Fauteuils roulants remboursés à 100% : "Ce serait un vrai problème de ne pas tenir cette promesse", estime l'ancien champion paralympique Michaël Jérémiasz

En avril dernier, le chef de l'État a annoncé le remboursement intégral des fauteuils roulants en 2024, en vue des Jeux paralympiques de Paris. "On ne parle pas de luxe. C'est ce qui nous permet d'être des citoyens à part entière", précise Michaël Jérémiasz, l'ancien champion paralympique.
Article rédigé par franceinfo
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Une personne en fauteuil roulant à Monaco, le 6 décembre 2023 (photo d'illustration). (JEAN FRANÇOIS OTTONELLO / MAXPPP)

En 2024, en vue des Jeux paralympiques organisés à Paris, les fauteuils roulants seront à 100% remboursés. Huit mois plus tard, la réalisation de cette annonce d'Emmanuel Macron formulée le 26 avril 2023 lors de la Conférence nationale du handicap est attendue avec impatience par les personnes en situation de handicap. "Ce serait un vrai problème de ne pas tenir cette promesse", a estimé Michaël Jérémiasz vendredi 5 janvier sur franceinfo.

Selon l'ancien athlète paralympique de tennis en fauteuil, aujourd'hui chef de mission de l’équipe de France Paralympique aux Jeux de Paris 2024, "rembourser 60 000 fauteuils représente une goutte d'eau dans le budget de la Sécurité sociale".

franceinfo : Emmanuel Macron avait promis les fauteuils 100% remboursés en 2024. 60 000 personnes sont concernées en France. Pour l'heure, rien de concret. Vous imaginez que cette promesse ne puisse pas être tenue ?

Michaël Jérémiasz : Je ne vois pas comment. Ce serait un vrai problème de ne pas tenir cette promesse. C'est une année olympique et paralympique, des fonds ont été débloqués. En réalité, 80% des utilisateurs de fauteuils roulants sont des personnes âgées et souvent avec des fauteuils de location. Rembourser 60 000 fauteuils, c'est une goutte d'eau dans le budget de la Sécurité sociale.

"Aujourd'hui, ce n'est pas une question d'argent, c'est une question d'engagement politique, de le tenir et de donner les moyens aux équipes de le mettre en place". 

Michaël Jérémiasz, ancien champion paralympique

à franceinfo

C'est un enjeu de nomenclature pour que les fauteuils soient référencés, qu'on contrôle un peu les prix. Un fauteuil roulant électrique, c'est plus de 30 000 euros. Il n'y a aucun contrôle. Il n'y a pas de filière française. On est obligé d'acheter à l'étranger l'intégralité de nos fauteuils roulants. On ne parle pas de luxe, on ne fait pas du tuning avec nos fauteuils roulants. C'est ce qui nous permet d'être des citoyens à part entière et d'être autonomes dans la cité. C'est un préalable si l'on veut devenir des contribuables comme les autres.

Il y a un manque de volonté politique ?

J'ai échangé récemment avec les équipes de France Handicap qui travaillent dessus depuis trois ans. Ça prend énormément de temps parce qu'il faut rencontrer les fabricants. Il faut travailler avec les associations d'usagers pour savoir exactement de quoi on parle. Aujourd'hui, un fauteuil roulant manuel, sur mesure, avec des matériaux légers pour pouvoir monter, descendre des trottoirs, (...) ça coûte plus de 7 000 euros. Ma sécurité sociale et ma mutuelle, tous les cinq ans, me remboursent à peu près de 1 500 à 3 000 euros, pour un fauteuil roulant. Aujourd'hui, quand vous êtes sous le seuil de pauvreté avec uniquement l'allocation adulte handicapé qui est de 900 euros et que vous n'avez pas les moyens d'avoir une mutuelle, vous faites des cagnottes Leetchi.

Il y a aussi une grande promesse, 1,5 milliard d'euros pour l'accessibilité. Le chantier est énorme. L'accessibilité est très réduite. Le président s'est fixé les Jeux de Paris 2024 comme perspective. Sauf que le temps passe et on se demande si on n'est pas un peu passé à côté de cet enjeu.

Je ne dirais pas qu'on est passé à côté de cet enjeu. Je pense qu'on a pris du retard. Quand on a su qu'on avait les Jeux et qu'on allait s'en servir comme accélérateur, car il y a plus de moyens investis, il y a un changement de regard… Le problème, c'est qu'on s'y est pris un peu tard. L'accélération du chantier de l'accessibilité, ça fait deux ou trois ans qu'on a un petit peu intensifié ça. Il aurait fallu le faire il y a sept ou huit ans, lorsqu'on a obtenu les Jeux.

C'était peut-être l'opportunité de rendre Paris vraiment accessible. Selon les derniers chiffres d'Île-de-France Mobilités, 9% du métro est actuellement accessible. C'est 27 stations. C'est très peu.

C'est 9% parce qu'il y a le Grand Paris. À mon époque, c'était 3%. Le Grand Paris, de fait, comme toute nouvelle construction, est accessible. Pour moi, le métro, c'est un échec collectif, c'est qu'il n'y a pas eu de volonté politique de faire quoi que ce soit sur le métro. Aujourd'hui, les transports souterrains sont inaccessibles aux personnes en fauteuil roulant à Paris. Sauf qu'on sait que c'est la solution de mobilité la plus écologique, la plus économique et la plus rapide pour une personne, quelle qu'elle soit. (...) Sur la question des transports, il y a eu des solutions. Il y a évidemment des nouvelles constructions. Il y aura des systèmes de transports pendant les Jeux olympiques et paralympiques qui vont permettre de relier les différents sites qui, eux, sont tous accessibles. Donc, ce sera bien mieux que si on n'avait pas eu les Jeux. Mais ce n'est pas satisfaisant en 2024 que les personnes n'aient pas les mêmes droits et les mêmes libertés que des personnes valides.

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