Paris 2024 : aux JO de 1980, le bras d'honneur d'un athlète polonais au pouvoir soviétique

Les Jeux se déroulent à Moscou, pendant la guerre froide. La course d’élan du Polonais est impeccable, il bat son rival russe et défie le pouvoir soviétique avec un geste de la main. Sans en avoir conscience, Władysław Kozakiewicz vient de participer à l’émancipation de la Pologne vis-à-vis de l’Union soviétique.
Article rédigé par franceinfo
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L'athlète polonais Władysław Kozakiewicz, après avoir remporté la médaille d'or en saut à la perche aux Jeux olympiques de 1980 à Moscou. (JEAN-CLAUDE DELMAS / AFP)

À l’approche de la cérémonie d’ouverture des JO Paris 2024, retour sur l’année 1980. Les Jeux ont lieu à Moscou, en pleine guerre froide. Au concours du saut à la perche, pas de surprise, c’est l’un des favoris qui s’impose : le Polonais Władysław Kozakiewicz. Pourtant, les images de ce saut à 5,78 mètres vont faire le tour des télévisions du monde entier, sauf celles des pays du bloc soviétique.

Nous sommes au cœur de l’été moscovite, sur la piste du monumental stade central Lenine. La course d’élan de Władysław Kozakiewicz est impeccable. Sa technique est parfaitement maîtrisée, tout autant que le bras d’honneur, que le Polonais adresse au public moscovite, dans la seconde qui suit sa réception sur le tapis. Władysław Kozakiewicz vient de battre le record du monde et de gagner son duel avec le perchiste russe Kostantin Volkov. Il vient aussi de faire taire les sifflets stridents qui ont accompagné chacun de ses sauts, tout au long du concours.

"La première brèche" dans le pacte de Varsovie

Impossible pour Moscou de rester les bras croisés face à un tel affront. Très vite, l’ambassadeur d’URSS en Pologne demande officiellement au Comité international olympique que la médaille d’or de Władysław Kozakiewicz lui soit retirée sur-le-champ pour "insulte au peuple soviétique". Le gouvernement polonais fait mine de ne pas comprendre et affirme que ce geste était la conséquence d’un "spasme musculaire". Moscou n’obtiendra pas gain de cause.

Sans en avoir conscience, Władysław Kozakiewicz vient de participer à l’émancipation de la Pologne vis-à-vis de l’Union soviétique. Ce que les historiens appellent "la première brèche" dans le pacte de Varsovie. Car, au même moment, en Pologne, Lech Walesa, ouvrier électricien des chantiers navals Lenine, parvient à créer Solidarnosc, le premier syndicat libre du monde communiste. Le bras d’honneur du perchiste devient alors un symbole d’affranchissement. Władysław Kozakiewicz devient "Koza", une figure héroïque qui ne cessera de payer les conséquences de son geste. Disqualifications abusives, suppression de passeport, l’athlète finira par prendre la nationalité allemande. Les autorités polonaises s’en prennent aussi à son père, exproprié et interdit d’accès à ses comptes bancaires. Kozakiewicz père et fils finiront par s’installer en Allemagne de l’Ouest et ne retrouveront la Pologne qu’après la chute du mur de Berlin en 1989.

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