Nobel de médecine : la lutte contre les parasites à l'honneur
"Cette année, lauréats du prix Nobel ont développé des thérapies qui ont révolutionné le traitement de certaines maladies parasitaires parmi les plus dévastatrices", a déclaré l’Assemblée Nobel, à l'Institut Karolinska.
"William C. Campbell et Satoshi Ōmura ont découvert un nouveau médicament, l’avermectine, dont les dérivés ont drastiquement réduit l'incidence de la « cécité des rivières » (onchocercose, NDLR) et de la filariose lymphatique, [et] qui se révèle efficace contre un nombre croissant d'autres maladies parasitaires."
De son côté, "Youyou Tu a découvert l’artémisinine, un médicament qui a considérablement réduit les taux de mortalité pour les patients souffrant de paludisme."
"Ces deux découvertes ont fourni l'humanité de nouveaux moyens, puissants, pour lutter contre ces maladies débilitantes qui touchent des centaines de millions de personnes chaque année", poursuit l'Académie Nobel. "Les conséquences en termes d'amélioration de la santé humaine et de réduction de la souffrance sont incommensurables."
L'artemisinine
Le paludisme a longtemps été exclusivement traité par la chloroquine ou la quinine, avec des succès variables. A la fin des années 1960, des expériences sur l’animal suggéraient qu’un extrait de l’armoise annuelle (Artemisia annua) pouvait être un candidat intéressant contre le paludisme.
L’équipe de la chercheuse chinoise Youyou Tu a été la première à extraire (et isoler de façon stable) l’une des molécules actives de la plante – l’artémisinine – puis à démontrer son efficacité sur le parasite responsable du paludisme, à la fois chez les animaux infectés et chez les humains. "L’artémisinine représente une nouvelle classe d'agents antipaludiques qui tuent rapidement les parasites du paludisme à un stade précoce de leur développement", souligne l’Académie Nobel, "ce qui explique sa puissance sans précédent dans le traitement du paludisme grave".
Les avermectines
Satoshi Ōmura a isolé des souches microbiennes (streptomyces ) en provenance du sol, et a identifié une cinquantaine de cultures susceptibles de produire des substances d’intérêt thérapeutique. Parmi elles se trouvaient l’espèce Streptomyces avermitilis.
William C. Campbell, expert en biologie parasitaire, a ultérieurement acquis les cultures de Streptomyces avermitilis, et démontré que l’un des composés sécrétés par cette bactérie était particulièrement efficace contre l’infection parasitaire chez les animaux domestiques et d'élevage. L'agent actif, purifié, a été nommé avermectine. Il a ensuite été modifié chimiquement pour produire l’ivermectine, plus efficace. L'ivermectine a plus tard démontré son efficacité sur l’homme.
D’autres dérivés de l’avermectine (sélamectine, doramectine, abamectine) présentent un important intérêt thérapeutique. Les avermectines interagissent avec le système nerveux des parasites, et les paralysent.
Voici la liste des lauréats du Nobel de Médecine des dix années précédentes :
2014 : John O'Keefe (États-Unis/Grande-Bretagne) et May-Britt et Edvard Moser (Norvège), pour leurs recherches sur le "GPS interne" du cerveau, qui pourrait permettre des avancées dans la connaissance de la maladie d'Alzheimer
2013 : James Rothman, Randy Schekman et Thomas Südhof (États-Unis), pour leurs découvertes sur les transports intracellulaires, qui font mieux connaître des maladies comme le diabète
2012 : Shinya Yamanaka (Japon) et John Gurdon (Grande-Bretagne), pour leurs travaux sur la réversibilité des cellules souches, qui permet de créer tous types de tissus du corps humain
2011: Bruce Beutler (États-Unis), Jules Hoffmann (France) et Ralph Steinman (Canada), pour leur recherche sur le système immunitaire qui permet à l'organisme humain de se défendre contre les infections, favorisant la vaccination et la lutte contre des maladies comme le cancer
2010: Robert Edwards (Grande-Bretagne), le père des bébés éprouvette
2009 : Elizabeth Blackburn (Australie/États-Unis), Carol Greider et Jack Szostak (États-Unis), pour leurs découvertes sur les mécanismes de la vie et leurs applications dans la lutte contre le vieillissement
2008 : Harald zur Hausen (Allemagne), Françoise Barré-Sinoussi et Luc Montagnier (France) pour leurs travaux sur le cancer et le sida
2007 : Mario Capecchi (États-Unis), Oliver Smithies (États-Unis) et Martin Evans (Grande-Bretagne), grâce à la création de souris transgéniques qui ont ouvert un nouvel horizon à la recherche sur des maladies comme Alzheimer ou le cancer
2006 : Andrew Fire et Craig Mello (États-Unis), pour leurs recherches sur les gènes nocifs, et les traitements à mettre en place pour les "réduire au silence"
2005 : Barry Marshall et Robin Warren (Australie) pour avoir percé le mystère des ulcères.
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