Français du monde. Les oubliés de la vallée de Katmandou
Ils sont quelques dizaines de Français à vivre du tourisme dans ce secteur habituellement très fréquenté du Népal. Mais le secteur est exsangue et les frontières du pays sont toujours fermées aux vacanciers étrangers. Certains ont déjà tout perdu comme cette restauratrice de Katmandou.
On y cuisine, dit-on, le meilleur lapin à la moutarde de toute la ville. Mais aujourd'hui, la tendance, dans le restaurant de Caroline Sengupta, ce serait plutôt la soupe à la grimace.
Il y a quelques mois encore, avant le Covid, son établissement, plutôt haut de gamme, était fréquenté par une clientèle aisée : un tiers de locaux et deux tiers d'étrangers. Elle s'est désormais réduite à peau de chagrin. "Il n'y a plus de touristes, témoigne-t-elle, et toutes les familles expatriées sont rentrées suite à l'épidémie. Ne restent que les gens en poste sans leur famille. Quant aux Népalais qui ont les moyens d'aller au restaurant, ils n'ont pas vraiment envie de s'exposer. Ils se protègent et sortent très peu."
Guides, hôteliers, restaurateurs… en grande difficulté
Une quarantaine de Français, dont l'activité est liée au tourisme, sont dans cette situation de grande difficulté dans la vallée de Katmandou, et personne n'imagine vraiment le bout du tunnel : "Quand on vit à huit dans une chambre de 12 ou 15m2, je ne vois pas comment on ne se contamine pas les uns les autres. C'est ça le problème, c'est comme pour tous les pays pauvres : les gens sont entassés les uns sur les autres et forcément, ils se contaminent."
Caroline Sengupta a passé plus de la moitié de sa vie au Népal. Rentrée en France pour une urgence début mars, elle n'a toujours pas pu revenir à Katmandou à cause d'un problème de passeport.
Quarante ans de vie
Ruinée mais pas abattue, le mois dernier elle s'est résolue à mettre en vente son restaurant : "Je n'ai plus de réserve ! Presque huit mois à perdre de l'argent, il y a un moment où tout ce que j'avais mis de côté est parti."
Cinq ans après les séismes dévastateurs de 2015, la crise du Covid-19 met à mal un système déjà fragile : "La structure hospitalière est privée et elle est très mauvaise, très pauvre. Il y a peu d'hôpitaux dans la vallée de Katmandou et peu de lits de réanimation valables."
Désormais confinée, la Française se tient informée grâce à l'équipe de son restaurant, resté ouvert à Katmandou, et brûle de rentrer à Katmandou. "J'attends que ça rouvre pour repartir, et qu'il y ait moins de cas, j'ai quand même 70 ans. On n'a pas le choix, je prends mon mal en patience et j'attends. Je loue une maison, j'ai mes affaires, on ne tire pas un trait sur 40 ans de vie comme ça ! Et peut-être que je ne vais pas tirer un trait. Je suis comme tout le monde, dans l'expectative. Difficile de savoir ce qu'il va se passer dans deux mois."
Officiellement, le Népal a déclaré un millier de décès dus au Covid, sur une population d'environ 30 millions d'habitants. Chacun scrute ici la courbe de l'épidémie, en particulier ces jours-ci, où se termine le festival Dashain, la plus grande fête du Népal, synonyme de retrouvailles en famille, et donc de risques de contaminations supplémentaires.
Lui écrire : carolinedsengupta@gmail.com
Aller plus loin
Son restaurant Chez Caroline
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