Burkina Faso : deux enquêtes démontrent l'implication de l'armée dans le drame de Karma
Les témoignages retenus ne laissent pas de place au doute. En fait la seule incertitude qui reste est celle du nombre de morts, une soixantaine si l'on en croit les autorités Burkinabés, au moins 147 dont 45 enfants pour les deux ONG et 156 au total puisque d'autres tueries auraient eu lieu dans les alentours au même moment.
Pour faire leurs enquêtes, sur le massacre survenu dans la commune de Karma dans le nord du Burkina Faso, le 20 avril dernier, les ONG ont interrogés des habitants du village de Karma, mais aussi des rescapés ou encore des organisations de la société civile de la région. Les témoignages recueillis, mais aussi certaines preuves apportées pointent du doigts l'armée et écarteraient toute hypothèse de manipulation, comme celle de jihadistes déguisés en militaires. "La responsabilité de l'armée est claire et nette, insiste Ousmane Diallo, enquêteur pour Amnesty International. Il n'y a absolument aucun doute. Au-delà des témoignages, il y a des photos assez évidentes." Pas de doute pour Amnesty et pas de doute non plus pour Human Rights qui rapporte les mêmes faits, les mêmes atrocités et qui met en accusation de la même façon, l'armée du pays jugée responsable des faits qui se sont déroulés à Karma.
Une opération de représailles
Pourquoi l'armée a-t-elle tué sa population ? Karma se trouve dans le nord du pays et des zones entières sont aux mains des jihadistes. Une semaine plus tôt, à 17 km de Karma, une attaque terroriste a eu lieu faisant des morts chez les militaires. Le 20 avril, il s'agissait donc pour l'armée de représailles contre des villageois suspectés d'être complices des jihadistes comme l'explique Ilaria Allegrozzi, qui a mené l'enquête pour Human Rights watch. "Les populations qui habitent dans cette zone sont prises entre deux feux entre les attaques des groupes islamistes armés et les opérations de contre-terrosrisme qui souvent engendrent des abus de la part des forces de sécurité burkinabés", souligne cette enquêtrice.
Des villageois piégés et un pays le Burkina qui s'enfonce dans une sorte de guerre civile comme le disait l'ancien ambassadeur de France à Ouagadougou. En attendant, une enquête a été ouverte sur place par le procureur de la région mais ce n'est pas suffisant estiment les ONG qui attendent l'ouverture d'une enquête internationale de l'Union africaine ou encore de la Commission des droits de l'homme des Nations unis.
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