Lutte contre le Covid-19 à Dunkerque : pour le professeur Gilles Pialoux, il s'agit "de mesures locales alors que l'incendie est largement allumé"
Dans le Dunkerquois, les maires de l'agglomération proposent de renforcer les mesures sanitaires pour contenir l'épidémie de coronavirus. Mais pour le professeur Gilles Pialoux, chef du service des maladies infectieuses et tropicales de l'hôpital Tenon à Paris, il s'agit "de mesures locales alors que l'incendie est largement allumé".
Le ministre de la Santé Olivier Véran se rendra mercredi 24 février, à Dunkerque où l'on recense 900 cas positifs au Covid-19 pour 100 000 habitants, un taux record. Les maires de l'agglomération proposent notamment d'augmenter les vaccinations, le port du masque obligatoire partout et l'interdiction totale de rassemblements. "Ce sont des mesures locales qui sont prises alors que l'incendie est largement allumé", a estimé ce mardi sur franceinfo le professeur Gilles Pialoux, chef du service des maladies infectieuses et tropicales de l'hôpital Tenon à Paris.
Franceinfo : La situation à l'hôpital de Dunkerque est très tendue. Est-ce important de prendre des mesures locales ?
Gilles Pialoux : Bien sûr. Ce sont des mesures locales qui sont prises alors que l'incendie est largement allumé. C'est moins le cas à Dunkerque, mais la situation dans les Alpes-Maritimes est préoccupante au moins depuis le mois de janvier. On est dans des mesures partielles parce qu'on a diabolisé le mot du confinement, donc toute la politique est organisée pour l'éviter, ce qui est une stratégie d'erreur. Les variants ont impulsé une vitesse tout à fait différente et ils rendent ces mesures salvatrices mais on voudrait des mesures préventives. La situation de la Moselle, de Dunkerque et des Alpes-Maritimes ne sera pas circonscrite. Ce sont des problématiques nationales.
Le maire de Dunkerque ne s'opposera pas à un reconfinement. Qu'en pensez-vous ?
Le discours du maire de Dunkerque est extrêmement digne parce que c'est une façon de présenter à ses administrés un confinement qui ne s'appelle pas confinement puisque le mot est devenu antisocial. Mais ça ressemble beaucoup à un confinement qui ne s'appelle pas confinement. Il faut rappeler les situations de Melbourne, Auckland, où ils ont confiné pour quelques jours à partir de niveaux de circulation très inférieurs à ceux de la France. Je comprends l'hésitation parce que s'il y a confinement il faudra que cela soit pour plusieurs semaines, compte tenu du niveau de circulation du virus de base, et compte tenu des variants.
Il faudrait aussi des mesures dans les départements limitrophes ?
Si la situation se répète dans d'autres régions, comme l'Ile-de-France qui est sous tension, on ne va pas pouvoir multiplier comme ça des situations locales. Il y a un moment où ces situations seront tellement complexes et tendues que le règlement sera national.
En Bretagne, le député des Côtes-d'Armor Marc Le Fur demande un allègement des mesures. Est-ce que vous le comprenez ?
On l'entend, mais la situation est tellement tendue au niveau national qu'il me semble que c'est une erreur stratégique compte tenu des mouvements de population, des vacances qui sont en cours, d'alléger sans certitude. Les marqueurs qu'on utilise qui sont le taux de remplissage de la réanimation, le taux d'hospitalisations, sont des marqueurs tardifs et pour redescendre du niveau où on est à Dunkerque il va falloir des semaines.
Les mesures annoncées par le maire de Gravelines, port du masque partout sur le territoire dunkerquois et zéro rassemblement, sont-elles une bonne chose ?
Bien sûr, ce sont des mesures utiles mais le problème est de savoir si elles seront suffisantes. Il faut avoir des grands sites de dépistage et faire de la pédagogie locale pour que les gens se dépistent massivement. Il faut accrocher l'isolement et le tracing et le rétrotracing. Il faut regarder d'où vient la contamination pour comprendre les mécanismes de contamination. Cela nécessite que les Agences régionales de Santé aient suffisamment de personnes.
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