alerte, d’effectuer une courte marche avec Volodymyr Zelensky le long du mur mémorial au souvenir des victimes de la guerre depuis 2014 et l’invasion de la Crimée et ça n’a pas empêché, non plus, les Ukrainiens de continuer à vaquer à leurs occupations. Ils sont désormais habitués à ces alertes quotidiennes ou multi-quotidiennes et pour la plupart d’entre eux, ils ne prennent plus le soin de se réfugier dans les abris. Ils continuent leur vie.
Cet épisode est aussi venu confirmer au président américain quel est le besoin prioritaire des Ukrainiens : des munitions et surtout toute la panoplie des défenses anti-aériennes pour abattre les missiles et les drones lancés par la Russie. Joe Biden a promis un nouveau plan d’armement, avec en priorité des radars anti-aériens et des munitions. L’Ukraine cherche à constituer de véritables dômes de défense, à Kiev et dans les principales villes, un peu à l’image de ce qu’a constitué Israël.
La vie reprend dès le départ de Joe Biden
À Kiev, dès le président américain reparti, la vie a encore plus repris ses droits, il y a une volonté dans la capitale ukrainienne de mener la vie la plus normale possible, comme un défi à la Russie. Dès le passage de Joe Biden achevé, les barrières qui limitaient l’accès au centre de Kiev ont été levées, le trafic automobile a donc redémarré, avec les bouchons habituels du centre, les cafés et restaurants ouverts jusqu’à 23 h, l'heure du couvre-feu.
Même si certaines entreprises ont fermé, tout ou presque fonctionne : les écoles, les hôpitaux, les commerces en tout genre, jusqu’aux salons de tatouage où les Ukrainiens se font volontiers tatouer le mot "volya", comprenez "volonté" ou "liberté". Le drapeau ukrainien flotte sur de nombreux bâtiments, il y a quelques militaires dans les rues et encore de temps à autre une brève coupure de courant, mais sinon rien de bien visible à l’œil nu : la vie a vraiment repris ses droits.
À la gare de Kiev ce matin, là où est arrivé Joe Biden, sans doute par train spécial, il y avait même des groupes de vacanciers, snowboard sous le bras, qui rentraient du ski dans les stations ukrainiennes des Carpathes dans le Sud du pays. Ça parait étonnant, mais c’est ça aussi Kiev aujourd’hui : une grande ville qui entend défier Vladimir Poutine en affirmant son mode de vie occidentalisé.
Commentaires
Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.