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C'est dans ma tête. Revoir son école, et pouvoir lui dire au-revoir

Les enfants ont été privés de leur école durant tout le confinement. Elle avait déjà repris, pour certains, et reprendra, à partir de ce lundi 22 juin, pour tous. Beaucoup de parents sont rassurés. La psychanalyste Claude Halmos revient sur l'importance de ce retour à l'école pour les enfants, avant les vacances.

Article rédigé par franceinfo, Claude Halmos
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 4min
La réouverture des écoles, délicate à mettre en place, est importante pour les enfants.  (MAXPPP)

Les enfants ont donc été privés de leur école durant tout le confinement, depuis la mi-mars et jusqu'au 11 mai. Elle avait déjà repris, pour certains, et reprendra, à partir de ce lundi 22 mars, pour tous. Et cela rassure beaucoup de parents, qui craignaient que les vacances scolaires n’arrivent sans que leurs enfants aient pu, auparavant, revoir leur école.

franceinfo : est-ce que leur inquiétude était justifiée ? Est-ce que ce retour à l’école est vraiment important pour les enfants ?

Claude Halmos : Ce retour à l ‘école, même pour quelques jours, et même s’il est difficile à mettre en place, est important pour les enfants. L’école joue, dans leur vie, un rôle plus complexe qu’on ne le croit. Parce qu’elle n’elle n’est pas seulement pour eux un lieu d’apprentissage. Elle est, comme l’est pour les adultes, leur travail, le lieu de leur vie sociale. Et donc, comme ils sont des êtres en construction, celui où ils construisent leur aptitude à cette vie sociale.

Vous pouvez nous expliquer cela ?

Au début de sa vie, l’enfant vit sur une seule planète : la planète famille. C’est-à-dire son cercle familial et, éventuellement, des lieux qui le prolongent : la crèche, par exemple. Et puis, un jour, il découvre une autre planète : la planète école. Radicalement différente. Parce qu’il doit y vivre avec d’autres adultes, d’autres enfants, et trouver sa place dans le groupe. Et parce que le rapport adultes-enfants n’a rien à voir, là, avec celui qui a cours dans la famille.

À l’école, chacun est défini par sa fonction : enseignant, ou élève. Et ce n’est pas l’amour qui fonde les relations, mais le travail inhérent à ces fonctions. La maîtresse n’est là ni pour aimer les enfants, ni pour qu’ils l’aiment. Elle est là pour enseigner, et eux pour apprendre.

À partir de l’école, l’enfant fait donc l’apprentissage d’un fonctionnement qu’il retrouvera plus tard, identique, dans le monde du travail. Il n’a plus seulement une vie, mais deux : l’une, "privée", sur la planète famille, l’autre, "sociale", sur la planète école. Il passe chaque jour, comme les adultes, de l’une à l’autre, et il a besoin des deux.

Que se passe-t-il, s’il est privé d’école ?

L’école lui manque, et beaucoup d’enfants, actuellement, le disent. Mais cela peut aller plus loin. Parce que l’interruption de l’école, qui interrompt la croissance de la branche sociale de sa personnalité, que l’enfant y construit, peut lui donner un sentiment angoissant de régression (l’impression de redevenir petit). Et même le perturber dans la conscience qu’il a de lui-même. D’autant plus fortement que l’idée de l’école n’étant pas aussi installée dans sa tête que l’est, pour l’adulte, celle de son travail, et son appréhension du temps étant différente, il peut craindre qu’elle n’ait disparu.


Et, quoiqu’il en soit, clôturer une année est important pour intégrer les acquis que l’on y a faits, et repartir vers une nouvelle. Mais il serait important que l’école prévoie, pour le retour des enfants, des temps d’échanges, où ils puissent, ensemble, exprimer ce qu’ils ont ressenti pendant cette période. Cela les aiderait à dépasser les difficultés qu’ils ont pu rencontrer.

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