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Roland-Garros 2023 : Vondrousova, Krejcikova, Muchova... Pourquoi tant de surprises en finale du tableau féminin ?

La Tchèque Karolina Muchova, 43e mondiale, est devenue la cinquième joueuse non-tête de série à se qualifier pour la finale du Grand Chelem parisien sur les sept dernières éditions.
Article rédigé par Gabriel Joly, franceinfo: sport - A Roland-Garros
France Télévisions - Rédaction Sport
Publié
Temps de lecture : 5min
La Tchèque Karolina Muchova lors de sa victoire renversante contre la Biélorusse Aryna Sabalenka en demi-finale de Roland-Garros, le 8 juin 2023. (ROBERT SZANISZLO / AFP)

Une décennie. C'est le temps qu'il faut remonter pour trouver la trace de la dernière finale entre les deux premières têtes de série du tournoi féminin à Roland-Garros. En 2013, l'Américaine Serena Williams, patronne du circuit, l'avait emporté face à sa dauphine, la Russe Maria Sharapova. Depuis, pas moins de huit vainqueures différentes se sont succédées. Et si la Polonaise Iga Swiatek brigue une troisième couronne, samedi 10 juin, la présence de la 43e joueuse mondiale, en la personne de Karolina Muchova, souligne une fois encore la singularité du circuit féminin.

Avec la qualification de la Tchèque, cinq des sept dernières affiches de la finale du tournoi de la porte d'Auteuil ont mis aux prises une joueuse non-tête de série. Pour trois victoires. Si Marketa Vondrousova s'est inclinée en 2018 (38e mondiale), Jelena Ostapenko en 2017 (47e), Iga Swiatek pour son premier sacre en 2020 (54e), et Babora Krejcikova en 2021 (33e), l'ont emporté. Mais comment expliquer un tel phénomène ?

Des matchs en trois sets et pas en cinq

En comparaison avec l'ATP, largement dominé par le Big 3 (Nadal, Federer et Djokovic) lors de la dernière décennie, le circuit féminin semble en effet plus propice à l'apparition ponctuelle de joueuses inconnues du grand public. "Chez les hommes, les matchs en cinq sets favorisent les meilleurs tennismen. Prenez l'exemple de Novak Djokovic, il va être plus fort à mesure que le match s'étire dans la durée. Comme le match dure, il faut être présent physiquement mais surtout mentalement plus longtemps. Les autres ne sont pas habitués à jouer à ce niveau et cette intensité sur cinq sets", détaille Mary Pierce, dernière vainqueure française de Roland-Garros en 2000. "Si les filles jouaient aussi en cinq sets, on n'aurait probablement pas eu autant de surprises", affirme même la consultante France Télévisions.

1/2 finale : le résumé de Karolina Muchova - Aryna Sabalenka

La terre battue, une surface particulière

Mais pour Mary Pierce, la principale raison qui explique la présence de non-têtes de série en finale tient surtout à la surface du tournoi parisien. "Il n'y a pas beaucoup de joueuses qui aiment et s'entraînent sur terre battue donc celles qui le font ont forcément un grand avantage. Ici, la balle rebondit plus haut, le jeu est plus lent. Physiquement, il faut tenir dans des échanges qui sont plus longs que sur gazon ou sur dur, analyse-t-elle. Moi, je m'entraînais toute l'année dessus et cela m'aidait beaucoup pour les déplacements. Sur les autres surfaces, on ne glisse pas autant donc cela permet un jeu bien plus spécifique, avec plus de lift." 

Justement, depuis 2017, il n'y a jamais eu autant de joueuses hors du top 32 mondial en finale d'un Grand Chelem qu'à Roland-Garros : seulement à l'US Open avec une Victoria Azarenka de retour après une pause pour raisons personnelles en 2020, et la surprenante affiche entre Leylah Fernandez et Emma Raducanu en 2021.

Trop jeunes pour occuper le trône mondial

Depuis le départ en congé maternité de Serena Williams après son 23e titre en Majeur, le circuit WTA s'est par ailleurs cherché sa nouvelle reine. Plusieurs candidates au trône ont postulé mais peu sont restées assez longtemps pour régner. Ex-numéros 1 mondiales, la Japonaise Naomi Osaka et l'Australienne Ashleigh Barty se sont tour à tour mises en retrait du tennis pour des raisons de santé mentale.

Résultat, de jeunes pousses ont émergé et se sont adjugés quelques tournois du Grand Chelem mais rares sont celles qui ont confirmé à ce niveau à l'image de Marketa Vondrousova ou Jelena Ostapenko. "À mon sens, ce manque de régularité s'explique par la quantité de distractions en dehors du court. Quand on est jeunes, on s'éparpille plus facilement après un bon résultat, atteste Mary Pierce. L'une des seules pépites à avoir perduré depuis son premier sacre, c'est Iga Swiatek. Elle reste concentrée sur son tennis, elle dit non à beaucoup de sollicitations externes et c'est là que se fait la différence".

La valse des entraîneurs

Autre explication avancée : l'instabilité dans les box des joueuses. Pour Patrick Mouratoglou, l'ancien coach de Serena Williams, "il y a un lien direct entre les performances et le fait de rester longtemps avec un coach sur un même projet". "Peut-être que les joueuses changent parfois trop en fonction des résultats négatifs, juge également Mary Pierce. Même si un changement peut amener un déclic, souvent mieux vaut donner plus de temps à son coach".

"C'est un fait sur le circuit WTA, les joueuses changent très souvent d'entraîneur. Pour atteindre un haut niveau et y rester, il faut de la constance jour après jour. Il est important de comprendre qu'à chaque fois que vous changez de coach, il arrive avec de nouvelles idées et vous repartez à zéro, décryptait l'actuel entraîneur de la Roumaine Simona Halep en 2020 sur le site Tennis Majors. Si vous changez trop souvent, à un moment donné, vous ne savez plus quoi penser car trop de visions différentes se confrontent". Un message que Karolina Muchova semble avoir compris. La Tchèque est depuis trois ans sous la houlette de David Kotyza, resté aux côtés de Petra Kvitova entre 2008 et 2016. Reste à savoir si cela lui permettra de briller face à Iga Swiatek pour décrocher son premier titre Majeur.

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