Santé : "Je prêchais dans le désert, maintenant le désert médical est là", déplore un médecin de la Creuse
À 68 ans, il est submergé par les demandes de soins. Il va évoquer le problème lundi avec Emmanuel Macron et Olivier Véran lors d'une table ronde.
"La médecine libérale, la médecine générale est un peu un parent pauvre à l'heure actuelle en France, et un peu oubliée", juge le docteur Claude Landos, médecin généraliste à La Celle-Dunoise, dans la Creuse, lundi 24 janvier sur franceinfo. Il a 68 ans et est submergé par les demandes de soins. Il va évoquer le problème avec Emmanuel Macron et Olivier Véran lors d'une table ronde organisée dans la journée. Plus de 15 millions de Français vivent aujourd'hui dans un désert médical.
franceinfo : À quoi ressemble aujourd'hui votre quotidien ? Votre journée de médecin, elle ressemble à quoi ?
Claude Landos : Ma journée de médecin, c'est la course toute la journée. Je commence à neuf heures du matin. Après un petit débriefing avec la secrétaire, c’est les visites et les consultations. Je suis dans une maison de santé pluriprofessionnelle, ce qui permet de travailler à deux médecins. Cela permet de faire l’un les visites, l'autre les consultations ou l'inverse. Donc, ça permet une amplitude horaire très importante jusque neuf heures du soir.
Combien de patients suivez-vous ? De combien de patients êtes-vous le médecin traitant ?
Je dirais aux alentours de 1 200 patients. Un nombre de patients qui a augmenté de 200 à peu près en l'espace d'une année. Parce que les collègues partant à la retraite, il fallait essayer de répondre et ça devient de plus en plus difficile.
"Il y a une vingtaine d'années, je commençais à m'inquiéter et j'ai commencé à alerter les collectivités, le département, l’ARS et autres par rapport à ce phénomène qui allait en s'amplifiant vu qu'il y avait très peu d'arrivées et on était tous à peu près dans les mêmes âges."
Claude Landos, médecin généraliste dans la Creuseà franceinfo
Je prêchais dans le désert, maintenant le désert est là, le désert médical.
Des solutions existent aujourd'hui pour remettre des médecins dans les villages, dans les campagnes ? Qu'est-ce que vous allez dire à Emmanuel Macron tout à l'heure ?
Je n'ai pas de solution miracle. L'important, c'est déjà de travailler avec les collectivités locales. J’étais maire de ma commune, j’ai démissionné de ce poste parce que c'était trop difficile de cumuler les deux fonctions. Donc maintenant, je suis simplement médecin. Une des solutions c’est, bien entendu, la maison de santé. Nous avons été novateurs parce que depuis le départ, nous avons fonctionné en maison de santé et c'est surtout la collaboration. La maison de santé c’est un travail en équipe. Bien sûr, il y a tous les aspects financiers, le plateau technique, qui peut être beaucoup plus développé quand nous sommes en maison de santé. C'est surtout le fait de travailler en équipe, en groupe, avec des médecins, avec des infirmiers, avec des kinésithérapeutes et éventuellement d'autres professions. Cela permet de discuter des patients, des problèmes qu'il peut y avoir.
L’une des candidates à l'élection présidentielle, Valérie Pécresse, propose que les étudiants en médecine soient obligés de passer un an, pendant leurs études dans un désert médical. Est-ce que ça vous semble une piste ?
Je pense que ça peut être quelque chose d'intéressant. Nous accueillons depuis des années des internes en médecine, mais quand nous accueillons des internes et qu'ils ne viennent qu’une journée ou deux par semaine, ça permet de voir un peu comment nous travaillons mais ça ne permet pas réellement de travailler en équipe. Travailler avec un étudiant pendant une durée prolongée, si l'étudiant veut bien, bien entendu, parce que c'est un peu le souci, il faut un accueil et un dialogue avec les étudiants, avec la faculté. Cela peut permettre en effet d'avoir quelqu'un sous notre responsabilité, mais qui travaille avec nous. L’assistant médical, c'est aussi un peu la même chose. Nous travaillons sur ce sujet.
Ça doit être aussi une question d'argent, de rémunération ?
Je crois que c'est en effet important parce que nous sommes en Europe parmi les moins rémunérés, avec beaucoup de tâches et donc très peu de personnel en général et très peu de moyens techniques. La médecine libérale, la médecine générale est un peu un parent pauvre à l'heure actuelle en France, et un peu oubliés. On parle beaucoup de l'hôpital mais nous sommes aussi sur la brèche par rapport au Covid-19, par rapport aux premiers soins, en premier recours.
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